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Maintenant disponible : L’identité des familles, la troisième section de La famille compte 

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Maintenant disponible : L’identité des familles

Mackenzie Kolton

Mackenzie se consacre avec passion à la défense des droits des personnes 2ELGBTQIA+ et à la sensibilisation à leur réalité. Elle occupait auparavant le poste de responsable de l’innovation des programmes au sein de l’organisme Grands Frères Grandes Sœurs du Canada, où elle a participé à la création de la première formation en santé mentale centrée sur les réalités queers au Manitoba, tout en supervisant le département 2ELGBTQIA+ et son équipe. Elle a également travaillé pendant six ans avec l’organisme The Get REAL Movement, à titre de fondatrice du programme au Manitoba et de principale conférencière auprès de plus de 150 000 élèves, éducatrices et éducateurs, familles et entreprises à travers le pays. En sa qualité d’accompagnatrice de gestionnaires de haut niveau, elle a collaboré avec plus de 100 conseils scolaires nationaux, afin de les aider à mettre en place des stratégies novatrices favorables à l’inclusion.

Egale est un organisme phare au Canada pour les personnes 2ELGBTQIA+ et les défis auxquels elles sont confrontées. Nous nous employons à améliorer et à préserver des vies en misant sur la recherche, l’éducation, la sensibilisation ainsi que la défense des droits de la personne et de l’égalité, au Canada et ailleurs dans le monde. Notre travail contribue à bâtir des sociétés et des systèmes qui reflètent une vérité universelle, à savoir que toutes les personnes sont égales et qu’aucune ne devrait être mise à l’écart.

Annie Pullen Sansfaçon

Annie Pullen Sansfaçon est titulaire d’un Ph. D. en éthique et travail social (de la Montfort University, RU, 2007) et s’intéresse aux approches antioppressives et à l’éthique depuis le tout début de sa carrière. À partir de ces thèmes, elle a développé un axe de recherche visant à mieux comprendre les expériences d’oppression et de résistance des jeunes présentant une diversité de genre, comme les jeunes trans et non binaires, les jeunes bispirituel·les et les jeunes qui détransitionnent, en vue de développer de meilleures pratiques pour les soutenir. Elle s’intéresse également au soutien parental et social, ainsi qu’à l’incidence de celui-ci sur ces différents groupes de jeunes. Les projets de recherche qu’elle dirige tant au niveau national qu’international ont été publiés dans de nombreux articles scientifiques et cinq livres sur la question. Elle a cofondé et codirige actuellement le Centre de recherche sur la justice intersectionnelle, la décolonisation et l’équité (le CRI-JaDE), et est chercheuse associée à l’École de travail social de la Stellenbosch University en Afrique du Sud.

Nicole Denier

Nicole Denier est sociologue et se spécialise dans le travail, les marchés du travail et les inégalités. Elle a dirigé des projets primés sur les liens entre la diversité familiale et les inégalités sur le plan économique, notamment des recherches sur le bien-être économique des personnes 2ELGBTQI+ au Canada et des immigrantes et immigrants en Amérique du Nord. Nicole est actuellement professeure agrégée en sociologie à l’Université de l’Alberta. Elle est codirectrice du programme de bourses pour les personnes en début de carrière du Work and Family Researchers Network et fait partie des comités de rédaction des revues Canadian Studies in Population et Canadian Review of Sociology/Revue canadienne de sociologie.

Matthew Johnson 

Matthew Johnson est professeur de sciences familiales au Département d’écologie humaine de l’Université de l’Alberta. Ses recherches portent sur le développement des relations de couple et il est chercheur principal de la Edmondon Transitions Study (Étude sur les transitions d’Edmonton).

Robin McMillan

Au cours de sa carrière, Robin McMillan a passé plus de 30 ans à travailler dans le secteur de la petite enfance. Elle a d’abord travaillé comme éducatrice pendant huit ans auprès d’enfants d’âge préscolaire. Puis elle a quitté la première ligne afin de développer des ressources pour les praticiennes et praticiens à la Fédération canadienne des services de garde à l’enfance (FCSGE). Elle travaille à la FCSGE depuis 1999, où elle est passée d’assistante de projet à gestionnaire de projet, puis à son rôle actuel de conceptrice de projets, de programmes et de partenariats. Plusieurs réalisations ont marqué sa carrière à la FCSGE, notamment la gestion de plus de 20 projets nationaux et internationaux, y compris un projet de l’ACDI en Argentine et la présentation d’un rapport avec l’honorable sénateur Landon Pearson au Comité des droits de l’enfant à Genève, en Suisse.

Robin a été membre du conseil d’administration de l’Ottawa Carleton Ultimate Association pendant deux ans et a participé à l’organisation de nombreux événements caritatifs locaux. Elle a fondé et animé un groupe local de soutien aux parents, Ottawa Parents of Children with Apraxia (Parents d’enfants atteints d’apraxie à Ottawa), ainsi qu’un groupe national, Apraxia Kids Canada (L’apraxie chez les enfants au Canada). Elle est mariée et a un fils de 17 ans atteint d’un grave trouble de la parole (apraxie verbale) et d’une légère déficience intellectuelle, ce qui l’a propulsée dans le monde du plaidoyer pour le soutien à la parentalité. Elle a d’ailleurs reçu le prix de défenseure de l’année en 2010, décerné par la Childhood Apraxia of Speech Association of North America.

À propos de l’organisme : Nous représentons la communauté du secteur de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants au Canada, à savoir l’ensemble des professionnel·les et des praticien·nes d’un océan à l’autre. Nous donnons voix à la passion, à l’expérience et aux pratiques en matière d’apprentissage et de garde des jeunes enfants (AGJE) au pays. Nous mettons de l’avant des recherches novatrices en matière de politiques et de pratiques afin de mieux éclairer le développement et la prestation des services. Nous faisons preuve de leadership sur les enjeux qui touchent notre secteur, ayant foi en notre capacité d’influencer positivement la vie des jeunes enfants, à savoir notre véritable objectif, notre raison d’être. Les sujets abordés, explorés et communiqués au sein de notre communauté ont le potentiel de transformer des vies et nous en avons pleinement conscience. Nous sommes une force engagée et passionnée en faveur d’un changement positif là où ça compte le plus, c’est-à-dire auprès des enfants.

Maude Pugliese

Maude Pugliese est professeure agrégée à l’Institut national de la recherche scientifique (Université du Québec) au sein du programme en études des populations et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en expériences financières des familles et inégalités de patrimoine. Elle est également directrice scientifique du Partenariat de recherche Familles en mouvance, qui regroupe des dizaines de personnes engagées dans la recherche et la pratique afin d’étudier les changements qu’ont connus les familles et leurs répercussions au Québec. Maude est également directrice de l’Observatoire des réalités familiales du Québec/Famili@, un organisme de mobilisation des connaissances qui s’emploie à diffuser les recherches les plus récentes sur les questions familiales au Québec, en des termes accessibles à un large public. Ses travaux de recherche actuels portent sur la transmission intergénérationnelle du patrimoine et des pratiques de gestion des finances, les inégalités de genre en matière d’actifs et de dettes, ainsi que sur l’influence des nouveaux régimes intimes (séparation, remariage, cohabitation, polyamour, etc.) sur les idéaux et les tendances quant à l’accumulation de richesses.

Gaëlle Simard-Duplain 

Gaëlle Simard-Duplain est professeure adjointe au Département de sciences économiques de l’Université Carleton. Ses travaux de recherche portent sur les facteurs qui ont une incidence sur la santé et la situation sur le marché du travail. Elle s’intéresse particulièrement à la relation entre les politiques et l’atténuation ou l’exacerbation des inégalités chez les familles, à la fois dans la dynamique au sein des ménages et dans les mécanismes de transmission intergénérationnelle. Pour ce faire, elle a principalement recours à des sources de données administratives, parfois liées à des données d’enquête ou à des méthodes de recherche quasi expérimentales. Gaëlle est titulaire d’un doctorat en sciences économiques de l’Université de Colombie-Britannique.

Kim de Laat

Kim de Laat est sociologue et professeure adjointe en organisation et en comportement humain à la Stratford School of Interaction Design and Business de l’Université de Waterloo. Ses recherches portent sur les dimensions temporelles et spatiales du travail – soit la durée du travail et l’endroit où il est effectué – et leur relation avec les inégalités raciales et de genre. Kim mène actuellement deux projets de recherche. Le premier s’intéresse à la manière dont les parents exerçant des métiers créatifs parviennent à concilier leurs responsabilités parentales tout en poursuivant leur pratique artistique. Le second étudie dans quelle mesure les modalités de travail flexibles, telles que le travail hybride et le télétravail, ont une influence sur la répartition du travail – à la fois le travail rémunéré au bureau ainsi que les tâches domestiques et les soins aux enfants non rémunérés à la maison.

Andrea Doucet

Andrea Doucet est titulaire de la Chaire de recherche du Canada (niveau 1) sur l’égalité entre les sexes, le travail et les soins, professeure de sociologie et d’études sur les femmes et le genre à l’Université Brock, et professeure associée à la fois à l’Université Carleton et à l’Université de Victoria (Canada). Elle a publié de nombreux ouvrages sur les politiques soins/travail, les politiques en matière de congé parental, la paternité et les soins, la division entre les sexes et le travail rémunéré et non rémunéré des parents. Elle est l’autrice de deux éditions du livre primé Do Men Mother? (Presses de l’Université de Toronto, 2006, 2018), coautrice de deux éditions du livre Gender Relations : Intersectionality and Social Change (Oxford, 2008, 2017), et coéditrice du livre Thinking Ecologically, Thinking Responsibly: The Legacies of Lorraine Code (SUNY, 2021). Elle écrit actuellement sur les soins socio-écologiques et les liens entre les congés parentaux, les congés liés aux soins et les services de base universels. Parmi ses récentes collaborations de recherche, elle a notamment participé à un projet sur l’expérience de la maternité chez les jeunes Noires avec Sadie Goddard-Durant et divers organismes communautaires canadiens; à un projet axé sur les approches féministe, écologique et autochtone en matière d’éthique de soins et de travail de soin, avec Eva Jewell et Vanessa Watts; ainsi qu’à un projet sur l’inclusion et l’exclusion sociales dans les politiques de congé parental, avec Sophie Mathieu et Lindsey McKay. Elle est directrice de projet et chercheuse principale du Programme canadien de partenariats de recherche du CRSH, Réinventer les politiques soins/travail, et co-coordinatrice du International Network on Leave Policies and Research.

Donna S. Lero

Donna S. Lero est professeure émérite et titulaire de la première Chaire Jarislowsky sur les familles et le travail à l’Université de Guelph, où elle a cofondé le Centre pour les familles, le travail et le bien-être. Elle mène des recherches dans les domaines des politiques sociales, du travail et de la famille, et de la prestation de soins. Ses projets actuels portent sur l’emploi maternel et les modes de garde des enfants, les politiques en matière de congé parental, et l’incapacité et l’emploi. Elle participe également au projet Inclusive Early Childhood Service System (IECSS) ainsi qu’au projet du CRSH, Réinventer les politiques soins/travail.

Liv Mendelsohn

Liv Mendelsohn, M.A., M.Ed., est directrice générale du Centre canadien d’excellence pour les aidants, où elle dirige des initiatives en matière d’innovation, de recherche, de politiques et de programmes visant à soutenir les personnes aidantes et les prestataires de soins au Canada. Leader visionnaire comptant plus de 15 ans d’expérience dans le secteur à but non lucratif, Liv est aidante depuis fort longtemps et vit elle-même avec un handicap. Son expérience en tant que membre de la « génération sandwich » alimente son aspiration envers la création d’un mouvement pour les personnes aidantes au Canada afin de changer la façon dont la prestation de soins est perçue, valorisée et soutenue.

Au cours de sa carrière, Liv a fondé et dirigé plusieurs organismes axés sur l’incapacité et la prestation de soins, notamment le Wagner Green Centre for Accessibility and Inclusion ainsi que le festival du film de Toronto ReelAbilities. Liv est présidente du comité consultatif sur l’accessibilité de la Ville de Toronto. Elle a reçu le Prix pour l’équité décerné par la Ville de Toronto et a été reconnue pour son leadership par la University College, l’Université de Toronto, l’organisme Enfants avenir Ontario et les centres communautaires juifs d’Amérique du Nord. Liv est agrégée supérieure de recherche au Massey College et diplômée du Mandel Institute for Non-Profit Leadership ainsi que du programme de bourses DiverseCity de la CivicAction Leadership Foundation.

À propos de l’organisme : Le Centre canadien d’excellence pour les aidants appuie et habilite les personnes aidantes et les prestataires de soins, favorise l’avancement des connaissances et la capacité d’agir dans le domaine des soins, et plaide en faveur de politiques sociales efficaces et visionnaires, tout en privilégiant une approche qui se veut à l’écoute des personnes ayant une incapacité. Notre expertise et nos connaissances, tirées des expériences vécues des personnes aidantes et des prestataires de soins, nous aident à faire campagne pour de meilleurs systèmes et un changement durable. Nous sommes plus qu’un simple bailleur de fonds; nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires et nos bénéficiaires pour atteindre des objectifs communs.

Barbara Neis

Barbara Neis est professeure titulaire émérite de la Chaire John Lewis Paton et professeure-chercheuse honoraire (à la retraite) du Département de sociologie de l’Université Memorial. Barbara a obtenu son doctorat en sociologie à l’Université de Toronto en 1988. Elle s’intéresse principalement aux interactions entre le travail, l’environnement, la santé, les familles et les communautés dans les milieux marins et côtiers. Elle a cofondé et codirigé le SafetyNet Centre for Occupational Health and Safety à l’Université Memorial et a été présidente de l’Association canadienne de la recherche en santé et sécurité au travail. Depuis les années 1990, elle a mené, supervisé et soutenu d’importants programmes de recherche en collaboration avec l’industrie de la pêche à Terre-Neuve-et-Labrador, notamment dans les domaines suivants : les connaissances des pêcheurs, les sciences et la gestion marines, la santé et la sécurité au travail, la reconstruction des pêcheries effondrées, et le genre et la pêche. Entre 2012 et 2023, elle a dirigé le Partenariat en mouvement, financé par le CRSH, un vaste programme de recherche multidisciplinaire explorant la dynamique de la mobilité professionnelle prolongée/complexe liée à l’emploi dans le contexte canadien, notamment son incidence sur les travailleuses et travailleurs et leur famille, les employeurs et les communautés.

Deborah Norris

Titulaire de diplômes supérieures en sciences familiales, Deborah Norris est professeure au Département d’études de la famille et de gérontologie de l’Université Mount Saint Vincent. Son intérêt persistant envers l’interrelation entre le travail et la vie de famille a amené Deborah à s’investir très tôt dans l’élaboration de programmes d’éducation à la vie familiale au Centre de ressources pour les familles des militaires (CRFM) de la Base des Forces canadiennes (BFC) d’Halifax. Les connaissances acquises au cours de ses échanges avec les participantes et participants aux programmes ont été les étincelles qui ont déclenché chez elle un inébranlable engagement à en apprendre davantage sur la vie des familles des militaires, qui ont été le fil conducteur de ses recherches tout au long de sa carrière. S’inspirant des théories écologique et critique, le programme de recherche de Deborah se veut pratique, collaboratif et interdisciplinaire. Elle a dirigé des études portant sur la résilience chez les familles des militaires et des vétéranes et vétérans; l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle chez les familles des militaires; la relation bidirectionnelle entre les blessures de stress opérationnel et la santé mentale et le bien-être des familles des vétéranes et vétérans; les programmes de psychoéducation familiale pour les familles des militaires et des vétéranes et vétérans; et la transition entre la vie militaire et la vie civile. Elle a collaboré avec des spécialistes du milieu universitaire, des scientifiques du ministère de la Défense nationale (MDN), des membres du personnel d’Anciens Combattants Canada (ACC) ainsi que d’autres parties prenantes. Récemment, elle a élargi son programme de recherche afin de mettre l’accent sur les effets que peut avoir le stress opérationnel sur les familles du personnel de la sécurité publique.

Susan Prentice

Susan Prentice est professeure du programme d’études gouvernementales Duff Roblin à l’Université du Manitoba, où elle enseigne la sociologie. Elle se spécialise dans les politiques familiales, et plus particulièrement dans les politiques liées à la garde des enfants. Elle a publié de nombreux travaux sur les politiques familiales et liées à la garde des enfants, dont les plus récents sont accessibles sur sa page de profil de l’UM. Elle donne des cours sur les politiques familiales aux premier et deuxième cycles universitaires. Susan travaille en étroite collaboration avec des groupes provinciaux et nationaux qui font la promotion des services de garde et est membre du comité de direction de la Child Care Coalition of Manitoba.

Yue Qian

Yue Qian (prononcé Yew-ay Chian) est professeure agrégée en sociologie à l’Université de la Colombie-Britannique, à Vancouver. Elle a obtenu son doctorat en sociologie à la Ohio State University. Ses recherches portent sur le genre, la famille et le travail, et les inégalités dans une perspective mondiale, et mettent particulièrement l’accent sur l’Amérique du Nord et l’Extrême-Orient.

Shelley Clark

Shelley Clark, démographe et professeure lauréate du prix James-McGill en sociologie, mène des recherches sur le genre, la santé, les dynamiques familiales et les périodes transitoires de la vie. Après avoir obtenu son doctorat à la Princeton University en 1999, Shelley a travaillé à titre d’adjointe de programme du Population Council à New York (1999-2002) et de professeure adjointe à la Harris School of Public Policy de la University of Chicago (2002-2006). À l’été 2006, elle a intégré le Département de sociologie de l’Université McGill, où elle est devenue en 2012 la directrice fondatrice du Centre de recherche sur la dynamique des populations. Une grande partie de ses recherches au cours des 20 dernières années se sont intéressées à la manière dont les adolescentes et adolescents d’Afrique subsaharienne effectuent leurs principales transitions vers l’âge adulte alors qu’il y sévit une épidémie persistante de VIH/sida. D’autres travaux ont permis de mettre en relief les vulnérabilités sociales, économiques et sanitaires des mères célibataires et de leurs enfants en Afrique subsaharienne. Récemment, Shelley s’est lancée dans un nouveau programme de recherche visant à évaluer les inégalités entre les régions rurales et urbaines ainsi que les dynamiques familiales aux États-Unis et au Canada. Ses découvertes soulignent la diversité des structures familiales dans les régions rurales ainsi que les conséquences d’un accès limité à la contraception sur la fécondité et la santé reproductive des femmes de ces régions.

La réalité des mères travailleuses-navetteuses (Families, Mobility, and Work)

Résumé d’un chapitre sur les répercussions du travail par navettage aéroporté (« fly-in, fly-out ») en lien avec la maternité

9 novembre 2022

Dans le chapitre « A Juggling Act: Mothering While FIFO » (Être mère et travailleuse‑navetteuse : une véritable prouesse), les auteures Griffin Kelly, Maria Fernanda Mosquera Garcia et Sara Dorow, Ph. D., posent un regard sur la réalité et la résilience des « mères travailleuses‑navetteuses ». Elles mettent en relief l’expérience du rôle de mère chez ces femmes qui doivent régulièrement faire la navette aérienne jusque dans l’Ouest canadien (en Alberta et en Colombie-Britannique) pour y travailler. Comme en témoignent les quatre récits qu’elles mettent en lumière, ces conditions engendrent diverses difficultés au fil de la vie pour les femmes qui veulent devenir mères ou qui le sont déjà.

Ce chapitre constitue l’une des nombreuses contributions au livre Families, Mobility, and Work, un recueil d’articles et d’autres produits de connaissance basés sur les travaux de recherche du Partenariat en mouvement. Publié en septembre 2022 par les presses universitaires de l’Université Memorial, cet ouvrage est maintenant disponible en version imprimée, en format électronique ainsi que gratuitement, en libre accès, sur son site Web.

« Quand on est travailleuse-navetteuse, il faut savoir gérer le “soi” qui appartient au campement et l’autre qui reste à la maison, mais les responsabilités maternelles créent des conflits et des obstacles entre ces deux réalités, notamment lorsque l’on tente d’entrevoir l’avenir au-delà des rôles liés au travail et à la maternité. […] ce stress et ces ajustements surviennent dans des espaces-temps distincts où s’entremêlent les impératifs des cycles de croissance-décroissance, et sollicitent encore davantage les réseaux de soins majoritairement féminins, en faisant souvent appel aux mères de ces travailleuses-navetteuses. » [traduction] – Griffin Kelly, Maria Fernanda Mosquera Garcia et Sara Dorow, Ph. D.

Accédez au livre Families, Mobility, and Work (en anglais seulement)

Résumé du chapitre

Il n’existe que peu d’études sur la réalité des femmes de métier en situation de mobilité pour le travail, encore moins à propos des répercussions de cette mobilité sur leur vie de famille (sauf peut-être les travaux récents de Nagy et Teixeira, 2020). Certaines études se sont penchées sur la réalité des femmes, des familles et des mères dans le contexte du navettage aérien pour le travail (« fly-in fly-out »), en se concentrant toutefois sur les épouses de travailleurs-navetteurs (Kaczmarek et Sibbel, 2008; Swenson et Zvonkovic, 2016). La situation des travailleuses-navetteuses employées comme professionnelles ou dans des campements n’a quant à elle été abordée que dans une certaine mesure. Notre rapport est axé sur les constatations de deux études actuelles sur les femmes de métier, principalement dans le secteur des sables bitumineux albertains, en vue de dépeindre la réalité associée au « rôle de mère chez les travailleuses-navetteuses ». Nous proposons quatre mises en situation afin d’illustrer et de personnaliser les difficultés et l’exclusion vécues par certaines travailleuses-navetteuses du secteur de l’extraction dans l’Ouest du Canada, et ce, à différents stades : durant la grossesse au travail, avec de jeunes enfants à élever, et dans le cadre de conflits sur la garde des enfants. Ces récits témoignent de l’importance de s’intéresser aux politiques et aux pratiques des employeurs qui peuvent faire obstacle au travail de ces travailleuses-navetteuses.

À propos des auteures

Griffin Kelly est diplômée du programme de maîtrise du Département de sociologie de l’Université de l’Alberta, où elle a rédigé une thèse sur la réalité des femmes de métier et le harcèlement sexiste parmi les travailleurs des sables bitumineux de l’Alberta.

Maria Fernanda Mosquera Garcia est étudiante à la maîtrise en sociologie de l’Université de l’Alberta. Ses travaux de recherche sont axés sur les réalités liées au déplacement forcé des Latino-Américains et à leur établissement au Canada. Elle agit également à titre d’adjointe de recherche dans le cadre du projet sur la mobilité pour le travail et la santé mentale. Elle a par ailleurs participé au « Prison Project » de l’Université de l’Alberta comme adjointe de recherche.

Sara Dorow, Ph. D., M.A., B.A., est professeure et présidente du Département de sociologie de l’Université de l’Alberta, où elle enseigne et mène des recherches dans divers domaines, notamment la mobilité, la migration, la famille, le travail et le genre, en misant sur des méthodes qualitatives et une approche multidimensionnelle. Elle a dirigé l’équipe albertaine responsable du Partenariat en mouvement dans le cadre de ses travaux de longue date sur la dimension sociale associée à l’exploitation des sables bitumineux dans la région. Ses travaux de recherche antérieurs ont aussi porté sur la famille, la race et le genre en lien avec l’adoption internationale.

Réflexions parentales sur l’avenir postpandémie au Canada

Nadine Badets

6 mai 2020

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Les restrictions relatives à la pandémie de COVID-19 ont transformé la vie des familles au Canada. En raison de la fermeture des écoles, des garderies, des restaurants et de plusieurs commerces, ainsi que des importantes pertes d’emplois et des nouvelles mesures favorisant le travail à domicile, plusieurs parents et enfants passent beaucoup plus de temps ensemble qu’auparavant.

Comment les familles conçoivent-elles la vie après la pandémie? Selon des données recueillies pendant six semaines par l’Institut Vanier de la famille, l’Association d’études canadiennes et la firme Léger, les familles ne sont pas prêtes à renvoyer leurs enfants à l’école cette année, mais les parents sont disposés à réintégrer leur milieu de travail après la pandémie. C’est ce qu’indiquent certains résultats de cette série de sondages en cours1.

La peur du coronavirus est plus forte chez les familles qui ont des enfants

Au 6 mai 2020, les enfants et les adolescents de 19 ans et moins représentaient une faible proportion des cas de COVID‑19 au Canada (5 %)2. Toutefois, près de 30 % des adultes vivant avec des enfants et des adolescents de moins de 18 ans craignent fortement qu’un membre de leur famille immédiate contracte la COVID-19, comparativement à 22 % de ceux qui vivent sans enfant3 (figure 1).

Malgré cela, plus de la moitié des adultes vivant avec des enfants (56 %) affirment qu’ils appuieraient une politique gouvernementale visant à assouplir les restrictions de distanciation sociale (physique) pour toutes les personnes de moins de 65 ans, alors que 42 % des personnes vivant sans enfant appuieraient une telle politique.

La plupart des parents ne veulent pas que leurs enfants suivent des cours d’été pour rattraper le retard

Plus de 80 % des parents vivent avec leurs enfants pendant la pandémie, et 7 % partagent la garde de leurs enfants avec un parent vivant au sein d’un autre ménage. Six parents sur 10 (60 %) déclarent qu’ils discutent davantage avec leurs enfants actuellement qu’ils ne le faisaient avant le confinement. Les parents d’enfants d’âge scolaire explorent également le système éducatif avec leurs enfants en tant que nouveaux enseignants, tuteurs et aides aux devoirs. L’éducation à domicile est difficile pour plusieurs familles4, en plus de susciter des inquiétudes à l’égard du retard que prennent les élèves.

La plupart des provinces n’ont pas encore annoncé leur intention de rouvrir les écoles, et les trois territoires ont confirmé qu’ils comptaient maintenir les écoles fermées jusqu’en septembre. Toutefois, le Québec s’est engagé à rouvrir la plupart des écoles primaires le 11 mai et, en date du 29 avril 2020, l’Ontario et la Nouvelle-Écosse ont prévu des dates d’ouverture provisoires plus près du mois de juin, mais leurs dates butoirs changent constamment5. Lorsqu’on les a interrogés à cet égard, les deux tiers (66 %) des parents ont affirmé que, même si les écoles au Canada ouvrent avant la fin de juin, ils préfèrent que leurs enfants ne retournent en classe qu’en septembre, plutôt que d’aller à l’école durant l’été (en juillet et en août) en vue de rattraper le temps perdu.

Plus de la moitié des parents sont disposés à retourner au travail, mais ils ne veulent pas utiliser les transports en commun

La pandémie de COVID-19 a engendré d’innombrables pertes d’emplois à l’échelle du pays6, et les parents vivant avec des enfants qui considèrent la crise sanitaire comme une « menace importante » pour leur emploi sont plus susceptibles d’affirmer se sentir tristes, anxieux ou nerveux, par rapport aux personnes vivant sans enfant7.

Parmi les personnes qui ont conservé leur emploi, celles qui vivent avec des enfants sont plus susceptibles de se déclarer satisfaites des mesures instaurées par leur employeur afin de réagir à la COVID‑19 (59 %) que les personnes sans enfant (37 %). Cet écart peut s’expliquer par le fait que la situation permet aux parents de travailler à domicile tout en s’occupant de leurs enfants, les garderies et les écoles étant fermées. Environ 55 % des adultes vivant avec des enfants déclarent travailler actuellement à domicile (figure 2). Les personnes vivant avec des enfants sont également plus susceptibles (54 %) que les personnes sans enfant (37 %) d’affirmer qu’elles seraient à l’aise de réintégrer leur milieu de travail une fois les restrictions liées à la COVID‑19 levées.

Cependant, plus de 60 % des parents ont affirmé qu’ils ne seraient pas à l’aise d’emprunter les transports en commun, et ce, même lorsque les restrictions liées à la COVID‑19 commenceront à être assouplies, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les déplacements lorsque les gens se rendront à leur lieu de travail (figure 3). Les adultes vivant avec des enfants sont plus susceptibles de dire qu’ils préféreraient se rendre au travail seulement lorsque c’est nécessaire (39 %) que les personnes sans enfant (27 %).

Les parents abandonnent leurs projets de vacances, la plupart ne voyageront pas en 2020

En plus d’exprimer leur malaise à l’égard des transports en commun, les parents ne se disent pas moins préoccupés par rapport aux voyages. Environ 6 adultes sur 10 (59 %) vivant avec des enfants ont indiqué avoir dû modifier leurs projets de vacances en raison de la pandémie de coronavirus de 2020, probablement en lien avec le confinement au Canada et la fermeture des frontières autour de la semaine de relâche. Lorsqu’on leur a demandé s’ils comptaient prendre des vacances en 2020, 72 % des parents ont répondu que c’était peu probable.

Nadine Badets, Institut Vanier, en détachement de Statistique Canada

 


Notes

  1. Un sondage de l’Institut Vanier de la famille, de l’Association d’études canadiennes et de la firme Léger, mené du 10 au 13 mars, du 27 au 29 mars, du 3 au 5 avril, du 10 au 12 avril, du 17 au 19 avril et du 24 au 26 avril 2020, comprenait environ 1 500 personnes de 18 ans et plus qui ont été interrogées à l’aide d’une technologie ITAO (interview téléphonique assistée par ordinateur) dans le cadre d’une enquête en ligne. Tous les échantillons, à l’exception de ceux du 10 au 13 mars et du 24 au 26 avril, comprenaient également un échantillon de rappel d’environ 500 immigrants. À l’aide des données du Recensement de 2016, les résultats ont été pondérés en fonction du sexe, de l’âge, de la langue maternelle, de la région, du niveau de scolarité et de la présence d’enfants dans le ménage, afin d’assurer un échantillon représentatif de la population. Aucune marge d’erreur ne peut être associée à un échantillon non probabiliste (panel en ligne, dans le présent cas). Toutefois, à des fins comparatives, un échantillon probabiliste de 1 512 répondants aurait une marge d’erreur de ±2,52 %, et ce, 19 fois sur 20.
  2. Agence de la santé publique du Canada, Maladie à coronavirus de 2019 (COVID-19) : Mise à jour quotidienne sur l’épidémiologie (consulté le 6 mai 2020). Lien : https://bit.ly/2z9rMFJ
  3. Voir la note 1.
  4. Jessica Wong, « Frustrated Parents in Ontario Pivot from Official Distance-Learning Program Amid COVID-19 », CBC News (30 avril 2020). Lien : https://bit.ly/3aTOMFR
  5. CBC Kids News, When Will Your School Reopen? Check Out This Map (29 avril 2020). Lien : https://bit.ly/2KMhcGW
  6. Statistique Canada, « Enquête sur la population active, mars 2020 » dans Le Quotidien (9 avril 2020). Lien : https://bit.ly/2YDGkIm
  7. Jennifer Kaddatz, « Les familles peinent à composer avec les conséquences financières de la pandémie de COVID‑19 », Institut Vanier de la famille (9 avril 2020).

 

Un sondage révèle des écarts entre les sexes par rapport aux expériences et aux réactions relatives à la pandémie de COVID-19

16 avril 2020

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Pendant une pandémie, comme c’est le cas dans la vie en général, les femmes et les hommes ont souvent des réalités et des comportements différents. Selon les données du sondage réalisé au cours des trois dernières semaines1 par l’Institut Vanier de la famille, l’Association d’études canadiennes et la firme Léger, une proportion plus élevée de femmes que d’hommes perçoivent la pandémie de COVID-19 comme une menace et ont subi des conséquences physiques, émotionnelles et sociales résultant de la distanciation sociale et de l’isolement à domicile.

  • Les femmes sont beaucoup plus susceptibles que les hommes d’éprouver de l’anxiété ou de la nervosité, de la tristesse, de l’irritabilité ou de la difficulté à dormir durant la pandémie.
  • Les femmes sont également plus susceptibles de respecter les consignes de sécurité, se disent satisfaites des mesures fédérales et provinciales mises en œuvre pour aplanir la courbe et affirment qu’elles accepteraient des mesures d’application plus strictes.

Les femmes sont plus susceptibles de percevoir le coronavirus comme une menace, mais avec le temps, les différences convergent

En général, les femmes perçoivent la COVID-19 comme une menace plus grave que ne la perçoivent les hommes à l’égard de ses répercussions sur la société. Dans le plus récent cycle du sondage, mené du 3 au 5 avril 2020, une plus forte proportion de femmes que d’hommes disent percevoir le virus comme une menace pour l’économie canadienne (94 % c. 91 %), une menace pour la vie quotidienne au sein de leur communauté (81 % c. 75 %) et une menace pour la santé de la population dans son ensemble (83 % c. 74 %). Une proportion égale de femmes et d’hommes (53 %) affirment que la COVID-19 est une menace pour leur situation financière personnelle.

À l’égard de l’impact personnel sur la santé*, les femmes ont également tendance à exprimer une inquiétude plus vive. Près de 7 femmes sur 10 (68 %) de 18 ans et plus indiquent qu’elles ont « très peur » ou « assez peur » de contracter le coronavirus, par rapport à 63 % des hommes (figure 1). En parallèle, 8 femmes sur 10 (80 %) craignent qu’un membre de leur famille en soit infecté, comparativement à 73 % des hommes.

Lorsqu’on leur demande si le pire de la crise est derrière nous, si on le vit actuellement ou s’il est à venir, 69 % des femmes indiquent qu’elles croient que le pire est à venir, par rapport à 64 % des hommes. À l’autre extrémité, 11 % des femmes et 18 % des hommes disent penser que le virus ne constitue pas une menace réelle et qu’on le présente de façon « démesurée »*; néanmoins, les données se rapportant aux femmes et aux hommes recueillies au cours des trois dernières semaines suggèrent qu’avec le temps, ces écarts se sont resserrés (figures 1 et 2).

On remarque des différences marquées entre les sexes chez les jeunes adultes à l’égard des relations avec la famille et les amis

Les données montrent que les femmes et les hommes au Canada se sont appliqués à aplanir la courbe de la COVID-19. Près de 9 femmes et hommes sur 10 disent pratiquer la distanciation sociale, maintenir une distance sécuritaire de 2 mètres des autres personnes, laver leurs mains plus souvent qu’à l’habitude et ne sortir que lorsque c’est nécessaire (figure 3).

Les différences entre les femmes et les hommes sont peu prononcées par rapport aux activités d’achat déclarées au cours de la dernière semaine. Les femmes sont légèrement moins susceptibles de s’être rendues à l’épicerie (69 % c. 72 %), dans un magasin de vins et spiritueux (13 % c. 17 %) ou à un comptoir de mets à emporter d’un restaurant (20 % c. 22 %). Toutefois, les écarts sont plus importants entre les femmes et les hommes ayant fréquenté un dépanneur au cours des 7 derniers jours (15 % c. 22 %).

Des différences plus marquées entre les sexes ont été relevées en matière de gestion des relations avec la famille et les amis durant la pandémie, plus particulièrement lorsque l’on prend l’âge en considération. Les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de déclarer avoir demandé aux autres de pratiquer la distanciation sociale (86 % c. 79 %), comme le montre la figure 3. L’écart entre les sexes le plus marqué à cet égard se trouve chez les femmes et les hommes de 18 à 24 ans (une différence de 13 points de pourcentage), mais il demeure perceptible à une échelle réduite au sein du groupe des 35 à 54 ans (une différence de 2 points de pourcentage) et de celui des 55 ans et plus (une différence de 8 points de pourcentage), comme on peut le constater à la figure 4.

Par ailleurs, les hommes – plus particulièrement les jeunes hommes – sont plus susceptibles de visiter les amis et la famille durant la pandémie de COVID-19 : 30 % des hommes de 18 à 34 ans affirment avoir visité des amis ou des membres de la famille depuis le début de la crise du coronavirus, ce qui représente plus du double de la proportion (14 %) des femmes du même groupe d’âge et environ quatre fois la proportion des hommes (8 %) et des femmes (6 %) de 55 ans et plus (figure 5).

Les femmes acceptent mieux les mesures potentiellement plus strictes visant à aplanir la courbe

Près des trois quarts des femmes au Canada (74 %) sont satisfaites des mesures instaurées par le gouvernement fédéral dans le but de combattre la COVID-19, et 84 % le sont des mesures instaurées à l’échelle provinciale, selon les résultats du sondage réalisé du 3 au 5 avril 2020. Ces données sont comparables à 69 % et à 79 % des hommes, et révèlent un écart entre les sexes semblable à ce qui avait été observé lors du cycle du sondage du 10 au 13 mars.

Les femmes indiquent aussi plus couramment être en accord avec des mesures potentiellement plus strictes qui pourraient être appliquées afin de contenir la pandémie de COVID-19. Comme le montre le sondage du 3 au 5 avril, 7 femmes sur 10 (68 %) sont entièrement d’accord à ce que les policiers puissent remettre des contraventions aux citoyens qui ne respectent pas les mesures instaurées, comparativement à 62 % des hommes, alors que 49 % des femmes et 46 % des hommes sont d’avis que les policiers devraient même pouvoir arrêter des gens. Si les villes devaient se mettre en quarantaine complète, 43 % des femmes affirment qu’elles seraient entièrement d’accord avec cette mesure, comparativement à 36 % des hommes.

Une proportion plus élevée de femmes éprouvent de l’anxiété, de la tristesse, de l’irritabilité et de la difficulté à dormir

Les femmes sont plus susceptibles que les hommes de déclarer qu’elles ont « très souvent » ou « souvent » éprouvé de l’anxiété ou de la nervosité, de la tristesse, de l’irritabilité ou de la difficulté à dormir depuis le début de la pandémie de COVID-19. En effet, c’est à l’égard de ces indicateurs que l’on observe la plus grande différence entre les sexes dans le cadre du sondage mené du 3 au 5 avril, avec une proportion de femmes plus importante de 9 à 15 points de pourcentage par rapport aux hommes affirmant avoir connu de tels épisodes (figure 6).

Les jeunes femmes, de 18 à 34 ans, sont plus particulièrement susceptibles de déclarer éprouver « très souvent » ou « souvent » de l’anxiété ou de la nervosité comparativement à leurs homologues masculins (63 % c. 40 %). En outre, elles sont aussi beaucoup plus susceptibles de déclarer ressentir de la tristesse (56 % c. 36 %) et de l’irritabilité (61 % c. 41 %). Près de la moitié (45 %) des femmes de 18 à 34 ans indiquent éprouver de la difficulté à dormir, comparativement à moins de 3 hommes sur 10 (29 %) du même groupe d’âge.

Les hommes se sentent plus proches de leur partenaire, mais sont aussi moins susceptibles d’avoir quelqu’un sur qui compter en cas d’urgence

Malgré certaines différences qui existent entre les sexes en matière de sentiments et de réactions à l’égard de la pandémie de COVID-19, les femmes et les hommes déclarent en proportions égales qu’ils gèrent mieux (7 %), à peu près de la même façon (65 %) ou moins bien (25 % à 26 %) leur vie qu’avant la pandémie.

Il est toutefois intéressant de noter qu’une plus grande proportion d’hommes mariés ou vivant en union libre indiquent que la pandémie de COVID-19 les a rapprochés de leur conjoint(e) (49 %) et/ou a donné lieu à des conversations plus enrichissantes (52 %), comparativement aux femmes (41 % et 49 %).

Pour ce qui est d’avoir quelqu’un sur qui compter en cas d’urgence, près de 9 femmes et hommes sur 10 (85 % dans chacun des cas) disent avoir des personnes sur qui ils peuvent compter. Toutefois, 6 % des hommes, comparativement à 3 % des femmes, affirment n’avoir personne sur qui compter dans une période de crise.

Jennifer Kaddatz, Institut Vanier, en détachement de Statistique Canada

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Notes

1. Le sondage, mené du 10 au 13 mars, du 27 au 29 mars et du 3 au 5 avril 2020, comprenait environ 1 500 personnes de 18 ans et plus qui ont été interrogées à l’aide d’une technologie ITAO (interview téléphonique assistée par ordinateur) dans le cadre d’une enquête en ligne. Les échantillons du 27 au 29 mars et du 3 au 5 avril comprenaient également un échantillon de rappel d’environ 500 immigrants. À l’aide des données du Recensement de 2016, les résultats ont été pondérés en fonction du sexe, de l’âge, de la langue maternelle, de la région, du niveau de scolarité et de la présence d’enfants dans le ménage, afin d’assurer un échantillon représentatif de la population. Aucune marge d’erreur ne peut être associée à un échantillon non probabiliste (panel en ligne, dans le présent cas). Toutefois, à des fins comparatives, un échantillon probabiliste de 1 512 répondants aurait une marge d’erreur de ±2,52 %, et ce, 19 fois sur 20.

* Les données portant sur la menace relative à leur propre santé, sur la menace relative à la santé d’un membre de leur famille et sur le fait que le virus constitue une menace réelle ou démesurée excluent les femmes et les hommes ayant indiqué qu’eux-mêmes ou un membre de leur famille a déjà contracté le virus ou ayant répondu « Ne sais pas » à la question sur la menace concernée (ces personnes ont été incluses dans les données des autres questions du sondage faisant l’objet de ce rapport).

Faits et chiffres : La santé mentale maternelle au Canada

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La santé et le bien-être maternels constituent un important enjeu de santé publique, et la santé mentale y tient un rôle clé. Selon les données recueillies, la plupart des nouvelles mères et des femmes enceintes se disent en bonne santé mentale et très satisfaites de leur vie, mais les cas de dépression post-partum (DPP) et d’anxiété sont courants au Canada.

La recherche démontre que la DPP et une santé mentale déficiente nuisent au bien-être des mères et, en l’absence de traitement, peuvent compromettre le développement du nourrisson (ex. : engendrer un faible poids à la naissance, une naissance prématurée, un risque accru de problèmes de santé mentale plus tard dans la vie de l’enfant), en plus d’accabler le partenaire et les autres membres de la famille (y compris les pères, qui courent un risque accru de dépression ou d’anxiété).

Heureusement, de nombreuses options de traitement efficaces et bien documentées peuvent aider les femmes à se rétablir, et les études démontrent que le soutien social et émotionnel des partenaires et des autres membres de la famille tout au long de la période périnatale contribue à réduire la probabilité de DPP et de troubles émotionnels, tant pour les mères que pour les nouveau-nés.

Le présent numéro de la série Faits et chiffres se penche sur la santé mentale des nouvelles mères et des femmes enceintes au Canada, tout en mettant l’accent sur le bien-être de la famille.

Quelques faits saillants :

  • En 2018-2019, la plupart (60 %) des mères ayant récemment donné naissance à un enfant ont indiqué que leur santé mentale était excellente ou très bonne, alors que près du quart (23 %) ont déclaré éprouver des sentiments qui correspondant à la DPP ou à un trouble anxieux.
  • En 2018-2019, 30 % des mères de moins de 25 ans ayant récemment donné naissance à un enfant ont déclaré éprouver des sentiments qui correspondent à la DPP ou à un trouble anxieux, comparativement à 23 % chez les nouvelles mères de 25 ans ou plus.
  • En 2018-2019, près du tiers (32 %) des femmes récemment devenues mères ayant déclaré éprouver des sentiments qui correspondent à la DPP ou à un trouble anxieux disent avoir reçu un traitement à l’égard de leurs émotions ou de leur santé mentale depuis la naissance de leur enfant.
  • La santé mentale maternelle est influencée par le statut socioéconomique : la recherche démontre des taux plus élevés de DPP et de symptômes de dépression chez les mères issues de groupes marginalisés, y compris les personnes ayant des incapacités; les mères récemment immigrées, les demandeuses d’asile et les réfugiées; et les mères s’identifiant comme Noires ou membre des Premières Nations.
  • Les mères ayant vécu des expériences de vie difficiles courent également un risque accru de développer des troubles mentaux, comme celles qui vivent au sein d’un ménage en situation d’insécurité alimentaire ou en situation d’urgence ou conflictuelle, ainsi que celles ayant été victimes de violence (familiale, sexuelle et fondée sur le sexe) ou d’un désastre naturel.

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Ce document sera régulièrement mis à jour afin de tenir compte des nouvelles données et études (les versions antérieures demeureront néanmoins disponibles à partir de notre section réservée aux feuillets de renseignements).

Les sources d’information sont disponibles dans la version PDF de ce document.

Rapport : Symposium sur les femmes et le milieu de travail

En mai 2019, l’Institut Vanier a pris part à un symposium organisé par Emploi et Développement social Canada, qui a eu lieu à la Rotman School of Management de l’Université de Toronto. Cet événement de deux jours réunissait 240 dirigeants et champions canadiens de l’égalité entre les sexes et de la diversité en milieu de travail, qui ont échangé et discuté sur les meilleures pratiques à instaurer pour stimuler et faire progresser la participation des femmes en milieu de travail.

Un rapport fondé sur ces discussions inspirantes est maintenant disponible, et l’on y présente des stratégies et des ressources que les employeurs peuvent utiliser pour faire progresser la participation des femmes en milieu de travail, notamment trois éléments clés visant à favoriser l’égalité entre les sexes et la diversité en milieu de travail au Canada :

  • La sensibilisation accrue par rapport à l’égalité entre les sexes et la remise en question des mythes répandus;
  • Le changement des structures plutôt que des personnes;
  • L’adoption d’une approche intersectionnelle de l’égalité entre les sexes en milieu de travail.

Le rapport Les femmes et le milieu de travail – Comment les employeurs peuvent faire progresser l’égalité et la diversité – Rapport du Symposium sur les femmes et le milieu de travail est maintenant disponible sur le site Web d’EDSC (également disponible en format PDF).

 

Fête des Mères 2019 : Les nouvelles mamans sont plus âgées et plus susceptibles d’être en emploi qu’auparavant

Le 12 mai 2019, jour de la fête des Mères, est l’occasion de reconnaître et de célébrer les millions de femmes au Canada qui élèvent (seules ou de façon conjointe) les générations futures, souvent en assumant plusieurs rôles tant à la maison, que dans leur milieu de travail et au sein de leur communauté. Le rapport complexe entre les femmes, le travail et la famille à l’échelle du pays a connu une importante évolution au fil des générations, alors que les nouvelles mamans sont aujourd’hui plus âgées et plus susceptibles d’être en emploi que par le passé – des tendances qui se reflètent dans les données récemment publiées par Statistique Canada.

Ainsi, d’après de récentes données statistiques de l’état civil, les femmes, partout au pays, attendent de plus en plus longtemps avant d’avoir des enfants – en effet, les taux de fécondité des femmes en début de vingtaine et en fin de trentaine ont basculé au cours des 20 dernières années. Plusieurs d’entre elles se concentrent d’abord à terminer leurs études postsecondaires, puis à amorcer leur carrière – suivant ainsi une tendance à long terme observée au cours des dernières décennies.

  • En 2017, au Canada, le taux de fécondité des femmes de 20 à 24 ans s’élevaient à 36 naissances vivantes pour 1 000 femmes, comparativement à 58 pour 1 000 en 20001.
  • En 2017, au Canada, le taux de fécondité des femmes de 35 à 39 ans était de 56 naissances vivantes pour 1 000 femmes, soit près du double par rapport à l’an 2000 (34 pour 1 000)2.
  • En 2016, l’âge moyen des mères à la naissance du premier enfant était de 29,2 ans, comparativement à 27,1 ans en 20003.

La plupart de ces nouvelles mamans sont (et demeurent) sur le marché du travail au moment de la naissance ou de l’adoption de leur nouveau-né, et elles ont souvent recours au soutien communautaire pour arriver à concilier les responsabilités professionnelles et familiales.

  • En 2016, le taux d’emploi des mères dont le plus jeune enfant était âgé de 0 à 2 ans s’élevait à 71 %, comparativement à 66 % en 2001. Comme les années précédentes, c’est au Québec que ce taux était le plus élevé en 2016 (80 %)4.
  • En 2017, 79 % des nouvelles mères au pays avaient un emploi assurable, et 90 % d’entre elles bénéficiaient de prestations de maternité et/ou parentales5.
    • Comme les années précédentes, les nouvelles mères au Québec étaient plus susceptibles d’occuper un emploi assurable (97 %) et d’avoir reçu des prestations que leurs homologues ailleurs au Canada (91 %).
  • En 2016-2017, 85 % de toutes les demandes de prestations parentales avaient été faites par des femmes, comparativement à 89 % en 20026, 7.

Depuis décembre 2017, les nouveaux et les futurs parents bénéficient d’une plus grande flexibilité quant au moment et à la durée de la période de prestations.

  • Les nouveaux et les futurs parents sont maintenant en mesure d’opter pour des prestations parentales prolongées, qui leur permettent de recevoir leurs prestations parentales de l’AE sur une période pouvant s’étendre jusqu’à 18 mois, à hauteur de 33 % des gains hebdomadaires moyens. Comparativement aux prestations parentales standards, cette option prolonge la durée de la période de prestation, mais diminue le taux de prestation, qui s’élevaient initialement, respectivement, à 12 mois et à 55 % des gains hebdomadaires moyens8.
  • Les femmes enceintes peuvent dorénavant avoir accès à des prestations jusqu’à 12 semaines avant leur date prévue d’accouchement – soit quatre semaines plus tôt que la limite précédente de huit semaines (aucune semaine supplémentaire n’est disponible)9.
  • En 2017, parmi les nouvelles mères qui avaient travaillé en tant qu’employées au cours des deux années précédentes, plus de 1 sur 5 avaient pris ou prévoyaient prendre un congé de travail de plus de 12 mois (21 %)10.

 


Publié le 8 mai 2019

Notes

1 Statistique Canada, Taux brut de natalité, taux de fécondité par groupe d’âge et indice synthétique de fécondité (naissances vivantes), tableau 13-10-0418-01 (dernière mise à jour le 2 mai 2019). Lien : https://bit.ly/2vSef0p

2 Ibidem

3 Claudine Provencher et autres, « Fécondité : aperçu, 2012 à 2016 » dans Rapport sur l’état de la population du Canada, no 91-209-X au catalogue de Statistique Canada (5 juin 2018). Lien : https://bit.ly/2DzQdxz

4 Martha Friendly et autres, « Early Childhood Education and Care in Canada 2016 » dans Child Care Research and Research Unit (CRRU) (avril 2018). Lien : https://bit.ly/2TC1BwL

5 Statistique Canada, « Enquête sur la couverture de l’assurance-emploi, 2017 » dans Le Quotidien (15 novembre 2018). Lien : https://bit.ly/2vHyptB

6 Emploi et Développement social Canada, « La nouvelle prestation parentale partagée de l’assurance-emploi de cinq semaines sera offerte dans un mois » dans Communiqué de presse (18 février 2019). Lien : https://bit.ly/2ImMSEG

7 Commission de l’assurance-emploi du Canada, Employment Insurance 2002 Monitoring and Assessment Report (31 mars 2003). Lien : https://bit.ly/2VRq99k

8 Pour en apprendre davantage, consultez le document « Contenu du webinaire : changements aux prestations spéciales de l’AE » dans Transition (24 janvier 2018). Lien : https://bit.ly/2WvuoUS

9 Ibidem

10 Statistique Canada, « Enquête sur la couverture de l’assurance-emploi, 2017 ».

Les mères d’aujourd’hui au Canada : « Pour que tout fonctionne… »

La fête des Mères approche, et les Canadiens – petits ou grands – en profiteront pour souligner le dévouement de ces mères et grands-mères, sans oublier les arrière-grands-mères de plus en plus nombreuses. Aux quatre coins du pays, la présence des femmes au travail, dans les familles et dans les collectivités continue de s’accroître, notamment pour les futures et les nouvelles mères. Les décideurs cherchent à s’adapter et à réagir à cette évolution en proposant des solutions flexibles pour les mères en emploi.

Des milieux de travail flexibles pour aider les mamans à assumer leur charge de soins

Les futures et nouvelles mères au Canada sont de plus en plus présentes sur le marché du travail, et plusieurs d’entre elles fournissent aussi des soins à des proches malades ou blessés. Des études ont révélé que la flexibilité en milieu de travail aide les mamans à assumer leurs responsabilités multiples, ce qui rejaillit éventuellement sur le bien-être de la famille.

  • En 2016, le taux de participation des femmes au marché du travail, parmi celles dont le plus jeune enfant avait moins de 6 ans, se situait à 73 % (soit plus du double qu’en 1976, à 36 %)1.
  • En 2012, 72 % des femmes interrogées se disaient satisfaites de l’équilibre travail-vie personnelle, et la proportion était beaucoup plus marquée parmi celles qui travaillaient selon un horaire flexible (75 %) que chez celles qui n’avaient pas accès à cette flexibilité (63 %)2.
  • En 2012, les trois dixièmes des femmes avaient des responsabilités d’aidantes, et les six dixièmes d’entre elles consacraient 20 heures ou plus par semaine à fournir des soins3.
  • En 2012, 63 % des mères en emploi ayant aussi une charge de soins se disaient satisfaites de l’équilibre travail-vie personnelle (contre 73 % pour les pères)4.

De nouvelles façons d’accroître la flexibilité pour les futures et nouvelles mères en emploi

Le 3 décembre 2017, un certain nombre de changements ont été apportés au programme de prestations parentales et de maternité de l’assurance-emploi (AE) au Canadaafin d’offrir plus de flexibilité aux mères en emploi (ainsi qu’aux pères), en élargissant les options quant au moment et à la durée des périodes de prestations6.

  • Les parents peuvent désormais choisir l’option des prestations parentales prolongées de l’AE, échelonnées sur une période pouvant atteindre 18 mois, à hauteur de 33 % des gains hebdomadaires moyens. Cette option rallonge la durée des prestations en contrepartie d’une réduction du taux des prestations (comparativement à 55 % pour l’option standard de 12 mois)7.
  • Les futures mères ont maintenant la possibilité de présenter une demande de prestations jusqu’à 12 semaines avant la date prévue de l’accouchement (soit quatre semaines plus tôt que la limite précédente de huit semaines, mais le nombre total de semaines de prestations demeure le même).

 

Notes


  1. Institut canadien de la santé infantile, « Module 8, section 2 : Taux d’activité de la population active » dans The Health of Canada’s Children and Youth : A CICH Profile (2018). Lien : https://bit.ly/2xXBlTQ
  2. Statistique Canada, « Satisfaction par rapport à l’équilibre entre l’emploi et la vie à la maison : feuillet d’information » dans Mettre l’accent sur les Canadiens : résultats de l’Enquête sociale générale, no 89-652-X au catalogue de Statistique Canada (dernière mise à jour au 12 août 2016). Lien : a href= »https://bit.ly/1SDnt2Q » target= »_blank » rel= »noopener »>https://bit.ly/1SDnt2Q
  3. Maire Sinha, « Portrait des aidants familiaux, 2012 » dans Mettre l’accent sur les Canadiens : résultats de l’Enquête sociale générale, no 89-652-X au catalogue de Statistique Canada (dernière mise à jour au 30 novembre 2015). Lien : https://bit.ly/1qsM5zM
  4. D’après Statistique Canada, cette situation résulte notamment du fait que « les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes à prodiguer des soins à un membre de la famille ou à un ami souffrant d’un problème de santé à long terme; en outre, lorsqu’elles sont de proches aidantes, elles fournissent un plus grand nombre d’heures de soins en moyenne ». Lien : https://bit.ly/1SDnt2Q
  5. Ces changements ne s’appliquent pas au Québec, où c’est plutôt le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) qui est en vigueur depuis 2006.
  6. Les critères d’admissibilité ne changent pas : les travailleurs doivent avoir cumulé 600 heures d’emploi assurable au cours de l’année précédente pour avoir droit aux prestations, lesquelles correspondent généralement à 55 % des gains hebdomadaires moyens (jusqu’à concurrence du plafond déterminé). Depuis le 1er janvier 2018, le montant maximum assurable annuellement est de 51 700 $ (soit 547 $ par semaine). Lien : https://bit.ly/2r1ogp3
  7. Le montant total potentiel n’a pas changé : les prestataires peuvent échelonner les versements sur une période de 12 mois, ou répartir le même montant sur 18 mois. Au moment de présenter la demande initiale de prestations d’AE, les parents ont le choix entre l’option standard des prestations parentales ou encore l’option prolongée. Il n’est plus possible de changer d’option par la suite.

Coup d’œil sur les hommes, le travail et les relations familiales au Canada

Depuis un demi-siècle, la paternité a connu une évolution radicale, d’un océan à l’autre, suivant l’adaptation progressive des hommes en réaction au cadre socioéconomique, culturel et contextuel. Au cours de cette période, les hommes ont entretenu des rapports changeants avec le monde du travail en cherchant à assumer leurs rôles multiples à la maison et à l’extérieur. Leur réalité s’est modulée en fonction de nombreux facteurs, notamment les normes et les attentes culturelles, la situation familiale, l’incapacité, diverses tendances démographiques, sans oublier la participation accrue des femmes au marché du travail.

Dans bien des cas, les pères des générations précédentes se limitaient au rôle « traditionnel » de pourvoyeur. En contrepartie, les pères modernes sont plus enclins à assumer diverses responsabilités liées aux soins ou à la gestion des tâches ménagères. Ce faisant, les papas de toutes les régions du Canada contribuent à redéfinir et à remodeler les liens entre le travail et la paternité.

Quelques faits saillants…

  • La chasse gardée des hommes dans le rôle de pourvoyeur est moins généralisée qu’auparavant. En 2014, 79 % des familles à un seul soutien formées d’un couple avec enfants comptaient sur le père comme pourvoyeur, contre 96 % en 1976.
  • Les hommes représentent une portion croissante des travailleurs à temps partiel. En 2016, la gent masculine représentait le quart (25 %) des travailleurs canadiens à temps partiel de 25 à 54 ans, par rapport à 15 % en 1986.
  • La proportion des hommes n’ayant jamais été mariés est en hausse. En 2011, plus de la moitié des Canadiens de 30 à 34 ans (54 %) déclaraient ne s’être jamais mariés, contre seulement 15 % en 1981.
  • Au Canada, beaucoup d’hommes assument des responsabilités de soins. En 2012, les hommes représentaient près de la moitié (46 %) de tous les aidants au pays. Parmi ceux-ci, 11 % consacraient une vingtaine d’heures ou plus hebdomadairement à leur charge d’aidant.
  • Plusieurs hommes souhaiteraient être des pères au foyer. Près des quatre dixièmes des hommes interrogés (39 %) préféreraient rester à la maison pour y assumer leurs responsabilités parentales.
  • De nombreux hommes participent aux tâches domestiques et aux activités connexes. Parmi les répondants, près de la moitié des pères nord-américains (45 %) affirment être la « personne faisant le plus souvent l’épicerie » au sein du ménage.
  • Les modalités de travail flexibles contribuent à l’équilibre travail-vie personnelle. Plus des huit dixièmes (81 %) des pères qui travaillent à plein temps en fonction d’un horaire flexible se disent satisfaits de leur équilibre travail-vie personnelle, comparativement à 76 % chez ceux qui ne bénéficient pas d’un tel avantage.

 

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En contexte : comprendre les soins de maternité au Canada

S’il est vrai, comme le veut le dicton, qu’« il faut tout un village pour élever un enfant », il faut certainement toute une collectivité pour faciliter sa naissance. Tout au long de la période périnatale, plusieurs personnes prodiguent des soins aux femmes enceintes et aux nouvelles mères. Les réseaux et les relations sur lesquels s’appuient ces intervenants jouent un rôle majeur pour assurer la santé et le bien-être des nouvelles mères et de leurs nourrissons.

La naissance représente un jalon important et exaltant, qui voit la famille s’élargir et la venue d’une nouvelle génération. Il s’agit également d’une période cruciale pour le développement de l’enfant, très vulnérable à ce stade, mais également susceptible de bénéficier grandement d’un milieu sain.

La grossesse, la naissance, l’accouchement et les soins postnataux évoluent sans cesse au fil des générations. Compte tenu des avancées médicales et de l’amélioration globale des soins de maternité, de l’alimentation et du niveau de vie en général tout au long du XXe siècle, on a constaté des progrès considérables en ce qui concerne le taux de mortalité maternelle (décès d’une femme à la suite de complications de la grossesse ou de l’accouchement), le taux de morbidité maternelle (complications pour la mère en lien avec l’accouchement) et le taux de mortalité infantile.

Mortalité Maternelle et infantile au Canada 

En 1931, la mortalité maternelle représentait 508 décès pour chaque tranche de 100 000 naissances vivantes, mais on ne comptait plus que 7 décès par tranche de 100 000, en 2015.

De 1931 à 1935, le taux de mortalité infantile moyen atteignait 76 décès pour chaque tranche de 1 000 naissances vivantes, mais se limitait à 4,9 décès par tranche de 1 000, en 2013.

À partir du XIXe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle, l’accouchement se passait généralement à la maison et les soins de maternité au Canada étaient dispensés au sein de la collectivité. En règle générale, il incombait aux familles et aux sages-femmes de prendre soin des femmes enceintes et des nouvelles mères. Toutefois, avec l’instauration des régimes d’assurance-maladie au XXe siècle, les hôpitaux et les services médicaux ont graduellement pris le relais pour encadrer les naissances et les soins de maternité, principalement sous la supervision de professionnels de la santé comme les médecins et les obstétriciens. On a parfois parlé de « médicalisation de la naissance » pour évoquer cette tendance.

Par conséquent, au début des années 80, la vaste majorité des femmes accouchaient désormais dans les hôpitaux régionaux, sous la supervision d’un médecin de famille ou d’un obstétricien, avec l’aide d’infirmières en obstétrique. Du même coup, les conjoints et les autres membres de la famille se retrouvaient en marge du processus de l’accouchement, souvent confinés à des salles d’attente. Après la naissance, les mères aussi étaient séparées de leurs bébés gardés en pouponnière, ce qui s’avérait parfois traumatisant tant pour la mère que pour son nourrisson.

Puis les centres hospitaliers ont progressivement instauré des politiques de cohabitation pour la mère et son bébé en vue de faciliter l’allaitement et de favoriser les liens d’attachement mère-enfant, au bénéfice de la santé et du bien-être de chacun. Dans le cadre de cette cohabitation, les infirmières ont commencé à transmettre de l’information aux nouvelles mères relativement à leur rétablissement, en leur donnant notamment divers conseils sur l’allaitement et les soins postnataux. Au fil de ces changements subséquents dans les pratiques de soins postnataux, on a réussi à raccourcir considérablement la durée d’hospitalisation des femmes suivant l’accouchement, qui est passée de cinq journées d’hospitalisation en moyenne en 1984-1985 dans le cas d’un accouchement vaginal, à une ou deux journées actuellement.

De nos jours, les conjoints sont beaucoup plus impliqués qu’autrefois dans l’accouchement et le processus périnatal. La plupart assistent à l’accouchement et assument ensuite un rôle accru dès les premières heures de vie de leur enfant de même qu’au cours des années suivantes. Il n’est pas rare d’entendre les couples modernes parler de l’accouchement comme d’une expérience conjointe, et cette tendance se reflète d’ailleurs dans les propos de plusieurs (« Nous attendons un enfant… », etc.).

Qu’est-ce que les soins de maternité?

Les soins périnataux ou de maternité (on emploiera ici soins de maternité) sont des termes génériques pour désigner le continuum de soins auprès de la mère et de son bébé, et ce, avant, pendant et après la naissance. On parle plus précisément des soins prénataux ou anténataux (c.-à-d. les soins durant la grossesse), des soins pernataux (soit durant le travail et l’accouchement) ainsi que des soins postnataux ou post-partum (c.-à-d. les soins à la mère et au nouveau-né après la naissance). Puisque la mère et l’enfant vivent tous deux d’importants changements au cours de la période périnatale, les soins de maternité supposent un large éventail de mesures de suivi et de soins de santé.

Les soins prénataux ou anténataux (on emploiera ici les soins prénataux) visent à surveiller et à favoriser la santé et le bien-être de la mère et de son fœtus en développement avant la naissance. Diverses techniques de surveillance et de diagnostic sont mises à contribution pour assurer la santé fœtale, notamment au moyen d’échographies et de prélèvements sanguins. Pendant cette période, la santé de la mère est aussi suivie de près par les professionnels de la santé. Les femmes enceintes reçoivent de l’information sur la grossesse, le développement du fœtus, le confort physique, les différents tests, la planification en vue de l’accouchement, ainsi que sur la préparation au rôle de parent.

La plupart des femmes (87 %) disent avoir reçu le soutien de leur partenaire, de leur famille ou de leurs amis durant la période prénatale.

Selon l’Enquête canadienne sur l’expérience de la maternité de 2009, la plupart des femmes (87 %) disent avoir reçu le soutien de leur partenaire, de leur famille ou de leurs amis durant la période prénatale. Au cours de cette période, ce soutien ainsi que les soins des praticiens de la santé s’avèrent particulièrement importants puisque plusieurs femmes (57 %) affirment que la plupart des journées sont stressantes. Durant la grossesse, le stress chez la mère peut affecter le bien-être du bébé, et parfois causer une naissance prématurée ou un faible poids à la naissance.

Selon la vaste majorité des femmes enceintes interrogées (95 %), les soins prénataux débutent généralement au cours du premier trimestre de grossesse. Parmi certains groupes toutefois, ces soins commencent parfois plus tard qu’au premier trimestre, notamment pour la tranche des 15 à 19 ans, pour les femmes moins scolarisées ou pour celles vivant au sein d’un ménage à faible revenu. À cet égard, l’une des principales raisons évoquées pour expliquer les soins tardifs en cours de grossesse concernait les difficultés d’accès à un médecin ou à professionnel de la santé.

Les soins pernataux ou intrapartum (on emploiera ici les soins pernataux) désignent les soins et l’assistance auprès des mères durant le travail et l’accouchement, notamment pour que la naissance se déroule dans un cadre sécuritaire et hygiénique, et pour surveiller la santé de la mère et de l’enfant tout au long du processus. La plupart du temps, ces soins sont prodigués en milieu hospitalier, où les mères bénéficient des services de divers professionnels de la santé, notamment des obstétriciens et des gynécologues (principaux fournisseurs de soins de santé durant l’accouchement, selon 70 % des mères interrogées), des médecins de famille (15 %), des infirmières ou des infirmières praticiennes (5 %) ou encore des sages-femmes (4 %).

L’importance du soutien affectif n’est pas négligeable durant cette période, qu’il provienne d’un conjoint ou partenaire, d’un ami, d’un membre de la famille, d’une sage-femme ou d’une accompagnante à la naissance (ou d’une combinaison de ces intervenants). Les études ont montré que les femmes qui bénéficient d’un soutien social constant seraient plus susceptibles d’accoucher rapidement (quelques heures de moins) et par voie vaginale, de considérer l’accouchement et la naissance comme un épisode heureux, et d’avoir moins recours à divers analgésiques.

Les études ont montré que les femmes qui bénéficient d’un soutien social constant seraient plus susceptibles d’accoucher rapidement et par voie vaginale, et de considérer l’accouchement et la naissance comme un épisode heureux.

Les soins postnataux ou post-partum (on emploiera ici les soins postnataux) visent à soutenir la mère et le nouveau-né après la naissance, ce qui suppose le suivi de leur état de santé ainsi que diverses évaluations de routine en vue de cibler tout écart par rapport à la courbe normale de rétablissement après l’accouchement, pour pouvoir intervenir au besoin.

La période postnatale couvre les six premières semaines de vie de l’enfant, soit une « phase critique » au cours de laquelle les professionnels de la santé fournissent divers soins et procèdent à plusieurs examens importants pour assurer le bien-être de la mère et de l’enfant, comme le confirme l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

Dans ses lignes directrices de 2013 concernant les soins postnataux, l’OMS cible les pratiques exemplaires à privilégier, entre autres en ce qui concerne les soins postnataux auprès des mères et des bébés durant les 24 premières heures (peu importe où l’accouchement a eu lieu), l’importance de garder la mère et l’enfant au moins 24 heures dans un établissement de santé sans précipiter le congé, et la nécessité de prévoir au moins quatre suivis postnataux durant les six semaines suivant l’accouchement.

D’après l’Enquête canadienne sur l’expérience de la maternité, plus des sept dixièmes des femmes (73 %) considéraient que leur santé était « excellente » ou « très bonne » après un délai de cinq à quatorze mois suivant l’accouchement. Cependant, plus des quatre dixièmes des Canadiennes (43 %) affirmaient avoir connu au moins « un gros problème » de santé post-partum au cours des trois premiers mois suivant l’accouchement, notamment des douleurs aux seins (16 % des femmes), des douleurs dans la région vaginale ou de l’incision de la césarienne (15 %), ou encore des maux de dos (12 %).

Le soutien postnatal peut aussi s’avérer important pour contrer la dépression post-partum, qui toucherait 10 à 15 % des mères dans les pays développés. Des études ont révélé que la dépression post-partum dépend de certains facteurs déterminants, notamment le stress vécu par la mère durant la grossesse, l’accessibilité à des mesures de soutien social, ainsi que les antécédents personnels de dépression. Selon les données de recherche, le soutien affectif du partenaire et des autres membres de la famille tout au long de la période périnatale contribuerait à réduire les risques de dépression post-partum et de troubles émotionnels chez la mère tout comme chez le nouveau-né.

Du reste, les services offerts en soins postnataux varient d’une région ou d’une collectivité à l’autre au Canada, qu’il s’agisse de soutien informationnel, de visites à domicile par une infirmière en santé publique ou un éducateur non-spécialiste de la santé, ou encore du soutien téléphonique d’une sage-femme ou d’une infirmière en santé publique.

Depuis quelques décennies, le secteur privé offre une panoplie grandissante de services postnataux, notamment des services intensifs d’accompagnantes post-partum pour s’occuper des nouveau-nés, de l’aide à l’allaitement naturel ou au biberon, ou encore des services de garde d’enfants, de préparation des repas ou d’aide aux tâches ménagères, etc. Toutefois, ces services privés ont un coût et, par conséquent, ne sont pas accessibles à toutes les familles.

D’où proviennent les soins de maternité?

Outre les soins et le soutien des proches et des amis, la réalité moderne des soins de maternité dépend aussi de nombreux professionnels de la santé qui contribuent chacun à leur façon au continuum de soins, notamment les médecins de famille, les obstétriciens ou gynécologues, les infirmières, les infirmières praticiennes, les sages-femmes de même que les accompagnantes à la naissance.

D’abord, les médecins de famille fournissent des soins à la plupart des nouvelles mères tout au long de la période périnatale. Ils sont susceptibles d’intervenir à tous les stades des soins de maternité ou des soins aux nourrissons, mais tous n’offrent pas nécessairement la gamme complète des soins. Par rapport aux décennies antérieures, on constate cependant un recul du nombre de médecins prodiguant des soins de maternité au Canada. En effet, la proportion des médecins de famille qui procèdent à des accouchements a fléchi au pays de 1997 à 2010, passant de 20 % à 10,5 %. De nos jours, une proportion croissante des tâches et des responsabilités de soins reviennent à d’autres professionnels de la santé, comme les obstétriciens ou les sages-femmes.

La plupart des médecins de famille qui participent aux soins de maternité ou aux nourrissons le font dans une approche de « soins partagés », c’est-à-dire que leur suivi ne dépasse pas un certain stade de la grossesse (souvent entre 24 et 32 semaines), après quoi les soins sont confiés à un autre fournisseur comme un obstétricien, une sage-femme ou un autre médecin de famille accoucheur. De fait, certains médecins de famille participent à l’accouchement, mais leur nombre varie considérablement d’une province à l’autre ou en fonction de la disponibilité d’autres fournisseurs de soins de santé.

Au Canada, les obstétriciens et gynécologues assument une part grandissante des soins pernataux, mais ce n’est pas le cas de tous ces spécialistes, et les proportions à cet égard varient d’une province à l’autre. Puisqu’ils possèdent une expertise et des connaissances spécialisées au sujet de la grossesse, de l’accouchement, de la santé sexuelle féminine et des soins génésiques (y compris une formation en chirurgie pour effectuer notamment des césariennes), plusieurs agissent également comme experts-conseils auprès des autres médecins, ou encore supervisent les grossesses à haut risque.

Les infirmières et infirmiers représentent le groupe le plus important en nombre parmi les fournisseurs de soins de maternité au Canada. Appelés à jouer un rôle actif tout au long de la période périnatale, ces intervenants prodiguent un éventail de soins, ce qui se traduit notamment par de l’éducation au sujet de l’accouchement, ainsi que par des services prénataux à domicile auprès des femmes ayant une grossesse à haut risque, de l’assistance durant l’accouchement, et parfois aussi des soins de suivi auprès des nouvelles mères. Après la naissance, les infirmières et infirmiers sont souvent appelés à transmettre de l’information aux nouvelles mères tout en les préparant en vue de leur congé, y compris en ce qui concerne l’allaitement, les soins du bain, les symptômes de la jaunisse, la sécurité pendant le sommeil, la santé mentale post-partum, l’alimentation, etc.

Quant aux infirmières praticiennes, ce sont des infirmières agréées assumant une gamme élargie de responsabilités en soins de santé. Dans bien des cas, elles fournissent des soins de première ligne en suivi de grossesse à faible risque, et interviennent à plusieurs niveaux (examens physiques, tests de dépistage ou de diagnostic, soins postnataux, etc.). Lorsqu’elles sont appelées à assumer ou à faciliter des soins de maternité, les infirmières praticiennes travaillent souvent au sein d’équipes multidisciplinaires en collaboration avec d’autres professionnels de la santé, dont les médecins et les sages-femmes. En milieu hospitalier, on les retrouve également en salle d’obstétrique et d’accouchement, dans les unités de soins post-partum, dans les unités néonatales de soins intensifs ainsi que dans les services de consultation externes. Compte tenu de leur expertise et de leur formation élargie, les infirmières praticiennes jouent un rôle important dans les collectivités rurales ou éloignées, où elles fournissent dans bien des cas la gamme complète des services de soins de santé.

Compte tenu de leur expertise élargie et de leur formation, les infirmières praticiennes jouent un rôle important dans les collectivités rurales ou éloignées, où elles fournissent dans bien des cas l’éventail complet des services de soins de santé.

Les sages-femmes, quant à elles, prodiguent des soins de santé primaires auprès des femmes enceintes et des nouvelles mères, et ce, durant toute la période périnatale. Assumant un rôle de plus en plus important dans le paysage moderne des soins de maternité au Canada, les sages-femmes procurent toute une gamme de services, comme demander des tests de dépistage et en assurer le suivi, accompagner les femmes qui accouchent à domicile ou dans les centres de naissances, superviser l’admission des mères qui doivent accoucher à l’hôpital, ou encore épauler les nouvelles mères pour faciliter l’allaitement, leurs premiers pas comme parents ou leur rétablissement post-partum. Selon les cas, les sages-femmes travaillent en consultation ou en collaboration avec d’autres professionnels de la santé.

Leur rôle a largement évolué au cours des dernières décennies, si bien qu’un nombre grandissant de sages-femmes sont désormais mises à contribution dans divers milieux, que ce soit à domicile, dans les collectivités, dans les hôpitaux, dans les centres médicaux ou dans les unités de soins. La formation et la spécialisation des sages-femmes sont de plus en plus encadrées, puisque ces dernières sont désormais reconnues et intégrées dans les réseaux de soins de santé de la plupart des provinces et territoires au pays (mais pas tous).

Parallèlement, les accompagnantes à la naissance (doulas) fournissent du soutien non clinique et non médical auprès des nouvelles mères et de leur famille, de concert avec les praticiens de la santé comme les médecins, les sages-femmes et les infirmières. Le rôle des accompagnantes à la naissance n’est pas réglementé, et vise surtout à offrir un soutien affectif et informationnel. Celles-ci ne prodiguent pas de soins directs et ne prennent pas en charge les accouchements.

Il existe différents types d’accompagnantes à la naissance, selon les stades de la grossesse. D’abord, les accompagnantes antepartum offrent du soutien affectif, physique et informationnel au cours de la période prénatale, qu’il s’agisse de renseigner les futures mères et leur famille au sujet des groupes de soutien existants ou des techniques pour favoriser le confort physique, ou encore de les aider dans certaines tâches comme les courses ou la préparation des repas. Ensuite, les accompagnantes à la naissance se chargent d’épauler les nouvelles mères et leur partenaire durant le travail et l’accouchement, en leur fournissant notamment du soutien affectif et informationnel tout en favorisant leur confort sur le plan physique. Enfin, les accompagnantes post-partum soutiennent les nouvelles mères après la naissance du bébé, en leur fournissant de l’information au sujet de l’allaitement et des moyens d’apaiser le nourrisson, tout en se chargeant parfois de quelques tâches ménagères et de la garde des enfants.

Finalement, les spécialistes en périnatologie s’occupent des soins liés aux grossesses à haut risque (ex. : maladie chronique de santé maternelle, naissances multiples, diagnostics génétiques). Ces intervenants ont une formation d’obstétricien ou de gynécologue, doublée d’une spécialisation axée sur les grossesses à risque. Au besoin, les obstétriciens et gynécologues dirigent donc leurs patients vers ces spécialistes en périnatalogie, et travaillent de concert avec eux pour assurer le suivi de la santé maternelle.

Une réalité particulière : l’accouchement en régions rurales ou éloignées au Canada

Les soins de maternité posent des défis uniques en régions rurales ou éloignées (y compris dans les régions nordiques du Canada), et ce, parce que les installations médicales et les équipements spécialisés sont parfois éloignés sur le plan géographique, parce que les fournisseurs de soins ne bénéficient pas d’autant de soutien de leurs pairs, et parce qu’il y a moins de médecins disponibles sur appel pour réaliser des césariennes et des anesthésies (et aussi moins d’installations et de services que dans les centres urbains à cet effet).

En milieu rural, les soins de maternité sont généralement pris en charge par des équipes formées de médecins de famille, d’infirmières et de sages-femmes. Dans certaines collectivités, il s’agit d’ailleurs des seuls professionnels de la santé offrant des soins de maternité. De fait, les médecins de famille en milieu rural sont beaucoup plus susceptibles de devoir assurer des soins obstétricaux que leurs homologues des centres urbains. Depuis quelques décennies cependant, plusieurs collectivités rurales sont confrontées à la fermeture des maternités et à une baisse du nombre de médecins de famille offrant des soins de maternité.

Compte tenu du nombre limité de services et de fournisseurs de soins de maternité dans les régions rurales et éloignées, plusieurs femmes enceintes doivent donc se tourner vers les centres urbains pour accoucher. Selon un rapport publié en 2013 par l’Institut canadien d’information sur la santé, plus des deux tiers (67 %) des femmes des milieux ruraux au Canada disent avoir accouché dans un hôpital urbain, et 17 % d’entre elles ont dû faire plus de deux heures de route pour donner naissance à leur enfant. La proportion est encore plus élevée dans les régions nordiques, alors que les deux tiers des mères interrogées au Nunavut et la moitié de celles interrogées aux Territoires du Nord-Ouest disent avoir accouché hors de leur collectivité.

Les deux tiers des mères interrogées au Nunavut et la moitié de celles interrogées aux Territoires du Nord-Ouest disent avoir accouché hors de leur collectivité.

Or, cette réalité affecte le bien-être de plusieurs femmes autochtones des régions nordiques, dont plusieurs doivent même prendre l’avion pour se rendre dans un centre hospitalier afin d’y recevoir des soins de maternité secondaires ou tertiaires loin de leur foyer, de leur territoire, de leur collectivité et de leur environnement linguistique. (Voir l’encadré Les sages-femmes autochtones au Canada.) La plupart des mères interrogées admettent qu’avoir dû s’éloigner de leur foyer pour accoucher s’était avéré stressant et avait eu des répercussions sur leur famille. En avril 2016, le gouvernement fédéral a annoncé des compensations financières pour que les mères autochtones puissent être accompagnées d’un proche lorsque l’accouchement doit se produire loin de la collectivité.

Dans les régions nordiques, le nombre d’hôpitaux communautaires offrant des soins obstétricaux a chuté depuis les années 80. Toutefois, plusieurs centres de naissances ont ouvert leurs portes pour combler le déficit, comme à Puvirnituq (Nunavik), à Rankin Inlet (Nunavut) et à Inukjuak (Québec). Ces installations permettent aux femmes ayant une grossesse à faible risque d’accoucher dans leur propre collectivité. Toutefois, les mères nécessitant une césarienne ou présentant des risques de complications doivent quand même se déplacer pour donner naissance à leur enfant.

Une réalité particulière : les femmes enceintes et les nouvelles mères arrivées depuis peu au Canada

Le Canada accueille plusieurs familles d’immigrants, qui représentent une proportion grandissante de la population. En 1961, 16 % des habitants du Canada disaient être nés à l’étranger, et cette proportion atteignait 21 % en 2011.

L’immigration influence la maternité, notamment en ce qui a trait au moment choisi pour avoir un enfant. Les études montrent que les naissances sont généralement peu nombreuses chez les immigrants au cours des deux années avant leur arrivée, mais la fécondité « rebondit » ensuite la plupart du temps. Selon les chercheurs Goldstein et Goldstein, « les choix des arrivants en matière de fécondité répondent plus souvent aux tendances du pays d’accueil qu’aux préférences qui prévalaient dans leur pays d’origine avant leur départ » [traduction].

Des études ont exploré un certain nombre de raisons pour lesquelles la fécondité peut être affectée par l’expérience de l’immigration, notamment la séparation temporaire du conjoint pendant le processus de migration, le choix volontaire de repousser une grossesse jusqu’à l’admissibilité aux diverses mesures de soutien (ex. : allocations pour enfants), ainsi que les perturbations financières pendant la migration et au début de l’installation (jusqu’à ce que les parents trouvent un emploi rémunéré).

Par ailleurs, les immigrants récents sont beaucoup plus susceptibles que les Canadiens nés au pays de se retrouver dans un ménage multigénérationnel (abritant au moins trois générations). En 2011, 21 % des immigrants de 45 ans ou plus (arrivés au Canada entre 2006 et 2011) déclaraient vivre une telle cohabitation, contre seulement 3 % des Canadiens nés au pays. Par conséquent, les femmes enceintes et les nouvelles mères vivant au sein d’un ménage multigénérationnel bénéficient éventuellement de la présence de proches capables d’offrir des soins et du soutien.

En ce qui concerne l’accès aux soins de maternité, les études ont montré que, même si plusieurs immigrantes ont généralement accès aux soins de maternité dont elles ont besoin, leur taux de satisfaction à cet égard semble varier considérablement selon les régions du pays. En effet, plusieurs affirment avoir rencontré des obstacles liés à l’accès ou à l’utilisation des services de soins de maternité, notamment parce qu’elles n’avaient pas été suffisamment informées des services (parfois à cause de la barrière linguistique), parce qu’elles ne disposaient pas de soutien suffisant pour accéder aux services (c.-à-d. naviguer à l’intérieur du système de soins de santé), ou à cause d’une disparité entre les attentes des femmes immigrantes et celles des fournisseurs de services. Dans certaines régions, les femmes immigrantes bénéficient d’un précieux soutien affectif, informationnel et logistique de la part des accompagnantes à la naissance (doulas) durant la période périnatale.

Selon les parents immigrants, le soutien social (famille, amis et membres de la collectivité) représente un facteur crucial pour favoriser l’accès aux soins de maternité. En effet, ce cercle de soutien peut jouer un rôle important pour jeter des ponts entre les nouvelles ou futures mères provenant de l’extérieur du Canada et le réseau de soins de maternité. Parfois, ces personnes peuvent intervenir auprès des fournisseurs de services et de soins de santé pour s’assurer que les mères bénéficient de soins de maternité « conformes à leur culture et respectueux de leur réalité culturelle » [traduction].

Les soins de maternité : en appui aux familles en pleine croissance au Canada

La grossesse et l’accouchement sont des moments charnières de la vie, non seulement pour les nouvelles mères, mais aussi pour leur famille, leurs amis et leur collectivité. La réalité familiale a beaucoup changé depuis quelques générations en ce qui a trait à la grossesse, à l’accouchement et à la période postnatale, mais certaines constantes demeurent : la valeur et l’importance des soins de qualité, la diversité des expériences vécues dans les différentes régions du Canada, sans compter la joie et l’excitation qui caractérisent ce jalon mémorable et significatif de l’existence.


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Le contenu de cet article a été révisé par Marilyn Trenholme Counsell, OC, MA, MD, médecin de famille à la retraite, ancienne lieutenante-gouverneure (Nouveau-Brunswick), ex-ministre de la Famille (N.-B.) et sénatrice (N.-B.).

Vous trouverez toutes les références et les sources d’information dans la version PDF de cet article.

Publié le 11 mai 2017

Coup d’œil sur les femmes, le travail et la famille au Canada

Le Canada compte plus de 18 millions de femmes (9,8 millions d’entre elles étant des mères), dont plusieurs assument de multiples responsabilités à la maison, au travail et au sein de leur collectivité. Depuis plusieurs générations, les femmes au Canada entretiennent des rapports changeants avec le monde du travail, et cette situation évolue et se renouvelle encore et toujours. La réalité des femmes est très différente de celle des hommes à cet égard et se caractérise par une grande diversité parmi les femmes elles-mêmes, où entrent en ligne de compte de nombreux facteurs en lien notamment avec les normes et les attentes culturelles, le statut familial, l’incapacité et certaines caractéristiques démographiques.

Afin de mieux comprendre les réalités multiples et évolutives des femmes au Canada par rapport au travail et à la famille, l’Institut Vanier de la famille a publié Coup d’œil sur les femmes, le travail et la famille au Canada. Ce document sert de complément à notre ligne du temps intitulée Cinquante ans : les femmes, le travail et la famille au Canada, qui illustre visuellement les expériences diversifiées des femmes au Canada en lien avec le travail et la famille.

Quelques faits saillants…

  • Parmi les femmes du principal groupe d’âge actif (25 à 54 ans), la proportion des femmes sur le marché du travail a connu une hausse considérable au fil des générations, passant de 35 % en 1964 à 82 % en 2016.
  • Le taux d’emploi varie en fonction des différentes catégories parmi les femmes du principal groupe d’âge actif, notamment chez les immigrantes récentes (53 %), les femmes se réclamant d’identité autochtone (67 %) et les femmes ayant une incapacité (de 52 à 56 % selon les sous-groupes d’âge).
  • En moyenne, les gains horaires moyens des femmes sans enfants sont 12 % plus élevés que celles avec enfants. On parle parfois de « taxe à la maternité » pour évoquer cet écart salarial.
  • En 2016, près du tiers (32 %) des travailleuses à temps partiel de 25 à 44 ans disaient travailler à temps partiel pour pouvoir prendre soin des enfants.
  • 70 % des mères ayant un enfant de 5 ans ou moins occupaient un emploi en 2015, contre seulement 32 % en 1976.
  • Au Québec, à peine 11 % de toutes les nouvelles mères n’ont pas bénéficié de prestations de congé parental ou de maternité en 2013, comparativement à 36 % dans le reste du Canada. Cet écart s’explique par les différents critères d’admissibilité à l’assurance-emploi d’une province à l’autre.
  • Au Canada, 72 % de toutes les mères interrogées se disent satisfaites de leur équilibre travail-vie personnelle, mais cette proportion recule à 63 % chez les mères qui assument aussi une charge d’aidante familiale.
  • 75 % des mères en emploi ayant accès à des modalités de travail flexibles se disent satisfaites de leur équilibre travail-vie personnelle, contre seulement 69 % chez celles qui n’y ont pas accès.

Cette publication bilingue sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre d’information électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Téléchargez le document Coup d’œil sur les femmes, le travail et la famille au Canada publié par l’Institut Vanier de la famille.

 


Publié le 9 mai 2017

Fiche infographique – Les femmes, les soins et le travail au Canada

Les soins sont une réalité qui touche le quotidien de nombreuses familles au Canada. La plupart des personnes faisant partie d’une famille ont déjà eu – ou auront – à fournir des soins à un ami ou à un proche touché par une maladie chronique, une incapacité ou un problème lié au vieillissement. Cependant, il n’existe pas d’uniformité quant à la réalité et au vécu des aidants canadiens, compte tenu des facteurs socioéconomiques, culturels et contextuels qui déterminent qui sera appelé à prodiguer des soins, quels types de soins seront requis, et quelles seront les répercussions de la coexistence des soins et du travail.

Depuis une génération, l’écart s’est resserré entre les hommes et les femmes du point de vue des aidants familiaux, mais il n’en demeure pas moins que la représentation féminine a toujours été prépondérante, ce qui s’avère encore aujourd’hui. Par ailleurs, des études ont montré que les femmes consacrent en moyenne plus de temps que les hommes aux responsabilités de soins, et qu’elles sont plus susceptibles de subir des répercussions négatives découlant de leur charge de soins.

Notre nouvelle fiche infographique sur Les femmes, les soins et le travail au Canada illustre les liens entre les soins et le travail du point de vue des femmes au Canada.

Quelques faits saillants :

  • Parmi les Canadiennes en général, 30 % des femmes affirment avoir prodigué des soins en 2012.
  • Les femmes de 45 ans ou plus estiment avoir consacré environ 5,8 années aux responsabilités de soins durant leur vie, par rapport à 3,4 années pour les hommes.
  • Les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à déclarer consacrer 20 heures ou plus par semaine à la prestation de soins (17 % et 11 %, respectivement).
  • Au Canada, environ 72 % des aidantes âgées de 45 à 65 ans occupent aussi un emploi.
  • Les femmes vivent diverses répercussions sur le plan professionnel en lien avec leur charge de soins : 30 % d’entre elles disent avoir perdu au moins une journée complète de travail, 6,4 % affirment avoir soit démissionné, soit perdu leur emploi, soit devancé leur retraite, et 4,7 % admettent avoir refusé une offre d’emploi ou une promotion.
  • Selon les estimations, les pertes salariales cumulatives des aidants se chiffraient globalement à 221 millions de dollars annuellement chez les femmes (de 2003 à 2008) à cause de l’absentéisme, de la réduction des heures de travail ou de la cessation d’emploi.
  • Parmi les femmes qui bénéficient de modalités de travail flexibles, près de la moitié (47 %) craignent d’utiliser ces options qui, selon elles, pourraient avoir des incidences néfastes sur leur cheminement professionnel.

 

Téléchargez la fiche infographique de l’Institut Vanier de la famille portant sur Les femmes, les soins et le travail au Canada.

Favoriser la santé des mères et de leur bébé en milieu carcéral

Ruth Elwood Martin, Ph. D., et Brenda Tole

Lorsqu’une amie lui a parlé d’un poste à temps partiel comme médecin de famille dans un centre correctionnel pour femmes, Ruth Elwood Martin était catégorique : travailler dans une clinique carcérale ne l’intéressait pas du tout. À ses yeux, c’était tomber au plus bas dans la profession médicale, convaincue qu’il s’agissait d’un emploi de dernier recours pour des médecins sans travail.

Elle ne sait toujours pas ce qui l’a poussée à pratiquer en milieu carcéral, mais c’est bel et bien ce qui est arrivé. À sa première journée de travail en 1994, elle se serait crue sur une autre planète, découvrant derrière les barreaux un monde tout à fait inconnu qui se dévoilait de l’intérieur, par ceux et celles qui y vivaient. En une seule journée, Ruth y a vu plus de pathologies et de diagnostics lourds qu’en une année complète dans sa pratique en médecine familiale du quartier West Side à Vancouver.

Les femmes qu’elle y a rencontrées lui ont raconté les drames de leur enfance, de leur adolescence ou de l’âge adulte. Déposant son stylo, Ruth ne pouvait qu’écouter ces histoires troublantes, tant du point de vue médical que social, témoin d’une réalité qu’elle n’aurait pas eu la force d’affronter elle-même. Cette première journée dans ses nouvelles fonctions a bouleversé sa vie : elle avait compris que sa vocation était d’exercer la médecine en milieu carcéral. Ruth s’est souvent dit que si le hasard lui avait rendu l’enfance aussi difficile qu’à ces femmes, elle aurait probablement fini exactement comme elles.

En 2003, Brenda Tole s’est vue confier le réaménagement d’un ancien centre provincial de détention pour hommes. Son mandat consistait à rouvrir un nouvel établissement à sécurité moyenne, le « Centre correctionnel pour femmes Alouette » destiné aux détenues purgeant une peine provinciale. Dans un centre de détention, le directeur de prison exerce un peu le même type d’influence qu’un directeur d’école, comme le savent pertinemment les parents d’enfants d’âge scolaire. Et le climat qui prévaut se reflète sur l’état de santé général des détenus.

Dès l’ouverture du Centre Alouette en 2004, Brenda a su donner le ton et inculquer son style au sein de l’établissement. Selon elle, il suffisait de poser la notion de respect mutuel entre le personnel et les détenues pour obtenir des résultats généralement très satisfaisants. C’est dans cette optique qu’elle a planifié et orchestré les opérations, plutôt qu’en présumant qu’un pour cent de la population carcérale était susceptible de saborder les attentes.

Brenda avait compris une chose : plus on fait confiance aux gens, plus ils le reconnaîtront et réagiront positivement. Autrement dit, accorder davantage de responsabilités aux détenues et favoriser l’engagement du personnel dans les différents projets ne pouvait qu’être bénéfique à tous.

C’est lors d’une réunion d’intervenants de la santé en vue de planifier les services de soins au Centre Alouette que Brenda a fait la rencontre de Sarah Payne, directrice des services de maternité du centre Fir Square rattaché au BC Women’s Hospital, un centre d’aide aux mères toxicomanes. Là-bas, on avait constaté les bénéfices sur la santé des bébés qui cohabitaient avec leur mère en établissement, comparativement à ceux qui en étaient séparés à la naissance1. Sarah en a profité pour évoquer auprès de Brenda la possibilité d’en faire autant au Centre Alouette, c’est-à-dire de permettre aux détenues de cohabiter avec leur nouveau-né après leur accouchement au BC Women’s Hospital, afin de favoriser l’allaitement, les soins et les rapprochements affectifs.

L’incarcération : une séparation néfaste pour la santé des nouvelles mères et de leur bébé

La proposition n’a pas paru invraisemblable à Brenda, puisque le sujet suscitait déjà un intérêt croissant dans la littérature spécialisée validée par des pairs. En effet, les études montrent que vivre une grossesse ou avoir un enfant figurent parmi les plus importants facteurs de motivation pour les détenues. À l’échelle internationale, on a constaté que les pratiques en milieu correctionnel qui favorisent les contacts entre les femmes et leur enfant entraînent des retombées positives pour les unes et les autres (évaluées notamment à partir des visites, des courriels, des enregistrements, des conversations téléphoniques et des lettres). Les enfants de mères en détention subissent effectivement des effets néfastes imputables à l’absence de leur mère ou au fait de n’avoir que très peu de contacts avec elle. Néanmoins, la cohabitation entre la mère et son enfant en milieu carcéral demeurait encore rare à l’époque au Canada, même si les bénéfices en étaient largement reconnus ailleurs dans le monde.

Les détenues ayant des enfants à charge ne sont pas des cas isolés. À l’échelle internationale, on estime que 6 % de toutes les femmes incarcérées vivent une grossesse durant leur séjour en prison2. Environ 20 000 enfants seraient touchés annuellement par l’incarcération des mères au Canada3, où le nombre restreint de centres correctionnels accroît l’éloignement géographique entre les mères et leur enfant ainsi que leur famille.

Dans la plupart des pays du monde, il est de pratique courante de transférer les détenues qui accouchent pendant leur détention vers une unité mère-enfant en milieu carcéral. D’après les rapports publiés à cet égard, de tels services existent dans 22 pays, notamment en Angleterre, au pays de Galles, en Australie, au Brésil, au Danemark, en Finlande, en Allemagne, en Grèce, en Italie, aux Pays-Bas, en Nouvelle-Zélande, en Russie, en Espagne, en Suède, en Suisse, dans certains États américains, au Kirghizistan, au Ghana, en Égypte, au Mexique, en Inde et au Chili4, 5, 6.

Selon l’Organisation mondiale de la santé, l’allaitement bénéficie à la fois à la mère et au nourrisson, et c’est l’une des raisons justifiant la cohabitation des détenues avec leur nouveau-né7. Les experts internationaux en santé recommandent l’allaitement comme unique source d’alimentation des bébés jusqu’à l’âge de six mois, si possible, et à la demande par la suite jusqu’à l’âge de deux ans. Les bébés qui ne sont pas allaités sont plus à risque de souffrir de diabète, d’allergies ou d’infections respiratoires ou gastro-intestinales8.

Outre les bienfaits nutritifs et pour la santé qui sont largement connus, certaines études ont montré que l’allaitement peut contribuer au développement psychosocial9 en raison du lien mère-enfant que favorisent la proximité physique, le contact visuel et la qualité de l’alimentation. Or, il faut nécessairement que la mère et son nourrisson cohabitent en permanence pour pouvoir commencer et poursuivre l’allaitement à la demande.

Les mères qui retournent en prison sans leur bébé après la naissance sont souvent invitées à prendre des inhibiteurs de la lactation et, dans bien des cas, des antidépresseurs. Dans un tel contexte, plusieurs d’entre elles éprouvent un immense chagrin et une grande culpabilité, jusqu’au découragement et au désespoir. Pour surmonter ces difficultés, il n’est pas rare qu’elles se tournent vers la consommation de drogues.

Des unités mère-enfant pour favoriser le bien-être des mères détenues et de leur bébé

En 2005, Brenda a posé la question suivante à Ruth : « En tant que médecin de la prison, que diriez-vous de permettre aux mères de revenir ici avec leur bébé après l’accouchement à l’hôpital? » C’était l’une des idées les plus brillantes que Ruth ait entendues depuis longtemps, et elle a fait en sorte d’élargir sa pratique en milieu carcéral pour donner divers conseils relativement aux nourrissons, fournir de l’aide à l’allaitement et procéder à l’examen des nouveau-nés.

C’est ainsi que le Centre Alouette s’est doté d’une unité mère-enfant axée sur le mieux-être des nourrissons, notamment grâce à divers partenariats et collaborations avec d’autres ministères et organismes communautaires. Ainsi, la Direction générale des services correctionnels, l’équipe soignante du Centre Alouette, le personnel carcéral (à la fois la direction et l’équipe de première ligne) de même que d’autres représentants des ministères provinciaux ont convenu de favoriser la cohabitation des mères et de leur bébé au Centre Alouette après l’accouchement, sur recommandation du BC Women’s Hospital et avec l’accord du ministère de l’Enfance et du Développement de la famille, celui-ci ayant le dernier mot en ce qui concerne le placement de l’enfant.

Une équipe multidisciplinaire a donc été mise sur pied pour évaluer le placement des mères et de leur enfant en centre de détention, réunissant divers représentants du BC Women’s Hospital, de l’équipe de direction et de soins du Centre Alouette, ainsi que du ministère de l’Enfance et du Développement de la famille. Dans le cas de mères autochtones, les décisions étaient prises conjointement avec les collectivités autochtones concernées, au besoin. Les mères et leur famille ont été impliquées à toutes les étapes du processus. Par ailleurs, les services prénataux et postnataux du centre Fir Square à l’intention des mères ont permis de consolider la confiance de ces dernières dans leur rôle parental tout en les aidant à mieux planifier leur avenir ainsi que celui de leur bébé. Tous les contrôles pertinents ont été mis en œuvre pour s’assurer que les mères et leur bébé bénéficient d’un cadre sécuritaire et positif au Centre Alouette, avec la coopération des mères elles-mêmes, des autres détenues et du personnel carcéral.

À partir de ce moment, les détenues ayant accouché et souhaitant prendre soin de leur enfant ont été autorisées à cohabiter avec leur nourrisson et à s’en occuper à l’intérieur des murs, sous réserve d’une autorisation du Ministère. Pour la durée de cette initiative (soit de 2005 à 2007), treize bébés sont nés de mères détenues, dont neuf ont cohabité en milieu carcéral avec leur mère, et ce, jusqu’à sa libération. Huit nourrissons ont été allaités pendant la période d’incarcération de la mère, et le plus long séjour d’un bébé en prison a duré quinze mois. La santé et le développement des bébés étaient suivis par les infirmières en santé publique des services communautaires, les soignants du Centre Alouette ainsi que les travailleurs sociaux du Ministère.

Au moment de leur libération, la plupart des mères et leur bébé ont été dirigés vers une résidence supervisée par la Fraser Health Authority, qui offrait des services de soutien aux femmes ayant des antécédents en toxicomanie. Les mères et leur enfant y ont été pris en charge au cours d’un séjour visant à faciliter la transition des mères au sein de la collectivité.

Cette initiative concertée avec le BC Women’s Hospital a exercé une influence positive déterminante sur les mères elles-mêmes, mais aussi sur le personnel carcéral, sur les autres détenues ainsi que sur les équipes des ministères et des organismes partenaires du Centre Alouette.

Les unités mère-enfant : pour faciliter l’engagement maternel

Au début, les autres organismes et ministères ont semblé surpris et méfiants devant ce projet de cohabitation des nouveau-nés avec leur mère en milieu carcéral. Les équipes du Centre Alouette et du BC Women’s Hospital ont pris le temps d’organiser de nombreux échanges pour tous les intervenants afin de favoriser les chances de réussite de cette initiative.

Certains se sont d’abord montrés réticents à l’idée d’accorder un tel « privilège » aux mères détenues, reléguant ainsi au second plan les droits de l’enfant de bénéficier de la présence de sa mère pour favoriser l’allaitement et renforcer les liens affectifs et d’appartenance. Cependant, les attitudes ont évolué peu à peu, la méfiance et les réticences cédant le pas progressivement à des sentiments plus ouverts et bienveillants. Les organismes communautaires se sont dits prêts à fournir des services de soutien aux enfants et aux mères en milieu carcéral. Grâce à une telle collaboration, le Centre Alouette n’a pas eu à concevoir de nouveaux programmes et services ciblés pour le milieu carcéral.

Quant aux mères qui bénéficiaient de cette initiative, elles se disaient très heureuses et reconnaissantes de pouvoir continuer d’allaiter leur bébé et d’en prendre soin au sein de l’établissement de détention. Par l’entremise d’un organisme communautaire, elles ont eu l’occasion de participer à des ateliers d’éducation parentale offerts par des infirmières en santé publique et par un représentant du Ministère. Elles ont aussi collaboré au suivi médical de leur bébé par le médecin du Centre Alouette pour évaluer la santé et la sécurité de l’enfant. Par ailleurs, plusieurs mères ont été autorisées à séjourner sous surveillance au sein de la collectivité, avant et après la naissance de leur bébé, pour participer à divers programmes offerts par des organismes communautaires qui étaient prêts à les accueillir.

Toutefois, la présence de nouveau-nés au Centre Alouette a réveillé de pénibles souvenirs chez d’autres femmes qui n’avaient pas eu la chance de cohabiter avec leur enfant. Le rappel de cette séparation a fait resurgir un grand vide chez elles. En revanche, un sentiment généralisé d’espoir s’est aussi propagé à toute la population carcérale et le climat au sein de l’établissement s’en est trouvé amélioré à plusieurs égards. Dans le cadre d’un projet de recherche participatif sur la santé en milieu carcéral, plusieurs détenues ont accepté de partager leur expérience par écrit, et leurs propos ont été ultérieurement repris dans un ouvrage intitulé Arresting Hope10.

Enfin, plusieurs des détenues ont été touchées d’une manière ou d’une autre par l’implication des divers ministères et organismes, la plupart d’entre elles ayant jusque-là perdu à peu près toute confiance envers les instances gouvernementales en raison de leur parcours antérieur. Devant les efforts concertés de ces organismes pour permettre la cohabitation des mères avec leur bébé, certaines ont changé la perception qu’elles avaient à leur endroit. Des détenues ont même manifesté leur intérêt à collaborer avec ces organismes pour reprendre contact avec leurs propres enfants, ou à se prendre en main pour leur assurer une existence meilleure.

En présence de ces mères si empressées auprès de leur bébé pendant leur détention – tous deux étant appelés à recouvrer ensemble leur liberté –, plusieurs ont eu le sentiment renouvelé que cette initiative servait bien plus que les droits des enfants : c’était tout simplement la bonne chose à faire.

La légitimité des unités mère-enfant confirmée par la Cour suprême de la C.-B.

En 2008, lorsque Brenda a quitté le Centre Alouette pour partir à la retraite, la Direction générale des services correctionnels de la C.‑B. a décidé de fermer l’unité mère-enfant du centre de détention. Ayant accouché après la fermeture de l’unité, les détenues Amanda Inglis et Patricia Block ont contesté cette décision devant les tribunaux et la cause s’est rendue jusqu’en Cour suprême de la C.-B., en mai 2013, au terme de cinq années de recours judiciaires. Pendant le témoignage convaincant des deux plaignantes, Patricia a notamment relaté au tribunal que pas moins de cinq personnes différentes s’occupaient de sa fille pendant qu’elles étaient séparées l’une de l’autre, ainsi que toutes les difficultés rencontrées pour poursuivre l’allaitement pendant son incarcération.

Elle a raconté qu’à un certain moment, la mère de la famille d’accueil qui s’occupait de sa fille avait cessé d’utiliser le lait maternel que Patricia avait tiré pour son enfant, craignant que « ce ne soit pas du bon lait ». Patricia avait alors dû en informer le Ministère, qui avait ordonné à la mère de la famille d’accueil de nourrir le bébé avec le lait maternel. Seule dans sa cellule à tirer son lait pour son bébé qui était confié à des proches, Patricia admettait trouver un tout autre sens au dicton anglais selon lequel « rien ne sert de pleurer sur le lait renversé » (It’s no use crying over spilt milk.).

En décembre 2013, dans l’affaire Inglis c. la Colombie-Britannique (ministère de la Sécurité publique), la juge Carol Ross statuait que la fermeture de l’unité mère-enfant portait préjudice aux mères et aux bébés touchés par une telle décision en contravention de l’article 7 de la Charte relativement à la sécurité de la personne, et que la violation de ces droits contrevenait aux principes de justice fondamentale. Dans sa décision, le tribunal affirmait par ailleurs que la fermeture de l’unité était discriminatoire en vertu du paragraphe 15(1) de la Charte, portant sur le droit à l’égalité pour les membres des groupes en cause, nommément les mères purgeant une peine provinciale qui souhaiteraient cohabiter avec leur bébé pendant leur emprisonnement, ainsi que les bébés de ces mères.

En l’occurrence, la juge demandait au gouvernement de la Colombie-Britannique d’appliquer les dispositions réglementaires de la Correction Act Regulation conformément aux exigences de l’article 7 et du paragraphe 15(1) de la Charte, en lui allouant un délai de six mois pour se conformer aux directives de la Cour et remédier à la situation jugée inconstitutionnelle11.

Des lignes directrices pour favoriser l’instauration de programmes au Canada

En mars 2014, le CCPHE (Collaborating Centre for Prison Health and Education) organisait une réunion de travail de deux jours à l’Université de la Colombie-Britannique dans le but d’énoncer des lignes directrices fondées sur des pratiques exemplaires éprouvées, en vue de faciliter la création d’unités mère-enfant partout au Canada. Les experts ont donc été invités à s’exprimer dans le cadre de quatre panels axés respectivement sur les droits de l’enfant, le contexte correctionnel, les programmes et les processus, ainsi que l’évaluation.

Pour élaborer les lignes directrices, divers délégués d’une trentaine d’organismes avaient été choisis pour prendre part à cette réunion, entre autres de la Direction générale des services correctionnels de la C.‑B., du Service correctionnel du Canada, de l’organisme New Zealand Corrections, ainsi que de l’initiative « Women in2 Healing » (qui représente d’ex-mères détenues).

Sarah Payne a par la suite été mandatée par le CCPHE pour ébaucher un cadre directeur à partir des conclusions de la rencontre. Mme Payne s’en est remise à la méthode d’« analyse du contenu » pour faire en sorte que tous les thèmes évoqués dans le cadre de la réunion soient repris dans les nouvelles lignes directrices. Enfin, les diverses ressources et études internationales présentées par les experts durant la réunion ont aussi été soumises à l’examen.

Les lignes directrices qui résultent de ce processus sont fondées sur 16 principes directeurs et pratiques exemplaires considérés comme essentiels pour assurer la santé optimale de l’enfant et de la mère dans un centre de détention, en tenant compte notamment des particularités du contexte correctionnel, de la grossesse, de la naissance, de l’éducation, des soins en milieu hospitalier et carcéral, de la planification en vue d’une libération et de l’engagement des partenaires communautaires. Les délégués de la Direction générale des services correctionnels de la C.‑B. ainsi que du Service correctionnel du Canada qui étaient présents à la rencontre de concertation ont fait en sorte d’intégrer les principes et les pratiques exemplaires de ces lignes directrices à même les politiques et les procédures de leurs organismes respectifs.

Évaluation rétroactive pour évaluer le projet d’unité mère-enfant

La création de l’unité mère-enfant au Centre Alouette avait été guidée par la nécessité de faire cohabiter les bébés avec leur mère de retour au centre de détention, un principe réitéré par la Cour suprême de la C.‑B. en 2013, qui jugeait inconstitutionnel de les séparer. À l’instar du programme fédéral et d’autres programmes aux États-Unis, le « nouveau » programme provincial de la C.‑B. est actuellement fondé sur la prémisse que les mères détenues qui obtiennent une telle permission bénéficient d’un privilège plutôt que d’un droit. Ces dernières sont tenues de faire une demande et de se conformer à un processus d’approbation qui s’avère long, éprouvant et laborieux.

Il y a actuellement quelques cas de cohabitation de mères avec leur enfant dans certains centres correctionnels fédéraux au Canada. Cependant, la cohabitation des mères et de leur nouveau-né est encore une affaire complexe dans les établissements de détention provinciaux, malgré la réouverture d’une unité mère-enfant modernisée au Centre Alouette en 2014. Si l’on souhaite améliorer la santé des mères et des nouveau-nés en milieu carcéral au Canada, il faudra consacrer des efforts supplémentaires pour conscientiser les gens et mieux comprendre les impacts permanents pour la santé ainsi que les incidences culturelles, épigénétiques et légales qui découlent du choix de séparer la mère et son enfant à la naissance.

Dix ans après le projet d’unité mère-enfant instauré au Centre Alouette, soit de 2005 à 2007, une évaluation de suivi est en cours. Par l’entremise d’entrevues de fond avec les mères dont les enfants ont séjourné au Centre Alouette, ce processus cherche à mieux comprendre leur expérience et à évaluer l’état actuel de santé et de développement social de leur enfant.

Jusqu’ici, toutes les mères interviewées soutiennent que la décision de cohabiter avec leur bébé en prison a transformé leur vie. Pour chacune d’entre elles, les moments partagés avec leur enfant au Centre Alouette, en matière de qualité et de quantité, ont indéniablement influencé positivement et à long terme les liens mère-enfant. Toutes ces mères disent entretenir désormais des relations très étroites avec leur enfant, et c’est avec empathie et bienveillance qu’elles n’hésitent pas à évoquer toutes leurs qualités.

 

Notes

  1. Ronald R. Abrahams et autres, « Rooming-in Compared with Standard Care for Newborns of Mothers Using Methadone or Heroin » dans Le médecin de famille canadien, vol. 53, no 10 (octobre 2007). http://bit.ly/2k4K29I
  2. Marian Knight et Emma Plugge, « The Outcomes of Pregnancy Among Imprisoned Women: A Systematic Review » dans BJOG: An International Journal of Obstetrics and Gynaecology, vol. 112, no 11 (décembre 2005). doi.org/10.1111/j.1471-0528.2005.00749.x
  3. Alison Cunningham et Linda Baker (2003), Waiting for Mommy: Giving a Voice to the Hidden Victims of Imprisonment, London (Ontario), Centre for Children and Families in the Justice System.
  4. Helen Fair, « International Profile of Women’s Prisons » dans World Prison Brief (7 février 2008). http://bit.ly/2knx0BM
  5. Kiran Bedi (2006), It’s Always Possible: Transforming One of the Largest Prisons in the World, New Delhi, Stirling Paperbacks.
  6. Women’s Prison Association, « Mothers, Infants and Imprisonment: A National Look at Prison Nurseries and Community-Based Alternatives » dans Institute on Women & Criminal Justice (mai 2009). http://bit.ly/2hwPK0L
  7. Organisation mondiale de la santé, « Alimentation du nourrisson et du jeune enfant » dans Aide-mémoire (juillet 2015). http://bit.ly/29kGb3r
  8. Santé Canada (2013), La nutrition du nourrisson né à terme et en santé : Recommandations de la naissance à six mois. Énoncé conjoint de Santé Canada, de la Société canadienne de pédiatrie, des Diététistes du Canada et du Comité canadien pour l’allaitement. http://bit.ly/2jVMQDZ
  9. Grace S. Marquis, « Impacts de l’allaitement sur le développement psychosocial et affectif du jeune enfant : commentaires sur Woodward et Liberty, Greiner, Pérez-Escamilla, et Lawrence» dans Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants (mars 2008). http://bit.ly/2kW4yXe
  10. Ruth Elwood Martin, Mo Korchinski, Lyn Fels et Carl Leggo (dir.) (2014), Arresting Hope: Women Taking Action in Prison Health Inside Out, Inanna Publications.
  11. Inglis v. British Columbia (Minister of Public Safety), 2013 BCSC 2309 (SC), H.M.J. Ross. http://bit.ly/2jiUVk0

Ruth Elwood Martin, Ph. D., est professeure clinicienne à l’École de santé publique et des populations de l’Université de la Colombie-Britannique. En 2015, elle a reçu le Prix du Gouverneur général en commémoration de l’affaire « personne ». 

Brenda Tole a dirigé le Centre correctionnel pour femmes Alouette, de l’ouverture de l’établissement en 2004 jusqu’à sa retraite en 2008.

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Publié le 7 février 2017

Ligne du temps – Cinquante ans : les hommes, le travail et la famille au Canada

La paternité au Canada a beaucoup évolué au cours du dernier demi-siècle, alors que les hommes ont délaissé progressivement le rôle de « pourvoyeur » pour se consacrer davantage aux responsabilités entourant les soins, cherchant de plus en plus à assumer en parallèle leurs diverses responsabilités au travail, à la maison et au sein de leurs collectivités.

À l’occasion de la fête des Pères de 2016, nous avons créé une ligne du temps qui s’échelonne sur 50 ans pour illustrer ces tendances et mettre en relief les profils socioéconomiques, culturels et contextuels qui influencent la paternité et les relations familiales – et vice-versa. En voici quelques exemples :

  • Les pères sont de plus en plus nombreux à prendre congé pour s’occuper des nouveau-nés. Plus du quart des nouveaux pères au Canada (27 %) se sont prévalus d’un congé parental rémunéré en 2014 (ou avaient l’intention de le faire), alors qu’à peine 3 % d’entre eux en avaient fait autant en 2000.
  • Le nombre de « pères au foyer » est en hausse. En 2014, les pères représentaient environ 11 % des parents au foyer, comparativement à seulement 1 % en 1976.
  • Les pères de jeunes enfants s’absentent plus souvent du travail pour des motifs familiaux. En 2015, les pères d’enfants de moins de 5 ans ont déclaré s’être absentés du travail en moyenne 2,0 journées annuellement en raison de leurs responsabilités personnelles ou familiales, par rapport à 1,2 journée en 2009.
  • Les « pères seuls » en situation de faible revenu sont moins nombreux. En 2008, l’incidence de faible revenu se situait à 7 % lorsque la famille monoparentale était dirigée par un homme, par rapport à 18 % en 1976.
  • Les pères participent de plus en plus aux tâches domestiques. Les hommes qui affirment participer aux tâches ménagères y consacraient en moyenne 184 minutes par jour en 2010, comparativement à 171 minutes en 1998.
  • Les pères qui bénéficient de modalités de travail flexibles se disent plus satisfaits quant à l’équilibre travail-vie personnelle. Parmi les pères ayant des enfants de moins de 18 ans et travaillant à plein temps selon un horaire flexible, le taux de satisfaction à l’égard de l’équilibre entre le travail et la vie personnelle en 2012 atteignait 81 %, comparativement à 76 % de ceux qui n’avaient pas accès à cette flexibilité.
  • Une proportion croissante des enfants considèrent qu’il est facile de discuter avec leur papa. En 2013-2014, 66 % des filles de 11 ans et 75 % des garçons du même âge affirmaient qu’il était facile de discuter avec leur père de sujets préoccupants, par rapport à 56 % chez les filles et à 72 % chez les garçons deux décennies auparavant.

Cette publication bilingue présente un caractère intemporel puisqu’elle sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Amusez-vous à découvrir notre nouvelle ligne du temps, et bonne fête des Pères aux quelque 8,6 millions de papas du Canada!

Téléchargez la ligne du temps intitulée Cinquante ans : les hommes, le travail et la famille au Canada.

 

Les pères d’aujourd’hui renouvellent le modèle travail-famille

Nathan Battams

Le « paysage familial » canadien est en constante évolution, en fonction des forces socioéconomiques, culturelles et contextuelles qui définissent et redéfinissent les relations et les rôles familiaux. La paternité ne fait pas exception à la règle, si bien que les quelque 8,6 millions de papas du Canada, de plus en plus diversifiés, s’impliquent désormais davantage dans la vie familiale que ceux des générations précédentes1. Plusieurs d’entre eux n’hésitent pas à délaisser le modèle « traditionnel » du père pourvoyeur pour jouer une plus grande place dans la prise en charge des soins et des responsabilités domestiques. Ce faisant, les pères d’aujourd’hui contribuent à renouveler et à redessiner les liens entre la paternité et le travail.

Les hommes délaissent le rôle de « pourvoyeur » alors que les femmes sont de plus en plus présentes sur le marché du travail

Depuis 50 ans, la prévalence des « pères pourvoyeurs » a reculé considérablement, compte tenu de la multiplication du nombre de familles à deux revenus et, par conséquent, de la participation accrue des mères au marché du travail. Selon les données de Statistique Canada pour 1976, les ménages ayant deux revenus représentaient 36 % des familles comptant au moins un enfant de 16 ans ou moins au Canada, alors que cette situation touchait 69 % des familles en 2014. Un autre rapport de Statistique Canada montre que, durant la même période, la proportion des familles à un seul revenu, où le père était l’unique pourvoyeur, a chuté de 51 % à seulement 17 %.

Au sein des familles formées d’un couple, certains pères choisissent de rester en marge de la population active pour jouer un rôle parental principal ou prééminent (on parle souvent de « pères au foyer »), qu’il s’agisse d’une situation permanente ou temporaire pendant que les enfants sont en bas âge. Il y a quarante ans, environ 1 % des papas se disaient pères au foyer parmi les familles à un seul revenu, alors que ce taux s’établit aujourd’hui à 11 %.

D’ailleurs, le Canada ne fait pas bande à part à cet égard  : selon les données d’un rapport publié en 2015 par le Pew Research Center, la même tendance prévaut aux États-Unis, où 7 % des pères américains vivant avec des enfants déclaraient « ne pas travailler à l’extérieur » en 2012, comparativement à seulement 4 % en 1989. Parmi ceux-ci, la proportion de pères qui affirment rester au foyer pour s’occuper de la famille a plus que quadruplé dans l’intervalle, pour se fixer à 21 % (par rapport à 5 % en 1989).

L’engagement accru des pères favorise l’amélioration des relations familiales

En outre, les données de l’Enquête sociale générale sur l’utilisation du temps montrent que les pères modernes s’investissent davantage sur le plan familial  : les hommes passent plus de temps en famille, puisqu’ils y consacraient 379 minutes quotidiennement en 2010 comparativement à 360 minutes en 1986. En moyenne, les pères ayant des enfants d’âge préscolaire s’absentaient du travail 1,8 journée par année pour s’acquitter de responsabilités personnelles ou familiales en 1997, mais 6,3 journées une décennie plus tard. Les générations plus jeunes contribuent par ailleurs à réduire l’écart de prise en charge des tâches domestiques, les hommes affirmant y consacrer plus de temps qu’il y a trente ans.

En 2000, seulement 3 % des nouveaux pères au Canada s’étaient prévalus d’un congé parental rémunéré, alors que plus du quart d’entre eux (27 %) avaient l’intention d’en faire autant en 2014. Ce taux grimpe en flèche au Québec (où il atteint 78 %), puisque les prestations de paternité offertes aux nouveaux papas québécois s’ajoutent aux prestations parentales dans le cadre du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP). Le Québec est actuellement la seule province à offrir des prestations de paternité, mais la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail a récemment exprimé sa volonté de consentir un peu plus de temps aux papas, puisque les congés de paternité figurent parmi les changements proposés au programme fédéral de prestations parentales.

Du reste, l’engagement accru des pères s’avère éventuellement très bénéfique aux relations familiales et à la vie de famille. Dans le cadre d’une étude comparative portant sur les congés parentaux offerts au Québec par rapport aux programmes en vigueur dans le reste du Canada, l’auteure Ankita Patnaik a constaté qu’il existe un « impact important et persistant » au Québec dans les rapports hommes-femmes au cours des trois années suivant un congé parental pour le père. Selon les conclusions de son rapport, les pères continuent ensuite de s’impliquer davantage dans les tâches ménagères, alors que les mères sont plus susceptibles de participer au marché du travail. De plus, les pères québécois ayant bénéficié du RQAP passaient en moyenne une demi-heure de plus par jour à la maison comparativement aux pères hors Québec.

Étant donné l’évolution de la situation dans l’ensemble de l’Amérique du Nord, il est sans doute normal d’avoir l’impression d’un engagement plus important des pères par rapport aux générations précédentes. À ce propos, l’étude du Pew Centre citée précédemment montrait que près de la moitié des pères interrogés aux États-Unis (46 %) disaient consacrer personnellement plus de temps à leurs enfants que leur propre père ne le faisait pour eux-mêmes. Au Canada, un sondage de l’initiative Today’s Parent a permis de constater que les trois quarts (75 %) des hommes interrogés se disaient plus impliqués auprès de leurs enfants que leur propre père à leur endroit.

Les enfants sont aussi susceptibles de ressentir les effets d’une présence paternelle accrue. Selon un sondage international HBSC mené en 1993-1994 puis en 2013-2014 pour le compte de l’Organisation mondiale de la santé, une proportion grandissante des enfants de 11 ans affirment qu’il est « facile » de discuter avec leur propre père de sujets préoccupants, la proportion étant passée de 56 % à 66 % chez les filles, et de 72 % à 75 % chez les garçons.

L’importance de l’équilibre travail-vie personnelle pour les pères d’aujourd’hui

Même si les pères modernes jouent un rôle accru au sein du foyer familial, la plupart d’entre eux travaillent toujours, si bien que le sujet de l’équilibre travail-vie personnelle s’impose tout naturellement lorsqu’il est question de la paternité aujourd’hui. Les récentes données de Statistique Canada révèlent que la plupart des pères (près de huit sur dix, soit 78 %) se disent satisfaits quant à l’équilibre travail-vie personnelle. Or, la famille occupe une place centrale du côté « vie personnelle » de l’équation travail-vie personnelle  : chez les parents qui disaient n’être pas satisfaits à cet égard, le principal facteur en cause était lié au fait de n’avoir « pas assez de temps à consacrer à la vie familiale ».

Par l’entremise des pratiques et des politiques pour la conciliation travail-vie personnelle, les employeurs jouent un rôle de premier plan pour améliorer et soutenir l’équilibre travail-vie personnelle des pères. Dans la même étude de Statistique Canada, on constatait que la proportion des pères satisfaits de l’équilibre entre le travail et la vie personnelle était invariablement plus marquée chez les travailleurs bénéficiant d’un horaire flexible (satisfaction à 81 % comparativement à 76 % de ceux qui n’y avaient pas accès). On a constaté la même satisfaction chez les personnes profitant d’une flexibilité de l’horaire de travail sans qu’il y ait d’incidence négative sur la carrière (83 % par rapport à 74 % de ceux qui n’en bénéficient pas), tout comme chez ceux qui avaient la possibilité de prendre un congé non payé pour s’occuper des enfants (79 % par rapport à 71 % de ceux qui n’avaient pas cette possibilité), ou encore chez ceux qui pouvaient prendre un congé non payé pour prodiguer des soins à un conjoint, à un partenaire ou à un autre membre de la famille (81 % par rapport à 72 % de ceux qui ne pouvaient le faire).

« La proportion des pères satisfaits de l’équilibre entre le travail et la vie personnelle est plus marquée chez les travailleurs bénéficiant d’un horaire flexible et ayant la possibilité de prendre un congé non payé pour s’occuper de leurs enfants et de leurs familles. »

Heureux en famille, heureux au travail…

Bref, flexibilité et satisfaction vont de pair relativement à l’équilibre entre le travail et la vie personnelle. Ainsi, les organisations qui disposent de politiques favorisant la flexibilité pour les pères et leurs familles sont plus susceptibles d’attirer et de retenir les meilleurs employés qui sont aussi papas (ou qui souhaitent le devenir). À l’inverse, ceux qui font peu de place aux modalités de travail flexibles risquent de ne pas susciter un grand intérêt chez les pères  : selon un sondage Harris-Decima, la moitié des pères interrogés au Canada (49 %) affirment qu’ils envisageraient de changer d’emploi si un employeur éventuel leur offrait de meilleures conditions que leur employeur actuel pour la conciliation travail-famille.

Les pères d’aujourd’hui sont-ils plus soucieux du bien-être de leurs proches ou simplement différents?

Les pères ont toujours cherché à assurer le bien-être de leurs familles, mais ceux de la génération actuelle jouent un rôle de plus en plus engagé au sein de la famille et ce virage profite à la vie de famille et aux relations familiales. Alors que, pour les papas des générations précédentes, le bien-être de la famille passait d’abord par le travail rémunéré et la stabilité financière, les pères d’aujourd’hui s’impliquent plus directement auprès de leurs enfants en bas âge, consacrent plus de temps à la famille et favorisent les milieux de travail compatibles avec leur rôle évolutif sur le plan familial. En acceptant de jouer ces nouveaux rôles, ils redéfinissent ainsi la nature même de la paternité, que ce soit au sein de la famille, au travail ou dans les collectivités.

 


Nathan Battams est auteur et chercheur au sein de l’Institut Vanier de la famille.

 

Note

1 Caryn Pearson, « L’incidence des problèmes de santé mentale sur les membres de la famille », Coup d’œil sur la santé (7 octobre 2015), Statistique Canada, no 82-624-X. Lien : http://bit.ly/2V9tJac

Ligne du temps – Cinquante ans : les femmes, le travail et la famille au Canada

Même si les mères au Canada ont toujours joué un rôle central dans la vie de famille, il ne fait aucun doute que le contexte socioéconomique, culturel et contextuel évolue sans cesse, tout comme l’influence qu’il exerce sur la maternité, et vice-versa.

Par rapport aux générations précédentes, les mères sont de plus en plus nombreuses à conjuguer des responsabilités familiales et professionnelles, et les interrelations dynamiques qui existent entre les femmes, le travail et la famille continuent de se renouveler. À l’occasion de la fête des Mères 2016, nous avons créé une ligne du temps échelonnée sur 50 ans pour illustrer ces interrelations dans une perspective élargie, en mettant en relief certaines tendances à long terme ayant émergé au fil du dernier demi-siècle, notamment :

  • une croissance du taux de participation des femmes au marché du travail, lequel est passé de 40 % en 1968 à 82 % en 2014, chez les femmes âgées de 25 à 54 ans;
  • une progression constante du nombre de mères en situation de « pourvoyeur », qui représentaient 21 % des familles formées d’un couple ayant un seul revenu en 2014, comparativement à 4 % en 1976;
  • un recul marqué de l’incidence de faible revenu chez les mères seules, ce taux étant passé de 54 % en 1976 à 21 % en 2008;
  • une baisse du taux de fécondité, qui s’établissait à 3,94 enfants par femme en plein baby-boom (1959), pour chuter à 1,61 enfant en 2011;
  • une hausse constante de l’âge moyen des femmes à la naissance d’un premier enfant, soit de 24,3 ans en 1974 à 28,5 ans en 2011;
  • une augmentation du temps que les mères consacrent à leurs familles, soit 421 minutes par jour (7 heures) en 2010, par rapport à 403 minutes par jour (6,7 heures) en 1986.

Cette publication bilingue présente un caractère intemporel puisqu’elle sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Découvrez notre nouvelle ligne du temps et bonne fête des Mères aux quelque 9,8 millions de mamans du Canada!

Téléchargez la ligne du temps intitulée Cinquante ans : les femmes, le travail et la famille au Canada.

Les « parents seuls » : terminologie et étiquettes

Victoria Bailey

Parents seuls, parents uniques, familles monoparentales, parents indépendants, parents non mariés, parents célibataires, parents autonomes : les mots et les termes utilisés pour désigner ces adultes qui assument leur parentalité de manière indépendante sont variés et subjectifs, et tendent à évoluer au fil du temps. Ces étiquettes peuvent sembler banales, mais les mots sont forts et chargés de sens : ils conditionnent notre perception du monde et des personnes qui y vivent. Cependant, tout comme les concepts qu’ils désignent, ces termes du registre de la famille demeurent pour le moins vagues. Aux yeux de certaines personnes, ils désignent des catégories bien définies, alors que d’autres y voient de simples stéréotypes. Au surplus, ces étiquettes véhiculent éventuellement des préjugés qui se répercutent sur le bien-être et l’identité de la famille, particulièrement pour les mères seules1 qui représentent 80 % des parents seuls au Canada.

De nombreuses étiquettes pour désigner ces « parents seuls »

Selon Statistique Canada, l’expression parents seuls désigne les « mères ou pères, sans conjoint marié ni partenaire en union libre présent, qui habitent un logement avec un ou plusieurs enfants ». D’ailleurs, cette terminologie n’est pas exclusive : le Bureau national de la statistique du Royaume-Uni (Office for National Statistics) utilise aussi l’expression parents seuls (lone parent) ou famille monoparentale (lone parent family), que l’on retrouve aussi sur le site Web des données statistiques du gouvernement britannique. Le Bureau de la statistique de l’Australie (Australia Bureau of Statistics) préfère quant à lui l’expression famille monoparentale (one-parent family). Enfin, le Service de la statistique de la Nouvelle-Zélande (Statistics New Zealand) privilégie le terme monoparent (sole parent) dans sa définition des catégories du recensement familial, mais tend à utiliser la même terminologie que l’Australie dans les documents d’information sur le recensement.

Le Bureau américain du recensement (United States Census Bureau) retient quant à lui plusieurs termes dans ses divers rapports et définitions. On y retrouve différentes locutions pour désigner certains types de ménages ou de familles, comme ménage dirigé par une femme, époux non présent, parents seuls ou parents uniques. Dans son ouvrage intitulé Engendering Motherhood, la sociologue Martha McMahon recourt souvent à l’expression mères non mariées, mais il faut dire que ce texte remonte à une vingtaine d’années. Même si cette acception a déjà été très répandue, on ne parle plus guère aujourd’hui de « mères non mariées » dans le langage courant ou dans les médias. Pour plusieurs, il s’agit d’une expression dépassée ou archaïque, voire associée à une doctrine religieuse (et peut-être plus pertinente dans ce contexte).

D’une certaine manière, par déficit du langage, aucun des termes qui désignent habituellement les mères seules ne permet de décrire adéquatement cette réalité familiale. Par exemple, on pourrait penser que les mères sans conjoint ou les mères de famille monoparentale sont des parents « laissés à eux-mêmes » sans aucune forme de soutien, mais plusieurs d’entre elles bénéficient pourtant de solides réseaux de soutien par l’entremise de leurs familles, de leurs amis, d’organismes communautaires et même d’ex-conjoints. De même, la famille monoparentale suggère peut-être une forme d’isolement, alors que les enfants de ces familles ont parfois quand même deux parents, même si ces derniers ne vivent plus ensemble. Tout comme l’acception mères non mariées, l’expression parents seuls a une connotation qui implique une dérogation à la norme, c’est-à-dire celle des parents mariés. Pourtant, on rencontre rarement l’expression « parents mariés » au fil d’une conversation ou d’un texte (sauf si le sujet porte précisément sur le mariage ou la parentalité).

Bref, l’éventail terminologique tient sans doute davantage au contexte, au besoin de décrire et à la volonté d’inclusion qu’à une illustration de la complexité des structures familiales. Ces termes sont en quelque sorte des façons de définir les familles. Que ce soit volontaire ou non, le fait que des acceptions nouvelles et plus contemporaines comme parents autonomes ou parents indépendants émergent sans égard à la terminologie du Bureau américain du recensement témoigne de l’évolution et de la procession de la situation des parents seuls vers une réalité où les parents choisissent délibérément leurs circonstances familiales.

La terminologie évolue au même rythme que la réalité des familles

L’usage et la signification des différents synonymes de parents seuls ont évolué au fil du temps, en fonction des réalités familiales qui évoluent perpétuellement. Selon Statistique Canada, la proportion de parents seuls au pays n’est pas si différente de ce qu’elle était il y a un siècle. De fait, cette proportion était pratiquement aussi élevée en 1981 (12,7 %) qu’en 1931 (11,9 %). Par contre, ce qui distingue les deux époques, ce sont les motifs qui justifient ces statistiques, c’est-à-dire le choix délibéré d’une forme de relation à l’époque moderne, plutôt que les conséquences d’une situation circonstancielle par le passé (souvent reliées au taux de mortalité). À cet égard, voici un extrait du rapport Une diversité qui
perdure : le mode de vie des enfants au Canada selon les recensements des 100 dernières années publié par Statistique Canada :

« Ces diverses situations familiales […] découlaient dans bien des cas du décès d’un ou de plusieurs membres de la famille. La mortalité au sein de la famille – par exemple, frères et sœurs, mères pendant l’accouchement ou des suites de complications lors de l’accouchement et pères servant dans la guerre – était une expérience bien plus fréquente pour les jeunes enfants au début du 20siècle qu’aujourd’hui. En 1921, environ un enfant sur 11 (8,9 %) de 15 ans et moins avait vécu le décès d’au moins un parent, tandis que 4,1 % avaient perdu leurs deux parents. »

Plus loin, les chercheurs soulignent qu’« en comparaison, en 2011, moins de 1 % des enfants âgés de 0 à 14 ans vivaient dans une famille monoparentale dans laquelle le parent était veuf ».

Au fil du temps, les Canadiens et les Canadiennes ont exploré plusieurs avenues en matière de parentalité indépendante, notamment l’adoption, le don d’ovocytes ou de sperme, la maternité de substitution, la fécondation in vitro (FIV), ou encore la séparation, le divorce ou le décès d’un conjoint ou d’une conjointe (issu d’une éventuelle relation formelle, le cas échéant). Il importe de reconnaître cette diversité dans nos échanges et d’éviter la généralisation et l’homogénéisation, qui ne font que consolider les stéréotypes.

Les étiquettes familiales influencent éventuellement le sentiment identitaire

Les mots dont on se sert pour définir les structures familiales ne sont pas tout à fait accessoires : ils comportent parfois des connotations ou des idées négatives. La définition de la famille retenue dans le cadre du Recensement de 2011 en est un exemple, alors que Statistique Canada considérait pour la première fois la famille recomposée :

« Une famille comptant un couple avec enfants peut encore être classifiée comme étant soit une famille intacte dans laquelle tous les enfants sont les enfants biologiques et/ou adoptés des deux conjoints mariés ou des deux partenaires en union libre, soit une famille recomposée avec au moins un enfant biologique ou adopté de seulement un des conjoints mariés ou partenaires en union libre et dont la naissance ou l’adoption est survenue avant la relation actuelle. »

Bien qu’il soit louable de tenir compte des familles recomposées parmi l’ensemble des structures familiales, la décision de la dépeindre par contraste en lui apposant l’étiquette « famille intacte » donne éventuellement à penser que les familles non conformes au modèle ne sont pas intactes, puisque l’un des parents ne vit pas sous le même toit que son enfant.

De même, certaines étiquettes comme mères seules ou parents seuls ne font pas l’affaire de tous. Ainsi, dans l’un de ses articles intitulé « Single Mother Was Not a Title I Wanted to Own. A Year Later It Still Isn’t » [« Mère seule » : une expression que je réfutais il y a un an et que je réfute toujours], la blogueuse Mavis King disait refuser l’étiquette de mère seule, à l’instar d’autres mères comme elle :

Le problème avec l’expression mère seule, c’est qu’il est chargé d’un sens péjoratif. Au pire, les mères seules sont associées au portrait de la mère négligée et indolente qui vit de l’aide sociale et élève des enfants difficiles. La mère seule parvient à peine à contenir la situation, à assurer leur subsistance. Elle n’est aucunement l’héroïne de l’histoire, mais plutôt l’unique responsable de ses malheurs. Bref, elle aurait dû y penser avant, ne pas se marier avec lui, ne pas avoir d’enfants. Et les enfants justement? Puisqu’elle ne pense qu’à elle, ils ne réussissent pas à l’école et ne font pas le poids à côté de leurs amis. [traduction]

D’autres parents décident eux-mêmes de la terminologie qui rend justice à leur autonomie. Dans son blogue « Wealthy Single Mommy », par exemple, Emma Johnson écrit : « Je suis tout à fait à l’aise avec l’expression mère seule : je réussis à faire vivre ma famille financièrement et je suis celle qui s’occupe principalement de mes enfants [traduction]. »

Les préjugés à l’endroit des « mères seules » peuvent nuire au bien-être de la famille

Les stéréotypes négatifs comme ceux que décrit Mme King au sujet des mères seules sont souvent alimentés et consolidés par les médias, notamment l’idée que les mères seules seraient irresponsables et dépourvues de moyens, et que leurs enfants seraient moins bien que les autres. Dans le cadre de mes études de cycles supérieurs, j’ai récemment produit un rapport axé sur l’image véhiculée par les médias canadiens au sujet des mères seules. On y constate que la couverture médiatique suit généralement trois principales tendances sur cette question, soit : la valeur négative de la situation des mères seules dans une représentation dichotomique, l’homogénéisation des mères seules et l’utilisation de l’expression mères seules pour cibler une structure familiale fondée sur les genres, et ce, sans que ce soit lié directement avec le sujet d’un reportage donné.

Ce type de représentation alimente les stéréotypes, ce qui entraîne des conséquences manifestes. À titre d’exemple, une étude de 2011 sur la discrimination dans le marché immobilier locatif montrait que les mères seules avaient 14 % moins de chances qu’un couple (hétérosexuel) d’obtenir une réponse affirmative à la suite d’une demande de location. Dans le cadre d’un groupe de discussion qualitatif réuni en vue de la rédaction de mon rapport, certaines femmes ont affirmé que l’étiquette de « mères seules » avait influencé leur décision de prolonger une situation pourtant malsaine, notamment par des affirmations comme « J’étais plus inquiète de devenir une mère seule que de poursuivre cette relation abusive ».

Les étiquettes familiales : peu représentatives de la diversité des situations

Plusieurs auteurs affirment que les enfants élevés par des parents seuls sont plus susceptibles de connaître plus tard des difficultés, mais d’autres études remettent en question un tel lien de cause à effet. Comme le soulignent les chercheurs Don Kerr et Roderic Beaujot : « Les études qui ne tiennent pas compte des difficultés préexistantes des enfants et de leur famille ont tendance à surestimer les conséquences d’une situation familiale monoparentale [traduction]. » Dans plusieurs cas, c’est précisément le fait qu’elles aient mis fin à une relation malsaine pour devenir des mères seules que certaines femmes ont réussi à s’offrir et à offrir à leurs enfants un milieu de vie plus sain.

Bien souvent, il semble que les ressources comme l’argent, le temps et le soutien de l’entourage (c’est-à-dire la famille élargie, les amis et d’autres proches) influencent davantage la réalité et la situation des enfants et des parents que le type de relation que vivent les parents. Dans son ouvrage intitulé Family Studies: An Introduction, Jon Bernardes écrit : « La reine Victoria a longtemps été un parent seul, et on n’a jamais dit que sa situation parentale était “problématique” [traduction]. »

Ce qu’il faut surtout comprendre, c’est que les enfants se soucient bien peu des catégories de recensement auxquelles appartiennent leurs parents et qu’ils n’établissent aucun jugement quantitatif sur les relations de ces derniers. Certes, ils n’hésiteront pas à exposer à leurs amis leur situation familiale (« Je vis avec mon père », ou encore « Mon père n’habite plus avec nous »), mais tout cela se fait sur le ton de la conversation. Une fois ces renseignements personnels énoncés, il y a fort à parier qu’aucun enfant n’utilisera des termes distinctifs comme « mon père seul » ou « ma mère sans conjoint » pour raconter quelque chose ou expliquer une situation. Ils diront simplement : « ma mère », « mon père », etc., marquant ainsi leur sentiment de confiance, d’appartenance, d’attachement et d’amour inconditionnel par ce déterminant initial, qui est peut-être le plus significatif : mon ou ma.

 

1 Dans ce texte, les expressions mères seules et parents seuls sont retenues pour des questions d’uniformité. Néanmoins, comme on le voit, il existe une diversité d’usages et d’acceptions reconnues.


Victoria Bailey est rédactrice pigiste et étudiante en études féministes. Elle habite à Calgary (Alberta).

 

Les soins de maternité modernes au Canada

Par Cecilia Benoit

Mère d’ascendance micmaque, Georgina arrive au terme de sa grossesse. C’est un peu à contrecœur qu’elle se prépare à quitter sa collectivité de Port aux Basques, à l’extrême sud-ouest de Terre-Neuve, pour aller accoucher à la seule maternité qu’il reste dans sa région, soit à l’hôpital régional Western Memorial de Corner Brook, à quelque 220 kilomètres du lieu de résidence de sa famille et de ses amis. Il y a fort à parier qu’elle n’aura jamais rencontré auparavant le médecin accoucheur ou la sage-femme qui s’occupera d’elle, et les probabilités que son accouchement se termine en césarienne sont de 30 %.

L’objectif no 5 parmi les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) définis par les Nations Unies consiste à « améliorer la santé maternelle ». Il vise essentiellement à favoriser le droit universel des femmes de bénéficier des soins maternels les plus adéquats possible, mais c’est toutefois l’objectif pour lequel les progrès sont les plus lents. À l’instar de Georgina, ce sont les femmes autochtones, celles qui vivent dans la pauvreté ou celles qui habitent en régions rurales ou éloignées qui sont les plus touchées. Le Canada a fait des progrès considérables tout au long du XXe siècle pour améliorer la santé maternelle et instaurer un système universel de soins de maternité, mais il n’en demeure pas moins que plusieurs lacunes persistent, notamment en ce qui a trait à la médicalisation de l’accouchement et aux inégalités dans l’accès aux services de maternité.

Petit historique des naissances au Canada

Dans toutes les cultures, la grossesse et l’accouchement sont des jalons importants de l’existence. Autrefois, la responsabilité des soins à cet égard revenait principalement aux sages-femmes. Les soins pendant la grossesse étaient dispensés dans la collectivité, et l’accouchement se passait à la maison.

Même s’il s’agit d’un phénomène bien antérieur à l’apparition de l’État providence moderne, la médicalisation des soins de maternité au Canada a néanmoins été intégrée et consolidée dans les programmes et la réglementation dans la foulée des politiques de soins universels adoptées et mises en œuvre dès 1972, c’est-à-dire le régime d’assurance maladie.

Le modèle canadien de soins de santé est souvent décrit comme un système de santé universel à payeur unique. Toutefois, le financement et l’offre de services sont dans les faits beaucoup plus complexes. Ils reposent sur la participation des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, des fournisseurs au sein de la collectivité, des compagnies d’assurance privée, de même que sur les individus.

La plupart des médecins travaillent en pratique privée. Leurs services sont payés par divers régimes d’assurance provinciaux ou territoriaux, dont le financement provient des recettes générales des provinces ou territoires, ainsi que de paiements de transferts du gouvernement fédéral par l’entremise du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux ou, plus récemment, du Transfert canadien en matière de santé.

Or, en vertu du régime d’assurance maladie, seuls les soins de maternité dispensés par un médecin étaient admissibles au regard du système public de soins de santé, si bien que les médecins (surtout des hommes) ont fini par prendre le relais des sages-femmes dans le domaine des naissances. Par ailleurs, dans le régime public de soins de santé ainsi créé, les médecins ont préservé leur droit de pratiquer comme entrepreneurs autonomes, et ce, où bon leur semble.

C’est donc dire que le système créé dans le cadre du régime d’assurance maladie n’a pas tenu compte des inégalités qui existaient dans l’accès aux services d’un médecin, et ce, tout en faisant du centre hospitalier la plaque tournante du réseau de soins de maternité. En outre, par crainte des infections et par souci d’intimité, on a fini par éloigner les conjoints et les proches de cette réalité vieille comme le monde : l’accouchement.

Les naissances à l’ère moderne au Canada

Au début des années 1980, presque toutes les Canadiennes accouchaient dans des hôpitaux régionaux sous la supervision d’un médecin de famille accoucheur ou d’un obstétricien, avec l’aide d’infirmières en obstétrique. Toutefois, ces changements institutionnalisés ont eu pour conséquence d’isoler les femmes et d’éloigner les nouveaux pères. Or, des recherches ont révélé que les femmes qui bénéficient du soutien de leur conjoint pendant le travail ont moins tendance à exiger des analgésiques, et posent un regard plus positif sur l’accouchement. Suivant la parution d’études montrant l’importance des liens parents-enfants, le système de soins de santé s’est toutefois ajusté afin de permettre aux deux parents de participer activement au processus de la naissance. Aujourd’hui, les conjoints sont présents pour la majorité des naissances, et assument un rôle accru non seulement dans les premiers moments de la vie du nouveau-né, mais aussi en ce qui touche les soins à l’enfant et les tâches domestiques au cours des années qui suivent.

De 1990 à 2013, le nombre de décès liés à la maternité au Canada est passé de 6 à 12 cas par tranche de 100 000 naissances.

En 2013, l’UNICEF classait le Canada au 22e rang (parmi 29 pays riches) en ce qui a trait au taux de mortalité infantile. Le taux s’avérait particulièrement important parmi les peuples autochtones.

À l’heure actuelle, le Canada affiche le plus faible taux de mortalité maternelle en Amérique, notamment grâce aux avancées réalisées au XXe siècle en matière d’éducation des femmes, ainsi que sur le plan de la nutrition, de la régulation des naissances et de l’accès universel aux services médicaux. Il n’en demeure pas moins que, de 1990 à 2013, le taux de mortalité lié à la maternité au Canada est passé de 6 à 12 décès par tranche de 100 000 naissances. À titre comparatif, le taux de mortalité au Japon et dans certains pays européens est désormais deux fois plus faible qu’au Canada, sinon mieux. Par ailleurs, il est tout aussi déconcertant de constater qu’en 2013, le Canada arrivait au 22e rang parmi 29 pays riches au classement de l’UNICEF pour le taux de mortalité infantile, la prévalence de décès à cet égard étant particulièrement élevée chez les Autochtones.

Ces dernières décennies, le nombre de médecins de famille assurant le suivi d’accouchement a considérablement reculé, tout comme le nombre d’hôpitaux offrant des soins de maternité. Du même coup, la proportion de naissances supervisées par des obstétriciens a grimpé en flèche. Ainsi, les obstétriciens participent aujourd’hui à 80 % des naissances dans les hôpitaux ontariens.

Parallèlement, les taux de naissances par césarienne ont connu une augmentation constante, si bien que la proportion d’accouchements par césarienne à l’échelle nationale est passée de 17,6 % en 1995 à 22,5 % en 2001, pour atteindre 27,3 % en 2013 (voir le tableau ci-dessous). À l’heure actuelle, le taux de naissances par césarienne oscille entre les plafonds de 32 % en Colombie-Britannique ou 31 % à Terre-Neuve-et-Labrador, et les taux les plus faibles de 23,1 % en Saskatchewan ou 21,41 % au Manitoba. L’Organisation mondiale de la santé considère que la procédure de naissance par césarienne – qui permet de sauver des vies – demeure sous-utilisée lorsque le taux est inférieur à 10 %, mais devient surutilisée lorsque le taux dépasse 15 %. On a établi que le recours non nécessaire à la césarienne pourrait accroître la morbidité maternelle, notamment en ce qui a trait à l’augmentation des risques de dépression et de stress post-traumatique, à la diminution du taux d’allaitement et aux risques accrus de complications lors des grossesses subséquentes. Les médias laissent généralement entendre que les mères exigent aujourd’hui de plus en plus la césarienne, mais bien peu de données permettent en fait d’établir une corrélation entre l’augmentation du taux national de naissances par césarienne depuis 20 ans et les soi-disant exigences des mères qui souhaiteraient accoucher sans douleur (on parle d’accouchement « de convenance » ou « people »).

 

Les sages-femmes aujourd’hui au Canada

Au cours des années 1990, l’Ontario, la Colombie-Britannique et le Québec ont instauré des programmes de formation structurés pour les sages-femmes, leurs services étant financés par les fonds publics et régis par un cadre réglementaire. Depuis, la plupart des autres régions ont emboîté le pas. Cependant, cette profession n’est toujours pas régie ni subventionnée à Terre-Neuve-et-Labrador, au Yukon, à l’Île-du-Prince-Édouard et au Nouveau-Brunswick (voir le tableau). Par ailleurs, à peine 9 % des naissances au Canada sont actuellement confiées à des sages-femmes. Cette proportion est plus élevée dans certaines régions (19 % en Colombie-Britannique, par exemple), mais l’offre ne suffit pas à la demande, si bien qu’un grand nombre de femmes aux quatre coins du pays ne parviennent tout simplement pas à trouver une sage-femme dûment qualifiée dont les services sont financés par les fonds publics.

Du reste, ce sont les femmes les moins éduquées, les jeunes mères, les femmes célibataires, celles vivant en régions rurales ou éloignées, ou encore celles qui appartiennent à des collectivités défavorisées sur le plan socioéconomique qui éprouvent le plus de difficulté à retenir les services subventionnés d’une sage-femme. Selon l’Association des sages-femmes de l’Ontario, 40 % des Ontariennes qui souhaiteraient consulter une sage-femme n’y parviennent pas, et c’est également le cas dans d’autres provinces en ce qui concerne l’accès aux services d’une sage-femme. Suivant les avancées réalisées au Québec et au Manitoba, l’Ontario a récemment instauré deux centres autonomes subventionnés dirigés par des sages-femmes. Malgré cela, bon nombre de femmes autochtones ou non autochtones n’ont toujours pas accès à de tels services. C’est notamment le cas de Georgina dont on a parlé précédemment, qui se trouve plutôt confrontée à la solitude, dans un cadre étranger aux traditions maternelles propres à sa culture, et isolée de sa famille. Il en résulte bien souvent des « accouchements stressants »[2].

Les soins postnataux modernes au Canada

À l’ère moderne, la durée de séjour des Canadiennes à l’hôpital après l’accouchement a considérablement diminué, passant de cinq jours en 1984‑1985 à un peu moins de deux jours actuellement dans le cas d’un accouchement par voie basse. Compte tenu des coûts importants associés à toute hospitalisation, les gestionnaires des établissements misent en effet sur des congés hâtifs pour les mères et leurs nouveau-nés afin de limiter ou de réduire les dépenses liées aux soins obstétricaux. Les femmes qui bénéficient d’un bon réseau de soutien et d’un accès aux services subventionnés d’un médecin ou d’une sage-femme apprécient généralement les congés hâtifs de l’hôpital.

Tout comme autrefois, le soutien de la famille s’avère souvent d’une importance capitale en période postnatale. Partout au pays, les pères ou conjoints sont beaucoup plus impliqués après la naissance que ne l’étaient ceux des générations précédentes, notamment à la faveur des régimes de congés parentaux. Cette évolution des rôles familiaux se poursuit encore aujourd’hui : selon Statistique Canada, 31 % des nouveaux pères canadiens ont demandé un congé parental en 2013 (ou avaient l’intention de le faire), soit une augmentation marquée par rapport au taux de 3 % enregistré en 2000. Au Québec, la proportion est encore beaucoup plus élevée, surtout depuis l’instauration du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP), soit le seul régime au pays prévoyant des congés destinés particulièrement aux pères. Depuis la mise en œuvre du RQAP en 2006, le recours à de tels congés a presque triplé, passant de 28 % en 2005 à 83 % en 2013.

Toutefois, les femmes qui ne peuvent compter sur le soutien familial ni sur de telles ressources structurées sont parfois confrontées à des problèmes affectant leur propre santé ou celle de leur enfant. Les systèmes de soins de santé provinciaux ou territoriaux couvrent un éventail limité de soins postnataux. À l’échelle fédérale, la participation à cet égard se limite généralement à relayer de l’information par l’entremise des provinces, et à formuler des lignes directrices nationales en matière de soins de maternité et de néonatalité. Dans certaines régions, il est encore possible de bénéficier de la visite optionnelle d’un intervenant ou d’une infirmière en santé publique, mais ailleurs, les services offerts au retour à la maison se limitent à un simple appel téléphonique de la part d’une infirmière en santé publique.

Afin de combler ces lacunes, on a assisté à l’apparition de divers services privés de soins postnataux, même si aucune étude n’a encore été publiée au sujet de tels services à but lucratif au Canada. Les services d’une aide en soins postnataux qui sont proposés sur Internet concernent diverses mesures de soutien concrètes et ciblées, comme les soins au nouveau-né, le soutien à l’allaitement naturel ou au biberon, les services de garde d’enfants, la préparation des repas, les tâches ménagères, etc. Malheureusement, le coût relativement élevé de ces formes de soutien ne convient qu’à ceux et celles qui en ont les moyens. Les services d’aide offerts en ligne coûtent généralement autour de 25 $ de l’heure, ou de 100 $ à 1 000 $ pour divers forfaits d’une nuit ou d’une semaine. Il faudra d’autres études dans ce domaine émergent pour préciser l’éventail des services offerts et en définir les retombées pour les mères et leur famille. Il n’existe actuellement aucun ensemble de données statistiques relativement aux usagers de tels services, sur les tendances à cet égard, ni sur les retombées associées à ces soins tarifés. De tels renseignements permettraient de mieux comprendre la nature et l’étendue des besoins réels à combler[3].

L’avenir des soins de maternité au Canada

Notre histoire montre clairement que ce sont d’abord et avant tout les sages-femmes qui ont assumé la charge des soins de maternité sur notre territoire, et ce, avant même l’arrivée des premiers colons européens et jusqu’à l’ère moderne. Non seulement les sages-femmes procuraient-elles des soins techniques essentiels, mais elles favorisaient aussi le soutien social permettant de favoriser la santé et le bien-être des femmes et de leurs nouveau-nés, à domicile comme au sein de la collectivité. Pourtant, avec la modernisation des soins de maternité, les sages-femmes tout comme l’accouchement naturel ont bientôt été délogés par la médicalisation de la naissance, les obstétriciens prenant le relais des médecins de famille pour les soins de maternité, et les services d’encadrement du travail et de l’accouchement étant dispensés dans un nombre de plus en plus restreint de centres hospitaliers. Ce système de soins modernes se caractérise notamment par un taux élevé de césariennes et, par conséquent, par un taux de morbidité inutilement élevé pour les mères. Jusqu’à présent, le retour des sages-femmes et l’intégration de celles-ci dans notre système de soins de santé se sont révélés insuffisants, puisque les sages-femmes sont encore trop peu nombreuses et concentrées dans les centres urbains, et que leurs services ne sont pas offerts équitablement selon les provinces et territoires.

Le Canada cherche encore et toujours à favoriser l’objectif no 5 des OMD. Les familles sont de plus en plus complexes et les conjoints jouent un rôle accru par rapport à la naissance et aux soins de l’enfant. Les études continuent de mettre en relief les moyens d’améliorer la santé des mères et des nourrissons. Dans un tel contexte, le système de soins de santé continuera d’évoluer et de s’adapter afin d’assurer l’accessibilité et l’efficacité des soins de maternité dans les collectivités d’un océan à l’autre.

 


Cecilia Benoit, Ph.D., est une scientifique au sein du Centre for Addictions Research of British Columbia et professeure au département de sociologie de l’Université de Victoria. Elle a été codirectrice du Réseau canadien pour la santé des femmes. Elle a également reçu le Prix du Gouverneur général en commémoration de l’affaire « personne » en 2016.

 

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NOTES

[1]     Cecilia Benoit et autres, « Medical Dominance and Neoliberalisation in Maternal Care Provision: The Evidence from Canada and Australia » dans Social Science & Medicine, 71:3 (août 2010). (Page consultée le 24 août 2015) http://bit.ly/1Jv2r5j

[2]     Cecilia Benoit et autres, « Maternity Care as a Global Health Policy Issue » dans The Palgrave International Handbook of Healthcare Policy and Governance, Ellen Kuhlmann, Robert H. Blank, Ivy Lynn Bourgeault et Claus Wendt (dir.), Basingstoke, Palgrave, 2015. http://bit.ly/1NPii1r

[3]     Cecilia Benoit et autres, « Privatisation & Marketisation of Post-birth Care: The Hidden Cost for New Mothers » dans International Journal for Equity in Health, 11:1 (octobre 2012) http://bit.ly/1ikd1BS