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Maintenant disponible : L’identité des familles, la troisième section de La famille compte 

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Maintenant disponible : L’identité des familles

Mackenzie Kolton

Mackenzie se consacre avec passion à la défense des droits des personnes 2ELGBTQIA+ et à la sensibilisation à leur réalité. Elle occupait auparavant le poste de responsable de l’innovation des programmes au sein de l’organisme Grands Frères Grandes Sœurs du Canada, où elle a participé à la création de la première formation en santé mentale centrée sur les réalités queers au Manitoba, tout en supervisant le département 2ELGBTQIA+ et son équipe. Elle a également travaillé pendant six ans avec l’organisme The Get REAL Movement, à titre de fondatrice du programme au Manitoba et de principale conférencière auprès de plus de 150 000 élèves, éducatrices et éducateurs, familles et entreprises à travers le pays. En sa qualité d’accompagnatrice de gestionnaires de haut niveau, elle a collaboré avec plus de 100 conseils scolaires nationaux, afin de les aider à mettre en place des stratégies novatrices favorables à l’inclusion.

Egale est un organisme phare au Canada pour les personnes 2ELGBTQIA+ et les défis auxquels elles sont confrontées. Nous nous employons à améliorer et à préserver des vies en misant sur la recherche, l’éducation, la sensibilisation ainsi que la défense des droits de la personne et de l’égalité, au Canada et ailleurs dans le monde. Notre travail contribue à bâtir des sociétés et des systèmes qui reflètent une vérité universelle, à savoir que toutes les personnes sont égales et qu’aucune ne devrait être mise à l’écart.

Andrew Sofin

Andrew Sofin, psychothérapeute agréé ainsi que thérapeute conjugal et familial, exerce en cabinet privé à Montréal. Il se consacre principalement à la thérapie de couple et familiale. Il porte le titre de thérapeute conjugal et familial enregistré (RMFT) de

l’Association canadienne pour la thérapie conjugale et familiale (ACTCF), est boursier en clinique de l’American Association for Marriage and Family Therapy (AAMFT) et membre de l’International Family Therapy Association (IFTA). Il est actuellement président de l’ACTCF et fondateur du Belmont Center, ainsi que des organismes Couples Retreat Ocean Coral et Couples Retreat in Montreal. Il a également cofondé l’Institut de thérapie de crise brève et l’organisme The Private Practice Consultants. Il est en outre professeur invité à l’Université de Guelph, où il donne un cours dans le cadre du Advanced Certificate in Couple and Family Therapy Studies program (programme d’études en vue de l’obtention d’un certificat supérieur en thérapie conjugale et familiale). Il possède plus de 25 ans d’expérience en gestion dans le secteur sans but lucratif, l’entrepreneuriat en santé mentale, la pratique privée, les programmes de traitement en établissement et les milieux hospitaliers à Boston et à Montréal.

À propos de l’organisme : L’ACTCF est une association professionnelle composée de personnel clinicien et enseignant ainsi que de membres de la communauté de la recherche spécialisés en thérapie relationnelle et systémique. L’ACTCF réglemente et supervise la certification des membres (RMFT) ainsi que la formation continue, établit des normes d’agrément pour les programmes d’études supérieures en thérapie conjugale et familiale, en plus d’observer un code de déontologie et des normes de pratique.

Nicole Denier

Nicole Denier est sociologue et se spécialise dans le travail, les marchés du travail et les inégalités. Elle a dirigé des projets primés sur les liens entre la diversité familiale et les inégalités sur le plan économique, notamment des recherches sur le bien-être économique des personnes 2ELGBTQI+ au Canada et des immigrantes et immigrants en Amérique du Nord. Nicole est actuellement professeure agrégée en sociologie à l’Université de l’Alberta. Elle est codirectrice du programme de bourses pour les personnes en début de carrière du Work and Family Researchers Network et fait partie des comités de rédaction des revues Canadian Studies in Population et Canadian Review of Sociology/Revue canadienne de sociologie.

Gaëlle Simard-Duplain 

Gaëlle Simard-Duplain est professeure adjointe au Département de sciences économiques de l’Université Carleton. Ses travaux de recherche portent sur les facteurs qui ont une incidence sur la santé et la situation sur le marché du travail. Elle s’intéresse particulièrement à la relation entre les politiques et l’atténuation ou l’exacerbation des inégalités chez les familles, à la fois dans la dynamique au sein des ménages et dans les mécanismes de transmission intergénérationnelle. Pour ce faire, elle a principalement recours à des sources de données administratives, parfois liées à des données d’enquête ou à des méthodes de recherche quasi expérimentales. Gaëlle est titulaire d’un doctorat en sciences économiques de l’Université de Colombie-Britannique.

Kim de Laat

Kim de Laat est sociologue et professeure adjointe en organisation et en comportement humain à la Stratford School of Interaction Design and Business de l’Université de Waterloo. Ses recherches portent sur les dimensions temporelles et spatiales du travail – soit la durée du travail et l’endroit où il est effectué – et leur relation avec les inégalités raciales et de genre. Kim mène actuellement deux projets de recherche. Le premier s’intéresse à la manière dont les parents exerçant des métiers créatifs parviennent à concilier leurs responsabilités parentales tout en poursuivant leur pratique artistique. Le second étudie dans quelle mesure les modalités de travail flexibles, telles que le travail hybride et le télétravail, ont une influence sur la répartition du travail – à la fois le travail rémunéré au bureau ainsi que les tâches domestiques et les soins aux enfants non rémunérés à la maison.

Donna S. Lero

Donna S. Lero est professeure émérite et titulaire de la première Chaire Jarislowsky sur les familles et le travail à l’Université de Guelph, où elle a cofondé le Centre pour les familles, le travail et le bien-être. Elle mène des recherches dans les domaines des politiques sociales, du travail et de la famille, et de la prestation de soins. Ses projets actuels portent sur l’emploi maternel et les modes de garde des enfants, les politiques en matière de congé parental, et l’incapacité et l’emploi. Elle participe également au projet Inclusive Early Childhood Service System (IECSS) ainsi qu’au projet du CRSH, Réinventer les politiques soins/travail.

Liv Mendelsohn

Liv Mendelsohn, M.A., M.Ed., est directrice générale du Centre canadien d’excellence pour les aidants, où elle dirige des initiatives en matière d’innovation, de recherche, de politiques et de programmes visant à soutenir les personnes aidantes et les prestataires de soins au Canada. Leader visionnaire comptant plus de 15 ans d’expérience dans le secteur à but non lucratif, Liv est aidante depuis fort longtemps et vit elle-même avec un handicap. Son expérience en tant que membre de la « génération sandwich » alimente son aspiration envers la création d’un mouvement pour les personnes aidantes au Canada afin de changer la façon dont la prestation de soins est perçue, valorisée et soutenue.

Au cours de sa carrière, Liv a fondé et dirigé plusieurs organismes axés sur l’incapacité et la prestation de soins, notamment le Wagner Green Centre for Accessibility and Inclusion ainsi que le festival du film de Toronto ReelAbilities. Liv est présidente du comité consultatif sur l’accessibilité de la Ville de Toronto. Elle a reçu le Prix pour l’équité décerné par la Ville de Toronto et a été reconnue pour son leadership par la University College, l’Université de Toronto, l’organisme Enfants avenir Ontario et les centres communautaires juifs d’Amérique du Nord. Liv est agrégée supérieure de recherche au Massey College et diplômée du Mandel Institute for Non-Profit Leadership ainsi que du programme de bourses DiverseCity de la CivicAction Leadership Foundation.

À propos de l’organisme : Le Centre canadien d’excellence pour les aidants appuie et habilite les personnes aidantes et les prestataires de soins, favorise l’avancement des connaissances et la capacité d’agir dans le domaine des soins, et plaide en faveur de politiques sociales efficaces et visionnaires, tout en privilégiant une approche qui se veut à l’écoute des personnes ayant une incapacité. Notre expertise et nos connaissances, tirées des expériences vécues des personnes aidantes et des prestataires de soins, nous aident à faire campagne pour de meilleurs systèmes et un changement durable. Nous sommes plus qu’un simple bailleur de fonds; nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires et nos bénéficiaires pour atteindre des objectifs communs.

Barbara Neis

Barbara Neis est professeure titulaire émérite de la Chaire John Lewis Paton et professeure-chercheuse honoraire (à la retraite) du Département de sociologie de l’Université Memorial. Barbara a obtenu son doctorat en sociologie à l’Université de Toronto en 1988. Elle s’intéresse principalement aux interactions entre le travail, l’environnement, la santé, les familles et les communautés dans les milieux marins et côtiers. Elle a cofondé et codirigé le SafetyNet Centre for Occupational Health and Safety à l’Université Memorial et a été présidente de l’Association canadienne de la recherche en santé et sécurité au travail. Depuis les années 1990, elle a mené, supervisé et soutenu d’importants programmes de recherche en collaboration avec l’industrie de la pêche à Terre-Neuve-et-Labrador, notamment dans les domaines suivants : les connaissances des pêcheurs, les sciences et la gestion marines, la santé et la sécurité au travail, la reconstruction des pêcheries effondrées, et le genre et la pêche. Entre 2012 et 2023, elle a dirigé le Partenariat en mouvement, financé par le CRSH, un vaste programme de recherche multidisciplinaire explorant la dynamique de la mobilité professionnelle prolongée/complexe liée à l’emploi dans le contexte canadien, notamment son incidence sur les travailleuses et travailleurs et leur famille, les employeurs et les communautés.

Deborah Norris

Titulaire de diplômes supérieures en sciences familiales, Deborah Norris est professeure au Département d’études de la famille et de gérontologie de l’Université Mount Saint Vincent. Son intérêt persistant envers l’interrelation entre le travail et la vie de famille a amené Deborah à s’investir très tôt dans l’élaboration de programmes d’éducation à la vie familiale au Centre de ressources pour les familles des militaires (CRFM) de la Base des Forces canadiennes (BFC) d’Halifax. Les connaissances acquises au cours de ses échanges avec les participantes et participants aux programmes ont été les étincelles qui ont déclenché chez elle un inébranlable engagement à en apprendre davantage sur la vie des familles des militaires, qui ont été le fil conducteur de ses recherches tout au long de sa carrière. S’inspirant des théories écologique et critique, le programme de recherche de Deborah se veut pratique, collaboratif et interdisciplinaire. Elle a dirigé des études portant sur la résilience chez les familles des militaires et des vétéranes et vétérans; l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle chez les familles des militaires; la relation bidirectionnelle entre les blessures de stress opérationnel et la santé mentale et le bien-être des familles des vétéranes et vétérans; les programmes de psychoéducation familiale pour les familles des militaires et des vétéranes et vétérans; et la transition entre la vie militaire et la vie civile. Elle a collaboré avec des spécialistes du milieu universitaire, des scientifiques du ministère de la Défense nationale (MDN), des membres du personnel d’Anciens Combattants Canada (ACC) ainsi que d’autres parties prenantes. Récemment, elle a élargi son programme de recherche afin de mettre l’accent sur les effets que peut avoir le stress opérationnel sur les familles du personnel de la sécurité publique.

Susan Prentice

Susan Prentice est professeure du programme d’études gouvernementales Duff Roblin à l’Université du Manitoba, où elle enseigne la sociologie. Elle se spécialise dans les politiques familiales, et plus particulièrement dans les politiques liées à la garde des enfants. Elle a publié de nombreux travaux sur les politiques familiales et liées à la garde des enfants, dont les plus récents sont accessibles sur sa page de profil de l’UM. Elle donne des cours sur les politiques familiales aux premier et deuxième cycles universitaires. Susan travaille en étroite collaboration avec des groupes provinciaux et nationaux qui font la promotion des services de garde et est membre du comité de direction de la Child Care Coalition of Manitoba.

Diane-Gabrielle Tremblay

Diane-Gabrielle Tremblay est professeure d’économie et de sociologie du travail, ainsi que de gestion des ressources humaines à l’Université TÉLUQ (Université du Québec). Elle a été nommée présidente de la Chaire de recherche du Canada sur les enjeux socio-organisationnels de l’économie du savoir en 2002 et directrice de l’Alliance de recherche universités-communautés (ARUC) sur la gestion des âges et des temps sociaux en 2009 (www.teluq.ca/aruc-gats). Elle a été nommée Membre de la Société royale du Canada (MSRC) ainsi que du Centre d’excellence de l’Université du Québec, en reconnaissance de la qualité de ses recherches et de ses publications. Ses travaux portent sur la conciliation travail-famille, l’organisation du travail (télétravail, cotravail) et l’aménagement du temps de travail. Diane-Gabrielle a publié de nombreux ouvrages, dont un manuel sur l’économie du travail, un manuel de sociologie du travail, trois livres sur le temps de travail et la conciliation travail-famille, ainsi que des articles dans diverses revues internationales.

Shelley Clark

Shelley Clark, démographe et professeure lauréate du prix James-McGill en sociologie, mène des recherches sur le genre, la santé, les dynamiques familiales et les périodes transitoires de la vie. Après avoir obtenu son doctorat à la Princeton University en 1999, Shelley a travaillé à titre d’adjointe de programme du Population Council à New York (1999-2002) et de professeure adjointe à la Harris School of Public Policy de la University of Chicago (2002-2006). À l’été 2006, elle a intégré le Département de sociologie de l’Université McGill, où elle est devenue en 2012 la directrice fondatrice du Centre de recherche sur la dynamique des populations. Une grande partie de ses recherches au cours des 20 dernières années se sont intéressées à la manière dont les adolescentes et adolescents d’Afrique subsaharienne effectuent leurs principales transitions vers l’âge adulte alors qu’il y sévit une épidémie persistante de VIH/sida. D’autres travaux ont permis de mettre en relief les vulnérabilités sociales, économiques et sanitaires des mères célibataires et de leurs enfants en Afrique subsaharienne. Récemment, Shelley s’est lancée dans un nouveau programme de recherche visant à évaluer les inégalités entre les régions rurales et urbaines ainsi que les dynamiques familiales aux États-Unis et au Canada. Ses découvertes soulignent la diversité des structures familiales dans les régions rurales ainsi que les conséquences d’un accès limité à la contraception sur la fécondité et la santé reproductive des femmes de ces régions.

Lindsey McKay

Lindsey McKay est professeure adjointe en sociologie à l’Université Thompson Rivers de Kamloops, en Colombie-Britannique. Elle est sociologue et spécialiste en économie politique féministe, orientée vers le travail de soins, la santé et la médecine, ainsi que la science de l’enseignement et de l’apprentissage. C’est la justice sociale qui inspire ses travaux de recherche et ses pratiques d’enseignement. Elle a publié de nombreux articles traitant des inégalités en matière de congés parentaux, du don d’organes, des programmes d’étude et de la pédagogie dans diverses revues à comité de lecture ainsi que sur différentes plateformes publiques. Elle est cochercheuse dans le projet Réinventer les politiques soins/travail, financé par le CRSH et axé sur le congé parental.

La réalité des mères travailleuses-navetteuses (Families, Mobility, and Work)

Résumé d’un chapitre sur les répercussions du travail par navettage aéroporté (« fly-in, fly-out ») en lien avec la maternité

9 novembre 2022

Dans le chapitre « A Juggling Act: Mothering While FIFO » (Être mère et travailleuse‑navetteuse : une véritable prouesse), les auteures Griffin Kelly, Maria Fernanda Mosquera Garcia et Sara Dorow, Ph. D., posent un regard sur la réalité et la résilience des « mères travailleuses‑navetteuses ». Elles mettent en relief l’expérience du rôle de mère chez ces femmes qui doivent régulièrement faire la navette aérienne jusque dans l’Ouest canadien (en Alberta et en Colombie-Britannique) pour y travailler. Comme en témoignent les quatre récits qu’elles mettent en lumière, ces conditions engendrent diverses difficultés au fil de la vie pour les femmes qui veulent devenir mères ou qui le sont déjà.

Ce chapitre constitue l’une des nombreuses contributions au livre Families, Mobility, and Work, un recueil d’articles et d’autres produits de connaissance basés sur les travaux de recherche du Partenariat en mouvement. Publié en septembre 2022 par les presses universitaires de l’Université Memorial, cet ouvrage est maintenant disponible en version imprimée, en format électronique ainsi que gratuitement, en libre accès, sur son site Web.

« Quand on est travailleuse-navetteuse, il faut savoir gérer le “soi” qui appartient au campement et l’autre qui reste à la maison, mais les responsabilités maternelles créent des conflits et des obstacles entre ces deux réalités, notamment lorsque l’on tente d’entrevoir l’avenir au-delà des rôles liés au travail et à la maternité. […] ce stress et ces ajustements surviennent dans des espaces-temps distincts où s’entremêlent les impératifs des cycles de croissance-décroissance, et sollicitent encore davantage les réseaux de soins majoritairement féminins, en faisant souvent appel aux mères de ces travailleuses-navetteuses. » [traduction] – Griffin Kelly, Maria Fernanda Mosquera Garcia et Sara Dorow, Ph. D.

Accédez au livre Families, Mobility, and Work (en anglais seulement)

Résumé du chapitre

Il n’existe que peu d’études sur la réalité des femmes de métier en situation de mobilité pour le travail, encore moins à propos des répercussions de cette mobilité sur leur vie de famille (sauf peut-être les travaux récents de Nagy et Teixeira, 2020). Certaines études se sont penchées sur la réalité des femmes, des familles et des mères dans le contexte du navettage aérien pour le travail (« fly-in fly-out »), en se concentrant toutefois sur les épouses de travailleurs-navetteurs (Kaczmarek et Sibbel, 2008; Swenson et Zvonkovic, 2016). La situation des travailleuses-navetteuses employées comme professionnelles ou dans des campements n’a quant à elle été abordée que dans une certaine mesure. Notre rapport est axé sur les constatations de deux études actuelles sur les femmes de métier, principalement dans le secteur des sables bitumineux albertains, en vue de dépeindre la réalité associée au « rôle de mère chez les travailleuses-navetteuses ». Nous proposons quatre mises en situation afin d’illustrer et de personnaliser les difficultés et l’exclusion vécues par certaines travailleuses-navetteuses du secteur de l’extraction dans l’Ouest du Canada, et ce, à différents stades : durant la grossesse au travail, avec de jeunes enfants à élever, et dans le cadre de conflits sur la garde des enfants. Ces récits témoignent de l’importance de s’intéresser aux politiques et aux pratiques des employeurs qui peuvent faire obstacle au travail de ces travailleuses-navetteuses.

À propos des auteures

Griffin Kelly est diplômée du programme de maîtrise du Département de sociologie de l’Université de l’Alberta, où elle a rédigé une thèse sur la réalité des femmes de métier et le harcèlement sexiste parmi les travailleurs des sables bitumineux de l’Alberta.

Maria Fernanda Mosquera Garcia est étudiante à la maîtrise en sociologie de l’Université de l’Alberta. Ses travaux de recherche sont axés sur les réalités liées au déplacement forcé des Latino-Américains et à leur établissement au Canada. Elle agit également à titre d’adjointe de recherche dans le cadre du projet sur la mobilité pour le travail et la santé mentale. Elle a par ailleurs participé au « Prison Project » de l’Université de l’Alberta comme adjointe de recherche.

Sara Dorow, Ph. D., M.A., B.A., est professeure et présidente du Département de sociologie de l’Université de l’Alberta, où elle enseigne et mène des recherches dans divers domaines, notamment la mobilité, la migration, la famille, le travail et le genre, en misant sur des méthodes qualitatives et une approche multidimensionnelle. Elle a dirigé l’équipe albertaine responsable du Partenariat en mouvement dans le cadre de ses travaux de longue date sur la dimension sociale associée à l’exploitation des sables bitumineux dans la région. Ses travaux de recherche antérieurs ont aussi porté sur la famille, la race et le genre en lien avec l’adoption internationale.

Recherche en bref : Les travailleurs mobiles en Alberta pendant la pandémie de COVID‑19

Gaby Novoa

28 mai 2020

L’industrie des sables bitumineux de l’Alberta ayant été désignée comme service « essentiel » le 2 avril 2020, de nombreux travailleurs par navette de l’industrie n’ont cessé de voyager et de passer de longues périodes sur les sites de travail, dans des milieux souvent bondés, et ce, dans un contexte de pandémie. Bien que ces conditions soient antérieures à l’apparition du coronavirus et qu’elles aient déjà fait l’objet de recherches par le Partenariat en mouvement, elles ont de nouvelles incidences qui auront un impact sur les travailleurs, leur famille, leur communauté d’origine et les employeurs.

Dans l’article intitulé « COVID-19 and (Im)Mobile Workers in Alberta’s ‘Essential’ Oil Industry1 », Sara Dorow, Ph. D., cochercheuse du Partenariat en mouvement, met en lumière certaines expériences de ces travailleurs et partage des recherches portant sur les répercussions sanitaires et sociales de ce contexte de travail en pleine période de pandémie.

L’incidence des déplacements continus sur la santé publique et les relations familiales pendant la pandémie

Les déplacements continus entre les sites d’exploitation des sables bitumineux en Alberta et les communautés d’origine des travailleurs de partout au Canada augmentent le risque de transmission. En mai 2020, parmi plus de 100 cas confirmés de COVID‑19 associés à un site d’exploitation de sables bitumineux, le quart des personnes touchées résidaient à l’extérieur de l’Alberta. Par ailleurs, Sara Dorow explique que la propagation du virus n’est que l’un des enjeux actuels associés au travail mobile. Les industries fondées sur le travail par navette peuvent nuire aux relations que les travailleurs entretiennent avec leur famille, leurs amis et leur communauté. La recherche a démontré que cette pression peut avoir un impact non seulement sur les relations des gens, mais aussi sur de nombreux aspects liés à leur santé physique et mentale.

Étant donné que les déplacements ont été restreints, voire interdits en raison des mesures de santé publique visant à prévenir la propagation virale, de nombreux travailleurs sont confrontés à des roulements plus longs et donc à des séjours prolongés dans des campements de travailleurs, éloignés de leur famille pendant des périodes pouvant atteindre quelques mois. Les familles s’adaptent de manière créative pour rester en contact et gérer leurs responsabilités, mais la tâche peut parfois s’avérer difficile2.

La pandémie exacerbe les difficultés préexistantes dans les campements de travailleurs

Sara Dorow souligne que la pandémie ne fait qu’exacerber les difficultés associées à l’environnement du campement de travail, dans lequel les travailleurs navetteurs interrogés disent se sentir emprisonnés ou avoir la sensation d’être perçus comme du bétail. Selon la saison et le prix du pétrole, les campements peuvent être assez bondés. Même lorsqu’ils sont moins occupés, les campements sont aménagés autour de quartiers rapprochés afin que les résidents puissent partager des espaces communs, comme des salles à manger, des gymnases et parfois des salles de bain, ceux-ci se déplaçant quotidiennement à bord de bus-navettes.

Ce manque d’espace est crucial, car la recherche a démontré que les logements surpeuplés peuvent avoir des répercussions négatives sur la santé physique et psychique. Sara Dorow souligne également que les services essentiels dans ces campements de travail sont assurés par des travailleurs de première ligne qui sont responsables de l’hébergement, du nettoyage et des soins – tous des travailleurs mobiles qui font également partie du roulement entre les campements, et qui vivent également de longues périodes d’immobilité sur le site.

Les industries fondées sur le travail par navette, comme celle des sables bitumineux, peuvent rendre la distanciation sociale difficile. De plus, au‑delà du contexte pandémique actuel, ces environnements de travail présentent également des risques systémiques pour la santé. La pression qu’exercent le travail mobile et les longs séjours sur place sur les relations des travailleurs doit également être reconnue et analysée en profondeur. Sara Dorow mentionne certains facteurs qui seraient susceptibles d’atténuer l’ampleur de ces difficultés, comme l’accès à une nourriture saine, des programmes de jumelage et des roulements de travail permettant aux gens de passer plus que quelques jours à la fois chez eux. La restructuration et la refonte de ces sites et de ces systèmes peuvent contribuer à assurer la sécurité et le bien-être des travailleurs, de leur famille et de leur communauté d’origine.

Gaby Novoa est responsable des communications à l’Institut Vanier de la famille.

Consultez l’article « COVID-19 and (Im)Mobile Workers in Alberta’s ‘Essential’ Oil Industry » par Sara Dorow, Ph. D.

 


Notes

  1. Recherche en bref de l’article de Sara Dorow, Ph. D., « COVID-19 and (Im)Mobile Workers in Alberta’s ‘Essential’ Oil Industry », Partenariat en mouvement (20 mai 2020).
  2. Sara Dorow et Shingirai Mandizadza, « Réseaux d’entraide : la mobilité, le travail et la gestion des relations familiales », L’Institut Vanier de la famille (10 janvier 2017).

Coup d’œil sur les soins familiaux et le travail au Canada

Il y a fort à parier qu’un jour ou l’autre, chacun sera appelé à fournir des soins à un proche, et probablement à en recevoir aussi. En règle générale, c’est aux membres de la famille que reviennent d’abord ces responsabilités, c’est-à-dire celles de fournir et d’encadrer les soins, et parfois aussi d’en payer la note.

Les familles disposent d’une étonnante capacité d’adaptation et trouvent la plupart du temps divers moyens pour mener de front leurs multiples responsabilités, obligations et engagements sur les plans familial et professionnel. Cependant, il faut parfois beaucoup de temps, d’énergie et de ressources financières pour conjuguer les soins et le travail. À cet égard, les employeurs sont appelés à jouer un rôle important pour faciliter les choses grâce à des mesures d’adaptation et en faisant preuve d’innovation et de flexibilité.

Le document intitulé Coup d’œil sur les soins familiaux et le travail au Canada s’intéresse à certains contextes familiaux et tendances qui illustrent la « réalité des soins » au pays, en soulignant l’interrelation et la corrélation entre les diverses responsabilités liées à la famille, aux soins et au travail, ainsi que les liens d’interdépendance qui les unissent.

Quelques faits saillants

  • 28 % des Canadiens (8,1 millions de personnes) disent avoir fourni des soins à un ami ou à un proche ayant un problème de santé chronique, une incapacité ou des difficultés liées au vieillissement au cours de la dernière année.
  • Les trois quarts des aidants familiaux (6,1 millions de personnes) faisaient partie de la population active durant la même période, ce qui représentait 35 % de TOUS les Canadiens en emploi.
  • La plupart des aidants interrogés (83 %) évoquent leur expérience en termes positifs et 95 % indiquent qu’ils s’accommodent plutôt bien de leurs responsabilités liées aux soins.
  • 44 % des aidants en emploi déclarent avoir manqué 8 ou 9 journées de travail en moyenne au cours des 12 derniers mois en raison de leur charge de soins.
  • Plus du tiers des jeunes aidants (36 %) disent arriver en retard au travail, devoir partir plus tôt ou prendre congé pour veiller à leurs responsabilités d’aidants.
  • Au pays, les pertes de productivité assumées par les employeurs en raison de l’absentéisme lié aux soins sont estimées à 5,5 milliards de dollars annuellement.
  • Les études ont montré que les soins bénéficient aux aidants à plusieurs égards, notamment en leur procurant un sentiment d’épanouissement personnel, en donnant un sens et un but à leurs actions, en consolidant les relations familiales et en favorisant l’empathie et l’acquisition de compétences.

 

La conciliation harmonieuse des soins et du travail dépend de la volonté de l’employeur de comprendre, de respecter et de reconnaître que les circonstances familiales de l’employé nécessitent parfois une attention soutenue. Les études ont montré que l’adoption de politiques inclusives, flexibles et adaptées bénéficie autant aux employés qu’à leur employeur, et que ces retombées sont optimales lorsque l’employé comprend bien le processus de traitement des demandes individuelles d’accommodation ou de modalités de travail personnalisées.

Un jour ou l’autre, la grande majorité des Canadiens auront probablement à fournir des soins à leur entourage. De telles responsabilités ne sont pas toujours prévisibles et exigent une disponibilité qui empiète souvent sur les heures de travail. C’est en faisant preuve d’ouverture et d’innovation pour concilier les soins et le travail par une approche flexible qu’il sera possible de favoriser le mieux-être des employés et des employeurs tout en contribuant à l’économie et à la société.

Téléchargez le document Coup d’œil sur les soins familiaux et le travail au Canada publié par l’Institut Vanier de la famille.

Rapport : Symposium sur les femmes et le milieu de travail

En mai 2019, l’Institut Vanier a pris part à un symposium organisé par Emploi et Développement social Canada, qui a eu lieu à la Rotman School of Management de l’Université de Toronto. Cet événement de deux jours réunissait 240 dirigeants et champions canadiens de l’égalité entre les sexes et de la diversité en milieu de travail, qui ont échangé et discuté sur les meilleures pratiques à instaurer pour stimuler et faire progresser la participation des femmes en milieu de travail.

Un rapport fondé sur ces discussions inspirantes est maintenant disponible, et l’on y présente des stratégies et des ressources que les employeurs peuvent utiliser pour faire progresser la participation des femmes en milieu de travail, notamment trois éléments clés visant à favoriser l’égalité entre les sexes et la diversité en milieu de travail au Canada :

  • La sensibilisation accrue par rapport à l’égalité entre les sexes et la remise en question des mythes répandus;
  • Le changement des structures plutôt que des personnes;
  • L’adoption d’une approche intersectionnelle de l’égalité entre les sexes en milieu de travail.

Le rapport Les femmes et le milieu de travail – Comment les employeurs peuvent faire progresser l’égalité et la diversité – Rapport du Symposium sur les femmes et le milieu de travail est maintenant disponible sur le site Web d’EDSC (également disponible en format PDF).

 

Recherche en bref : La prestation de soins au sein des familles des militaires et des vétérans

Alla Skomorovsky, Jennifer Lee et Lisa Williams

Téléchargez (PDF)

Les recherches le démontrent : les vétérans canadiens qui passent à la vie civile en raison d’une maladie ou d’une blessure éprouvent souvent de la difficulté à s’adapter à leur nouvelle situation. Toutefois, un nombre croissant d’études universitaires révèlent que « la force derrière l’uniforme » – les familles des militaires et des vétérans qui fournissent des soins à ces derniers – peut également être affectée par le bien-être et les expériences de transition du membre des Forces armées canadiennes (FAC)1, 2.

Selon la gravité de la maladie ou de la blessure, les militaires ont parfois besoin d’aide pour s’acquitter des activités quotidiennes (p. ex. : l’entretien du terrain, la préparation des repas, les services de nettoyage) et les membres de la famille sont souvent les premiers à prodiguer, à organiser et/ou à défrayer ces soins, qui peuvent varier en termes d’intensité, de durée et de fréquence. Au fur et à mesure que le militaire ou le vétéran malade ou blessé de la famille s’adapte aux contraintes que la maladie ou la blessure lui impose, à lui et à son nouveau mode de vie civile, il est possible que ses relations familiales se teintent d’une certaine tension.

Au sein des familles des militaires, les conjoints des militaires sont généralement les principaux fournisseurs de soins, et cette tâche peut avoir une incidence négative sur leur propre santé, leur bien-être et leur carrière. Par ailleurs, les recherches démontrent que la prestation de soins à l’égard d’un militaire atteint de maladies psychologiques peut s’avérer particulièrement éprouvante pour les aidants en plus d’accroître le risque ou l’étendue de leur propre détresse psychologique, en raison de la dépendance accrue du militaire à leur égard pour les tâches et le soutien cognitif ou émotionnel.

Peu d’études ont examiné les expériences, les perceptions et les impacts uniques à la transition vers la vie civile sur les familles du personnel des FAC ou des vétérans, plus particulièrement ceux qui ont été libérés pour des raisons médicales en lien avec une maladie ou des blessures. Toutefois, une étude pilote menée en 2014-2015 auprès des familles des FAC qui vivaient une transition vers la vie civile a suggéré que les effets cumulatifs de la maladie ou des blessures d’un militaire combinés à sa transition vers la vie civile pouvaient avoir une incidence significative sur divers aspects de la dynamique familiale3.

Dans la foulée des études mentionnées précédemment, le Directeur général – Recherche et analyse (Personnel militaire) (DGRAPM) a réalisé, en 2017-2018, une enquête visant à explorer et à améliorer notre compréhension de ce que vivent les familles des militaires ou des vétérans malades ou blessés à diverses étapes du processus de libération pour raisons médicales, dans le cadre de leur transition de la vie militaire à la vie civile, par une série d’entrevues semi-structurées4.

La maladie et les blessures affectent le bien-être de la famille et les relations familiales

Conformément aux autres études, les entrevues ont indiqué que la santé des membres des FAC et des vétérans avait une incidence directe sur le bien-être des membres de la famille, plus particulièrement lorsque les membres de la famille assument un rôle d’aidant pour le militaire ou le vétéran.

[Comme mentionné par les parents d’un militaire ou d’un vétéran] : Parce que c’était vraiment difficile à l’époque, ce fut un véritable combat. La première fois qu’il est rentré de sa toute première sortie a vraiment été difficile. Ce que je veux dire, c’est qu’il a perdu deux conjointes. Il a vécu deux ruptures familiales en raison de son TSPT. [traduction]

Les militaires et les vétérans ont également constaté l’impact qu’ils avaient sur les membres de leur famille, y compris sur leurs enfants.

Ma fille, qui a 21 ans, est probablement celle qui a été la plus affectée par mon état, en raison de ce qu’elle m’a vu traverser. Et ça a été très difficile pour elle… À cause de mon anxiété, de ma dépression et tout ça… Elle souffre maintenant d’anxiété et de dépression. [traduction]

La plupart des conjoints ont relié la tension exercée sur leur bien-être familial, social et personnel principalement à la maladie ou aux blessures du militaire ou du vétéran, et non à la transition elle-même.

Je crois que tout est en lien avec l’ensemble du processus… L’un des membres de votre famille fait face à ses propres problèmes de santé mentale, mais il ne recherche pas de traitement actif pour ses problèmes, et il se dit que… vous savez, avec sa dépression, son anxiété ou son TSPT. Alors le partenaire doit prendre le relais dans le ménage. C’est difficile de porter ça tout le temps. [traduction]

Des familles ont mentionné avoir vu leurs relations avec le militaire ou le vétéran des FAC devenir plus tendues. Plus précisément, plusieurs membres de ces familles, qui étaient également des conjoints, ont ressenti un manque de satisfaction et d’intimité dans leurs relations avec le militaire ou le vétéran, en plus d’éprouver un éloignement émotionnel ou du ressentiment.

Il n’avait plus aucun intérêt pour le sexe, et cela a complètement transformé notre relation. Et comme nous étions un couple, cela a été difficile à surmonter… la perte d’intimité avec son partenaire.

Dans l’intimité, il était un peu distant émotionnellement, vraiment plus distant, en fait. C’était comme s’il était à l’extérieur et qu’il regardait vers l’intérieur.

Je contribue plus qu’à mon tour. Et en fait, si je repense à toute cette situation, il y a des moments où… je voudrais qu’il participe plus à ses soins que je ne le fais moi-même. Alors oui, il y a un peu de ressentiment dans tout ça, si je suis vraiment honnête avec moi-même. [traduction]

La prestation de soins interfère avec d’autres responsabilités familiales et les perturbe

Les membres de la famille qui fournissent des soins au militaire ou au vétéran malade ou blessé – principalement les conjoints – ont mentionné que le fardeau des aidants était un facteur important qui contribuait à affaiblir leur santé physique ou à réduire leur bien-être psychologique. On mentionne, entre autres, les exigences cognitives et physiques supplémentaires imposées aux aidants, comme la surveillance constante du membre des FAC ou du vétéran, l’aide physique apportée au membre des FAC ou du vétéran pour accomplir ses activités quotidiennes et la prise en charge des tâches auparavant partagées (p. ex. : le jardinage, la préparation des repas, le ménage).

Il est incapable physiquement de faire ce qu’il faisait auparavant, avant d’être blessé, alors je me charge maintenant de… tout – principalement sur le plan physique – dans la maison. Et j’ai fini par me blesser au dos à cause de cela. Il faut bien que quelqu’un s’occupe de toutes ces tâches… alors j’ai fini par me blesser au dos et maintenant, je ne peux même plus travailler à cause de cela. [traduction]

Certains aidants conjugaux ont également souligné qu’ils se sentaient émotionnellement et mentalement épuisés en raison des responsabilités accrues et du manque de temps dont ils disposaient pour s’occuper d’eux-mêmes. Parmi les autres conséquences de la prestation de soins, on note les effets négatifs sur la santé et les répercussions sur le travail.

Je crois que cela crée de l’isolement chez l’aidant. Par exemple, je voulais être présente pour mon époux et conjoint. Je voulais prendre soin de lui, lui offrir tout ce dont il a besoin, mais ensuite… je ne dis pas que c’est la faute des autres, mais est-ce qu’il est possible d’avoir une pause?

J’ai l’impression que je ne reçois aucun soutien, alors je m’occupe de tout cela par moi-même, vous savez. J’ai l’impression que je porte le poids de… de tout le ménage… J’ai l’impression que je dois m’occuper de tout toute seule. Alors j’ai l’impression de sacrifier ma propre santé. [traduction]

Comparativement aux aidants conjugaux, les parents qui prodiguaient des soins ont précisé que la maladie ou la blessure du militaire ou du vétéran n’affectait généralement pas leur vie personnelle ni leur santé. Toutefois, cela pourrait s’expliquer par le fait que les soins offerts sont moins fréquents et que les parents ont une moins grande proximité avec le bénéficiaire.

La communication entre les partenaires peut atténuer l’impact de la prestation de soins

Malgré les effets négatifs qu’ont eus la prestation de soins, l’expérience de transition et la maladie ou la blessure sur leur relation conjugale, plusieurs aidants conjugaux ont également observé une croissance dans leur relation. D’après les participants de l’étude, une communication de qualité et claire au sein de leur relation a été un facteur important qui semble avoir eu un impact sur la gravité des effets négatifs. Suivant leur expérience commune de transition et de communication, plusieurs aidants conjugaux ont indiqué s’être rapprochés du membre des FAC ou du vétéran, en plus d’être devenus une équipe plus forte. Il est donc possible qu’une communication efficace renforce la tolérance des conjoints à l’égard des responsabilités et du fardeau supplémentaires liés à la prestation de soin.

Nous sommes devenus presque davantage une équipe qu’un couple. Qu’est-ce qu’on doit faire? Bon d’accord, comment devrions-nous le faire? Alors oui, notre vie se concentre principalement sur ça.

La communication est la clé ici, plus particulièrement dans le cadre d’une relation. [traduction]

Les leçons tirées et la voie à suivre

Cette étude a permis de faire la lumière sur ce que vivent les familles des FAC pendant la transition vers la vie civile. Les résultats démontrent que l’expérience de la transition ne touche pas seulement le militaire ou le vétéran – elle affecte également les membres de sa famille ainsi que ses aidants. La plupart des membres de ces familles, et plus particulièrement les aidants, ont signalé avoir ressenti de la détresse et un malaise au cours du processus de transition, mais la plupart des rapports liés au déclin du bien-être physique, psychologique et social ont été attribués aux conséquences de la maladie ou de la blessure.

Certaines limites méthodologiques importantes de la présente étude doivent être prises en compte dans l’interprétation des résultats. Tout d’abord, l’étude a été réalisée en supposant que tous les membres des FAC et des vétérans malades ou blessés qui participaient à l’étude avaient des besoins liés à la prestation de soins et disposaient d’un aidant (p. ex. : un conjoint, un frère ou une sœur, un parent) parce qu’ils avaient été libérés de leur service militaire pour des raisons médicales, et cela a influencé l’élaboration des questions posées pendant les entrevues. Toutefois, il est devenu évident au fil des entrevues que certains membres des FAC ou vétérans libérés ne disposaient d’aucun aidant, ou qu’ils ne considéraient pas nécessairement avoir besoin de soins, même s’ils souffraient de diverses limitations en raison de leur maladie ou de leur blessure. Deuxièmement, bien qu’un nombre important de membres des FAC ou de vétérans aient participé à l’étude, ils en étaient à différentes étapes de leur transition. En raison de la durée de l’entrevue, il a été impossible d’inclure certaines questions détaillées sur chaque étape du processus de transition. Enfin, en raison de la méthodologie qualitative utilisée dans cette étude, les résultats ne sont pas représentatifs de la population dans son ensemble.

Pour pallier ces limites et tirer parti de cette étude, le DGRAPM a élaboré un programme de recherche exhaustif en lien avec les familles des militaires, qui collabore étroitement avec d’autres organismes gouvernementaux, notamment Anciens Combattants Canada et Statistique Canada. Ce corpus de recherches vise à améliorer la vie du personnel militaire, des vétérans et de leur famille partout au pays.

En examinant les défis que vivent les familles des membres des FAC ou des vétérans malades ou blessés, cette étude propose des orientations visant à améliorer l’expérience de la transition chez les familles des militaires ainsi qu’à maintenir leur bien-être global. Puisque les libérations pour raisons médicales semblent être en hausse depuis 20135, cette question revêt une importance croissante pour les vétérans, leur famille et la société canadienne dans son ensemble. Il est essentiel de continuer d’approfondir l’expertise nécessaire pour soutenir ces familles et de trouver des moyens pour assurer le bien-être individuel et familial des membres des FAC et des vétérans.

Alla Skomorovsky, Ph. D., est psychologue en recherche pour le compte du Directeur général – Recherche et analyse (Personnel militaire) (DGRAPM), où elle est membre de l’équipe des programmes sur les politiques sociales et le soutien à la famille. Elle mène des études quantitatives et qualitatives dans les domaines de la résilience, du stress, de l’adaptation, de l’identité et du bien-être des familles des militaires.

Jennifer Lee, Ph. D., est présidente du Groupe des ressources humaines et du rendement (HUM) pour le Programme de coopération technique (TTCP) – Groupe technique 21 sur la résilience – ainsi que directrice intérimaire de la recherche sur le soutien au personnel et aux familles au sein du DGRAPM, où elle supervise le travail de son équipe sur un éventail de sujets, notamment : l’inconduite sexuelle; la diversité et l’inclusion; la santé des militaires, des vétérans et de leur famille; et, plus récemment, les répercussions de la légalisation du cannabis sur le personnel des Forces armées canadiennes.

Lisa Williams, M., est chercheuse au sein du DGRAPM, où elle est membre de l’équipe des programmes sur les politiques sociales et le soutien à la famille. Elle mène des études quantitatives et qualitatives sur des sujets liés au bien-être des militaires, des vétérans et de leur famille.


Notes

  1. Jim Thompson, M. D., et autres, « Enquête sur la transition à la vie civile : Rapport sur les vétérans de la Force régulière » dans Anciens Combattants Canada (2011). Lien : https://bit.ly/2J8gYex
  2. Apprenez-en davantage dans Coup d’œil sur les familles des militaires et des vétérans au Canada (mise à jour de novembre 2018). Lien : https://bit.ly/3tXg7kh
  3. Alla Skomorovsky et autres, Pilot Study on the Well-Being of Ill or Injured Canadian Armed Forces (CAF) Members and Their Families : Well-Being Model Development (2019). Rapport scientifique. DRDC-RDDC-2017-R203
  4. En tout, 72 entrevues semi-structurées ont été réalisées, et 16 d’entre elles ont été supprimées de l’analyse en raison de leur inadmissibilité (p. ex. : libération pour des raisons non médicales, plus de 5 ans après la libération). Sur les 56 entrevues admissibles, on dénombre 31 entrevues individuelles avec des membres des FAC ou des vétérans, 11 entrevues individuelles avec des aidants primaires et 14 entrevues combinées. Les participants étaient des vétérans des FAC qui ont été libérés pour des raisons médicales au cours des 5 années précédentes ou des membres des FAC qui s’attendaient à être libérés dans un avenir rapproché (c.-à-d. durant les 24 mois de l’enquête) en raison d’une maladie psychologique ou physique ou encore de blessures. Leurs aidants primaires, définis sur le plan opérationnel comme la personne qui procure au membre des FAC ou du vétéran la plupart des soins ou du soutien (physique ou psychologique), ont également été inclus dans le processus d’entrevues. Les aidants primaires étaient en général un membre de la famille (p. ex. : frère, sœur, parent) et, dans la vaste majorité des cas, le conjoint. Les participants admissibles ont soit été rencontrés en personne ou contactés par téléphone à un moment qui leur convenait.
  5. Linda Van Til et autres, « Well-Being of Canadian Regular Force Veterans, Findings from LASS 2016 Survey » dans Anciens Combattants Canada – Rapport technique de la Direction de la recherche (23 juin 2017). Lien : https://bit.ly/32NfpJw

Publié le 25 juillet 2019

Fête des Mères 2019 : Les nouvelles mamans sont plus âgées et plus susceptibles d’être en emploi qu’auparavant

Le 12 mai 2019, jour de la fête des Mères, est l’occasion de reconnaître et de célébrer les millions de femmes au Canada qui élèvent (seules ou de façon conjointe) les générations futures, souvent en assumant plusieurs rôles tant à la maison, que dans leur milieu de travail et au sein de leur communauté. Le rapport complexe entre les femmes, le travail et la famille à l’échelle du pays a connu une importante évolution au fil des générations, alors que les nouvelles mamans sont aujourd’hui plus âgées et plus susceptibles d’être en emploi que par le passé – des tendances qui se reflètent dans les données récemment publiées par Statistique Canada.

Ainsi, d’après de récentes données statistiques de l’état civil, les femmes, partout au pays, attendent de plus en plus longtemps avant d’avoir des enfants – en effet, les taux de fécondité des femmes en début de vingtaine et en fin de trentaine ont basculé au cours des 20 dernières années. Plusieurs d’entre elles se concentrent d’abord à terminer leurs études postsecondaires, puis à amorcer leur carrière – suivant ainsi une tendance à long terme observée au cours des dernières décennies.

  • En 2017, au Canada, le taux de fécondité des femmes de 20 à 24 ans s’élevaient à 36 naissances vivantes pour 1 000 femmes, comparativement à 58 pour 1 000 en 20001.
  • En 2017, au Canada, le taux de fécondité des femmes de 35 à 39 ans était de 56 naissances vivantes pour 1 000 femmes, soit près du double par rapport à l’an 2000 (34 pour 1 000)2.
  • En 2016, l’âge moyen des mères à la naissance du premier enfant était de 29,2 ans, comparativement à 27,1 ans en 20003.

La plupart de ces nouvelles mamans sont (et demeurent) sur le marché du travail au moment de la naissance ou de l’adoption de leur nouveau-né, et elles ont souvent recours au soutien communautaire pour arriver à concilier les responsabilités professionnelles et familiales.

  • En 2016, le taux d’emploi des mères dont le plus jeune enfant était âgé de 0 à 2 ans s’élevait à 71 %, comparativement à 66 % en 2001. Comme les années précédentes, c’est au Québec que ce taux était le plus élevé en 2016 (80 %)4.
  • En 2017, 79 % des nouvelles mères au pays avaient un emploi assurable, et 90 % d’entre elles bénéficiaient de prestations de maternité et/ou parentales5.
    • Comme les années précédentes, les nouvelles mères au Québec étaient plus susceptibles d’occuper un emploi assurable (97 %) et d’avoir reçu des prestations que leurs homologues ailleurs au Canada (91 %).
  • En 2016-2017, 85 % de toutes les demandes de prestations parentales avaient été faites par des femmes, comparativement à 89 % en 20026, 7.

Depuis décembre 2017, les nouveaux et les futurs parents bénéficient d’une plus grande flexibilité quant au moment et à la durée de la période de prestations.

  • Les nouveaux et les futurs parents sont maintenant en mesure d’opter pour des prestations parentales prolongées, qui leur permettent de recevoir leurs prestations parentales de l’AE sur une période pouvant s’étendre jusqu’à 18 mois, à hauteur de 33 % des gains hebdomadaires moyens. Comparativement aux prestations parentales standards, cette option prolonge la durée de la période de prestation, mais diminue le taux de prestation, qui s’élevaient initialement, respectivement, à 12 mois et à 55 % des gains hebdomadaires moyens8.
  • Les femmes enceintes peuvent dorénavant avoir accès à des prestations jusqu’à 12 semaines avant leur date prévue d’accouchement – soit quatre semaines plus tôt que la limite précédente de huit semaines (aucune semaine supplémentaire n’est disponible)9.
  • En 2017, parmi les nouvelles mères qui avaient travaillé en tant qu’employées au cours des deux années précédentes, plus de 1 sur 5 avaient pris ou prévoyaient prendre un congé de travail de plus de 12 mois (21 %)10.

 


Publié le 8 mai 2019

Notes

1 Statistique Canada, Taux brut de natalité, taux de fécondité par groupe d’âge et indice synthétique de fécondité (naissances vivantes), tableau 13-10-0418-01 (dernière mise à jour le 2 mai 2019). Lien : https://bit.ly/2vSef0p

2 Ibidem

3 Claudine Provencher et autres, « Fécondité : aperçu, 2012 à 2016 » dans Rapport sur l’état de la population du Canada, no 91-209-X au catalogue de Statistique Canada (5 juin 2018). Lien : https://bit.ly/2DzQdxz

4 Martha Friendly et autres, « Early Childhood Education and Care in Canada 2016 » dans Child Care Research and Research Unit (CRRU) (avril 2018). Lien : https://bit.ly/2TC1BwL

5 Statistique Canada, « Enquête sur la couverture de l’assurance-emploi, 2017 » dans Le Quotidien (15 novembre 2018). Lien : https://bit.ly/2vHyptB

6 Emploi et Développement social Canada, « La nouvelle prestation parentale partagée de l’assurance-emploi de cinq semaines sera offerte dans un mois » dans Communiqué de presse (18 février 2019). Lien : https://bit.ly/2ImMSEG

7 Commission de l’assurance-emploi du Canada, Employment Insurance 2002 Monitoring and Assessment Report (31 mars 2003). Lien : https://bit.ly/2VRq99k

8 Pour en apprendre davantage, consultez le document « Contenu du webinaire : changements aux prestations spéciales de l’AE » dans Transition (24 janvier 2018). Lien : https://bit.ly/2WvuoUS

9 Ibidem

10 Statistique Canada, « Enquête sur la couverture de l’assurance-emploi, 2017 ».

Les mères d’aujourd’hui au Canada : « Pour que tout fonctionne… »

La fête des Mères approche, et les Canadiens – petits ou grands – en profiteront pour souligner le dévouement de ces mères et grands-mères, sans oublier les arrière-grands-mères de plus en plus nombreuses. Aux quatre coins du pays, la présence des femmes au travail, dans les familles et dans les collectivités continue de s’accroître, notamment pour les futures et les nouvelles mères. Les décideurs cherchent à s’adapter et à réagir à cette évolution en proposant des solutions flexibles pour les mères en emploi.

Des milieux de travail flexibles pour aider les mamans à assumer leur charge de soins

Les futures et nouvelles mères au Canada sont de plus en plus présentes sur le marché du travail, et plusieurs d’entre elles fournissent aussi des soins à des proches malades ou blessés. Des études ont révélé que la flexibilité en milieu de travail aide les mamans à assumer leurs responsabilités multiples, ce qui rejaillit éventuellement sur le bien-être de la famille.

  • En 2016, le taux de participation des femmes au marché du travail, parmi celles dont le plus jeune enfant avait moins de 6 ans, se situait à 73 % (soit plus du double qu’en 1976, à 36 %)1.
  • En 2012, 72 % des femmes interrogées se disaient satisfaites de l’équilibre travail-vie personnelle, et la proportion était beaucoup plus marquée parmi celles qui travaillaient selon un horaire flexible (75 %) que chez celles qui n’avaient pas accès à cette flexibilité (63 %)2.
  • En 2012, les trois dixièmes des femmes avaient des responsabilités d’aidantes, et les six dixièmes d’entre elles consacraient 20 heures ou plus par semaine à fournir des soins3.
  • En 2012, 63 % des mères en emploi ayant aussi une charge de soins se disaient satisfaites de l’équilibre travail-vie personnelle (contre 73 % pour les pères)4.

De nouvelles façons d’accroître la flexibilité pour les futures et nouvelles mères en emploi

Le 3 décembre 2017, un certain nombre de changements ont été apportés au programme de prestations parentales et de maternité de l’assurance-emploi (AE) au Canadaafin d’offrir plus de flexibilité aux mères en emploi (ainsi qu’aux pères), en élargissant les options quant au moment et à la durée des périodes de prestations6.

  • Les parents peuvent désormais choisir l’option des prestations parentales prolongées de l’AE, échelonnées sur une période pouvant atteindre 18 mois, à hauteur de 33 % des gains hebdomadaires moyens. Cette option rallonge la durée des prestations en contrepartie d’une réduction du taux des prestations (comparativement à 55 % pour l’option standard de 12 mois)7.
  • Les futures mères ont maintenant la possibilité de présenter une demande de prestations jusqu’à 12 semaines avant la date prévue de l’accouchement (soit quatre semaines plus tôt que la limite précédente de huit semaines, mais le nombre total de semaines de prestations demeure le même).

 

Notes


  1. Institut canadien de la santé infantile, « Module 8, section 2 : Taux d’activité de la population active » dans The Health of Canada’s Children and Youth : A CICH Profile (2018). Lien : https://bit.ly/2xXBlTQ
  2. Statistique Canada, « Satisfaction par rapport à l’équilibre entre l’emploi et la vie à la maison : feuillet d’information » dans Mettre l’accent sur les Canadiens : résultats de l’Enquête sociale générale, no 89-652-X au catalogue de Statistique Canada (dernière mise à jour au 12 août 2016). Lien : a href= »https://bit.ly/1SDnt2Q » target= »_blank » rel= »noopener »>https://bit.ly/1SDnt2Q
  3. Maire Sinha, « Portrait des aidants familiaux, 2012 » dans Mettre l’accent sur les Canadiens : résultats de l’Enquête sociale générale, no 89-652-X au catalogue de Statistique Canada (dernière mise à jour au 30 novembre 2015). Lien : https://bit.ly/1qsM5zM
  4. D’après Statistique Canada, cette situation résulte notamment du fait que « les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes à prodiguer des soins à un membre de la famille ou à un ami souffrant d’un problème de santé à long terme; en outre, lorsqu’elles sont de proches aidantes, elles fournissent un plus grand nombre d’heures de soins en moyenne ». Lien : https://bit.ly/1SDnt2Q
  5. Ces changements ne s’appliquent pas au Québec, où c’est plutôt le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) qui est en vigueur depuis 2006.
  6. Les critères d’admissibilité ne changent pas : les travailleurs doivent avoir cumulé 600 heures d’emploi assurable au cours de l’année précédente pour avoir droit aux prestations, lesquelles correspondent généralement à 55 % des gains hebdomadaires moyens (jusqu’à concurrence du plafond déterminé). Depuis le 1er janvier 2018, le montant maximum assurable annuellement est de 51 700 $ (soit 547 $ par semaine). Lien : https://bit.ly/2r1ogp3
  7. Le montant total potentiel n’a pas changé : les prestataires peuvent échelonner les versements sur une période de 12 mois, ou répartir le même montant sur 18 mois. Au moment de présenter la demande initiale de prestations d’AE, les parents ont le choix entre l’option standard des prestations parentales ou encore l’option prolongée. Il n’est plus possible de changer d’option par la suite.

Coup d’œil sur les hommes, le travail et les relations familiales au Canada

Depuis un demi-siècle, la paternité a connu une évolution radicale, d’un océan à l’autre, suivant l’adaptation progressive des hommes en réaction au cadre socioéconomique, culturel et contextuel. Au cours de cette période, les hommes ont entretenu des rapports changeants avec le monde du travail en cherchant à assumer leurs rôles multiples à la maison et à l’extérieur. Leur réalité s’est modulée en fonction de nombreux facteurs, notamment les normes et les attentes culturelles, la situation familiale, l’incapacité, diverses tendances démographiques, sans oublier la participation accrue des femmes au marché du travail.

Dans bien des cas, les pères des générations précédentes se limitaient au rôle « traditionnel » de pourvoyeur. En contrepartie, les pères modernes sont plus enclins à assumer diverses responsabilités liées aux soins ou à la gestion des tâches ménagères. Ce faisant, les papas de toutes les régions du Canada contribuent à redéfinir et à remodeler les liens entre le travail et la paternité.

Quelques faits saillants…

  • La chasse gardée des hommes dans le rôle de pourvoyeur est moins généralisée qu’auparavant. En 2014, 79 % des familles à un seul soutien formées d’un couple avec enfants comptaient sur le père comme pourvoyeur, contre 96 % en 1976.
  • Les hommes représentent une portion croissante des travailleurs à temps partiel. En 2016, la gent masculine représentait le quart (25 %) des travailleurs canadiens à temps partiel de 25 à 54 ans, par rapport à 15 % en 1986.
  • La proportion des hommes n’ayant jamais été mariés est en hausse. En 2011, plus de la moitié des Canadiens de 30 à 34 ans (54 %) déclaraient ne s’être jamais mariés, contre seulement 15 % en 1981.
  • Au Canada, beaucoup d’hommes assument des responsabilités de soins. En 2012, les hommes représentaient près de la moitié (46 %) de tous les aidants au pays. Parmi ceux-ci, 11 % consacraient une vingtaine d’heures ou plus hebdomadairement à leur charge d’aidant.
  • Plusieurs hommes souhaiteraient être des pères au foyer. Près des quatre dixièmes des hommes interrogés (39 %) préféreraient rester à la maison pour y assumer leurs responsabilités parentales.
  • De nombreux hommes participent aux tâches domestiques et aux activités connexes. Parmi les répondants, près de la moitié des pères nord-américains (45 %) affirment être la « personne faisant le plus souvent l’épicerie » au sein du ménage.
  • Les modalités de travail flexibles contribuent à l’équilibre travail-vie personnelle. Plus des huit dixièmes (81 %) des pères qui travaillent à plein temps en fonction d’un horaire flexible se disent satisfaits de leur équilibre travail-vie personnelle, comparativement à 76 % chez ceux qui ne bénéficient pas d’un tel avantage.

 

Cette publication bilingue sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Téléchargez le document Coup d’œil sur les hommes, le travail et les relations familiales au Canada publié par l’Institut Vanier de la famille.

 

 

Coup d’œil sur les femmes, le travail et la famille au Canada

Le Canada compte plus de 18 millions de femmes (9,8 millions d’entre elles étant des mères), dont plusieurs assument de multiples responsabilités à la maison, au travail et au sein de leur collectivité. Depuis plusieurs générations, les femmes au Canada entretiennent des rapports changeants avec le monde du travail, et cette situation évolue et se renouvelle encore et toujours. La réalité des femmes est très différente de celle des hommes à cet égard et se caractérise par une grande diversité parmi les femmes elles-mêmes, où entrent en ligne de compte de nombreux facteurs en lien notamment avec les normes et les attentes culturelles, le statut familial, l’incapacité et certaines caractéristiques démographiques.

Afin de mieux comprendre les réalités multiples et évolutives des femmes au Canada par rapport au travail et à la famille, l’Institut Vanier de la famille a publié Coup d’œil sur les femmes, le travail et la famille au Canada. Ce document sert de complément à notre ligne du temps intitulée Cinquante ans : les femmes, le travail et la famille au Canada, qui illustre visuellement les expériences diversifiées des femmes au Canada en lien avec le travail et la famille.

Quelques faits saillants…

  • Parmi les femmes du principal groupe d’âge actif (25 à 54 ans), la proportion des femmes sur le marché du travail a connu une hausse considérable au fil des générations, passant de 35 % en 1964 à 82 % en 2016.
  • Le taux d’emploi varie en fonction des différentes catégories parmi les femmes du principal groupe d’âge actif, notamment chez les immigrantes récentes (53 %), les femmes se réclamant d’identité autochtone (67 %) et les femmes ayant une incapacité (de 52 à 56 % selon les sous-groupes d’âge).
  • En moyenne, les gains horaires moyens des femmes sans enfants sont 12 % plus élevés que celles avec enfants. On parle parfois de « taxe à la maternité » pour évoquer cet écart salarial.
  • En 2016, près du tiers (32 %) des travailleuses à temps partiel de 25 à 44 ans disaient travailler à temps partiel pour pouvoir prendre soin des enfants.
  • 70 % des mères ayant un enfant de 5 ans ou moins occupaient un emploi en 2015, contre seulement 32 % en 1976.
  • Au Québec, à peine 11 % de toutes les nouvelles mères n’ont pas bénéficié de prestations de congé parental ou de maternité en 2013, comparativement à 36 % dans le reste du Canada. Cet écart s’explique par les différents critères d’admissibilité à l’assurance-emploi d’une province à l’autre.
  • Au Canada, 72 % de toutes les mères interrogées se disent satisfaites de leur équilibre travail-vie personnelle, mais cette proportion recule à 63 % chez les mères qui assument aussi une charge d’aidante familiale.
  • 75 % des mères en emploi ayant accès à des modalités de travail flexibles se disent satisfaites de leur équilibre travail-vie personnelle, contre seulement 69 % chez celles qui n’y ont pas accès.

Cette publication bilingue sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre d’information électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Téléchargez le document Coup d’œil sur les femmes, le travail et la famille au Canada publié par l’Institut Vanier de la famille.

 


Publié le 9 mai 2017

La mobilité pour l’emploi et l’embourgeoisement familial à Montréal

Steven High (Université Concordia)
Lysiane Goulet Gervais (Université Concordia)
Michelle Duchesneau (Université Concordia)
Dany Guay-Bélanger (Université Carleton)

L’évolution de l’économie canadienne suppose un éventail de possibilités et de contraintes, en fonction desquelles les familles doivent s’adapter pour assumer efficacement leurs responsabilités à la maison et au travail. Au sein des familles, cette adaptation suppose bien souvent de parcourir de grandes distances pour le travail, ou de s’absenter durant plusieurs jours, plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Depuis 2012, le Partenariat en mouvement1 s’intéresse au phénomène de la mobilité géographique pour le travail (MGPT), et il en ressort que les Canadiens sont plus nombreux que jamais à devoir parcourir régulièrement de grandes distances pour se rendre au travail, et ce, suivant des modèles « complexes et nuancés »2.

Lorsqu’il est question de la mobilité pour le travail et de ses incidences, la plupart des gens pensent d’abord à certains milieux en contexte rural, comme les chantiers miniers ou les exploitations gazières et pétrolières des régions plus au nord. À cet égard, on oublie généralement les centres urbains au Canada. Pourtant, ces nouvelles tendances du travail touchent plusieurs types de collectivités en redéfinissant leur contexte socioéconomique.

Au cours des deux dernières années, dans le cadre du Partenariat en mouvement, nous avons étudié les incidences de la mobilité au travail dans les centres urbains en réalisant des entrevues exhaustives auprès de Canadiens et de Canadiennes touchés par cette question, qu’il s’agisse de travailleurs effectuant une longue migration journalière ou contraints à d’importants déplacements géographiques en territoire québécois et ailleurs dans le monde. Les travailleurs et les familles que nous avons interrogés pour cette étude habitaient dans le sud-ouest de Montréal, c’est-à-dire dans les quartiers de la Petite-Bourgogne, de Saint-Henri et de Pointe-Saint-Charles. Après avoir connu une forte industrialisation, ces centres urbains se sont rapidement désindustrialisés durant les années 60, 70 et 80, ce qui a entraîné des changements socioéconomiques importants. Dans le sillage de ces bouleversements, ces quartiers ont connu une phase d’embourgeoisement familial, alors que plusieurs familles de la classe moyenne s’y sont progressivement installées avec leurs proches.

Les familles des travailleurs mobiles privilégient la « proximisation » des ressources pour mieux assumer leurs responsabilités

Dans le cadre de nos entretiens, nous avons constaté qu’il existe un lien entre la mobilité pour le travail et le phénomène d’embourgeoisement familial. En effet, certaines familles suffisamment à l’aise financièrement choisissent de s’installer dans ces quartiers des centres urbains pour « proximiser » d’autres aspects de leur vie. Cette proximisation concerne notamment la volonté de se rapprocher des ressources communautaires comme les garderies et les écoles de quartier, les parcs, les commerces et le transport en commun (en particulier le métro et les navettes express vers l’aéroport), et ce, au bénéfice des ménages dont l’un des membres occupe un emploi nécessitant une mobilité professionnelle.

La mobilité d’un des deux parents entraîne souvent l’immobilité relative des autres membres de la famille : la proximité des services communautaires devient alors un élément central.

De fait, l’accès facile au centre-ville compense l’absence prolongée d’un proche ayant à s’éloigner pour le travail. Parmi les familles comptant deux parents, la mobilité d’un des deux parents entraîne souvent l’immobilité relative des autres membres de la famille : la proximité des services communautaires devient alors un élément central.

La mobilité pour le travail complique les rapports familiaux et la vie de famille

Dans le cadre de cette étude, les parents interrogés ont partagé leur point de vue sur l’impact de la mobilité professionnelle sur leurs enfants et la vie de famille. L’une des mères rencontrées, Imane3, se dit préoccupée par les répercussions de la mobilité pour le travail sur la santé physique de ses enfants : « Ce qui est curieux, c’est que les jeunes enfants vivent du stress, mais rien n’y paraît. Leur seule façon de l’exprimer, c’est de tomber malades. Quand mon conjoint voyage beaucoup, ils sont souvent malades : c’est leur façon de dire que la situation leur déplaît. »

« … les jeunes enfants vivent du stress, mais rien n’y paraît. Leur seule façon de l’exprimer, c’est de tomber malades. Quand mon conjoint voyage beaucoup, ils sont souvent malades : c’est leur façon de dire que la situation leur déplaît. » (Une participante de l’étude)

Quant aux proches dont le travail exige une mobilité professionnelle, ils se disent préoccupés par les difficultés à assumer leur rôle parental lorsqu’ils sont loin du foyer. Certains évoquent la tristesse ressentie, leur désir d’être plus impliqués dans la vie de leurs enfants, et leur frustration de devoir faire cadrer les activités des enfants selon leurs déplacements. Cet aspect est souvent revenu durant les entretiens.

Kate est maman et travailleuse mobile. Lorsqu’elle revient au foyer après plusieurs semaines d’absence, elle a l’impression d’avoir manqué de grands pans du développement et de la croissance de son fils. Son conjoint Russell est également travailleur mobile. Chez eux, lorsque l’un des partenaires rentre à la maison, il n’est pas rare que l’autre doive bientôt partir. Alors, la vie n’est plus tout à fait pareille, admet Kate : « Que ce soit le tour de Russell ou le mien, on a toujours l’impression d’un entre-deux, de remettre la vie à plus tard. »

Parmi tous les répondants, c’est sans doute Imane qui en avait le plus à dire à propos des répercussions sur la vie de famille en lien avec la mobilité pour le travail. S’il fallait trouver une thématique à son entrevue, ce serait la « complexité » de sa vie de famille à cause de la mobilité pour le travail. En réponse à une question sur l’impact familial des déplacements de son mari, elle répond : « C’est plutôt compliqué, parce que nous avons besoin d’aide pour les enfants. Je dois préparer les filles le matin. » Alors que l’aînée part pour l’école avec des amies, Imane reconduit sa plus jeune à la garderie. Elle repasse les prendre en fin de journée et prépare le souper, sans l’aide de son conjoint. « Il ne s’agit pas seulement de s’occuper des enfants, mais il y a tout le reste à faire soi-même, comme l’entretien ménager, les épiceries, les repas, et aussi les activités, l’école et la garderie. La vie devient compliquée. » Lorsque son mari s’absente, le fardeau familial s’alourdit et elle n’a pratiquement aucune marge de manœuvre. « Je n’ai même pas le luxe de tomber malade », dit-elle.

Les parents qui « restent à la maison » s’adaptent à la mobilité de leur partenaire

Comme travailleuse autonome, Imane doit souvent poursuivre son travail après que les enfants sont au lit : « Mais lorsqu’il [mon mari] n’est pas là, je suis si fatiguée que je n’ai plus la force de travailler quand les filles sont couchées. » Par conséquent, elle prend souvent du retard dans son travail, ce qui est pour elle une source de stress. Heureusement, la mère d’Imane habite à Montréal et lui donne un coup de pouce pour l’aider à assumer les responsabilités et les rôles familiaux, comme cuisiner, faire la lessive ou passer prendre les filles. Imane insiste sur l’importance de garder une routine, même lorsque son mari s’absente pour une période prolongée : « La vie ne change pas lorsqu’il n’est pas là… Il faut continuer comme d’habitude. » Imane résume ainsi : « Tous ceux qui ont des enfants connaissent cette routine et cet horaire chargé, et il faut continuer. »

Bref, la vie de famille suit son cours même si l’un des parents s’absente. Comme le dit Pierre, lui-même travailleur mobile, ses déplacements ne causaient pas vraiment de problèmes avant la naissance de sa fille. Désormais, il s’inquiète de ne pas lui consacrer assez de temps à cause de ses longues migrations journalières : sa fille dort encore le matin à son départ et est déjà au lit à son retour, la plupart du temps. Il s’inquiète aussi des répercussions de cette mobilité sur sa capacité d’assumer sa juste part des responsabilités familiales. Plusieurs répondants racontent qu’ils avaient pris l’habitude de se déplacer en famille lorsque l’un des parents avait à travailler à l’extérieur, ce qui devient impossible dès que les enfants atteignent l’âge scolaire. C’était le cas de la famille d’Imane, mais il est rare maintenant que la famille puisse partir avec le père au risque de multiplier les absences à l’école.

Les technologies au secours des familles pour faciliter et consolider les liens familiaux

Pour participer autant que possible à la vie familiale et se rapprocher malgré la distance, les familles recourent de plus en plus aux technologies et aux nouveaux médias. Même si elles n’ont pas toutes accès à de tels outils, cette forme d’« intimité virtuelle » est une réalité de plus en plus courante et favorise une certaine continuité des liens et des rituels familiaux malgré l’éloignement d’un être cher4.

Cette forme d’« intimité virtuelle » est une réalité de plus en plus courante et favorise une certaine continuité des liens et des rituels familiaux malgré l’éloignement d’un être cher.

Un certain nombre de participants de notre étude ont évoqué l’importance de FaceTime, de Skype et d’autres médias sociaux pour maintenir les liens avec la famille malgré l’éloignement. Par exemple, durant ses séjours à l’extérieur, Russell « continue de participer aux rituels quotidiens avec les enfants via Skype, comme pour les chansons ou les histoires avant le dodo ». Sa partenaire, Kate, rajoute : « Il y a une douzaine d’années à peine, ces moyens-là n’existaient pas. C’était tout simplement impossible, et la facture d’interurbains aurait été astronomique! [rires] De nos jours, on peut communiquer à peu de frais, voire gratuitement. Ça aide beaucoup, beaucoup, beaucoup… » Toutefois, Imane considère que les communications sont tout de même difficiles lorsque son mari est à l’étranger. S’il est en Inde ou au Pakistan, il faut compter 10 ou 11 heures d’écart, si bien qu’il n’est pas facile de coordonner tout le monde. Elle ajoute : « Les filles n’aiment pas trop parler au téléphone, alors ce n’est pas facile. » Elle relate que c’est tout juste si sa fille aînée dit : « Allo, ça va. Oui, tout va bien. Je te passe maman. » Quant à la cadette âgée de seulement 3 ans, elle ne parle pas encore vraiment au téléphone.

Les enfants sont sensibles aux changements de routine associés à la mobilité

Afin de mieux comprendre les incidences de la mobilité pour le travail d’un point de vue intergénérationnel, nous avons interrogé quatre enfants âgés de 5 à 7 ans dans le cadre de cette étude. La plupart d’entre eux ont corroboré la situation évoquée par leurs parents, mais certains volets des entretiens révèlent aussi une autre perspective. En effet, même si la chose n’est pas surprenante, on constate avec intérêt que les enfants semblent surtout marqués par les perturbations de la routine.

Ainsi, ils se souviennent très bien d’avoir eu la chance de se coucher plus tard ou de manger certaines gâteries lors de petits moments privilégiés, pendant que l’autre parent était en voyage. June, pour sa part, se dit affectée par l’absence de sa mère Laura, mais se réjouit tout de même que son papa lui consacre plus de temps et lui accorde plus de privilèges : « C’est triste que maman soit partie, mais je suis quand même contente parce que je peux me coucher plus tard. » D’autres enfants évoquent les cadeaux qu’ils ont reçus ou offerts au retour d’un parent, et le plaisir d’être confiés aux soins d’autres personnes, comme les grands-parents, les proches, les amis, etc.

Les familles s’adaptent pour assumer leurs responsabilités

Notre examen de la mobilité pour le travail était fondé sur une approche géographiquement ciblée axée sur trois secteurs distincts, ce qui nous a permis d’analyser la mobilité sous un autre angle. Une telle approche a mis en lumière certaines incidences sur la vie de famille tout en tenant compte du spectre complet de la mobilité pour le travail, qu’il s’agisse d’un emploi nécessitant d’importantes migrations journalières ou des déplacements fréquents à l’étranger occasionnant des absences prolongées. Notre approche nous a aussi incités à tenir compte des liens entre la mobilité pour le travail et la fixité familiale (soit les aspects de la vie de famille qui sont statiques ou fixes sur le plan géographique), particulièrement en ce qui touche les motifs « locaux » de l’embourgeoisement urbain. En somme, notre étude montre que, malgré les incidences familiales de la mobilité pour le travail, les familles évoluent et s’adaptent par divers moyens pour assumer leurs multiples responsabilités, notamment en se rapprochant des services communautaires, en ajustant leurs rapports familiaux ou en mettant à profit les technologies.

Notes

  1. L’initiative En mouvement est un partenariat intersectoriel réunissant une quarantaine de chercheurs issus de 17 disciplines et représentant 22 universités du Canada et d’ailleurs. Le partenariat est financé grâce à une subvention du Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH).
  2. Michael Hann, Deatra Walsh et Barbara Neis, « At the Crossroads: Geography, Gender and Occupational Sector in Employment-Related Geographical Mobility » dans Canadian Studies in Population, vol. 41, nos 3-4 (2014).
  3. Les prénoms ont été remplacés pour des raisons de confidentialité.
  4. R. Wilding, « “Virtual” Intimacies? Families Communicating Across Transnational Contexts » dans Global Networks, vol. 6, no 2 (28 février 2006). doi:10.1111/j.1471-0374.2006.00137.x

Steven High est professeur d’histoire à l’Université Concordia, et cofondateur du Centre d’histoire orale et de récits numérisés.

Lysiane Goulet Gervais est nouvellement diplômée du programme de maîtrise en art-thérapie de l’Université Concordia.

Michelle Duchesneau est étudiante de cycle supérieur à l’École des affaires publiques et communautaires de l’Université Concordia.

Dany Guay-Bélanger étudie actuellement au programme de maîtrise en histoire publique de l’Université Carleton.

Photo : Nouveaux complexes de condominiums le long du canal Lachine, à Montréal. Photographe : David W. Lewis.

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Publié le 25 avril 2017

 

Fiche infographique – Les femmes, les soins et le travail au Canada

Les soins sont une réalité qui touche le quotidien de nombreuses familles au Canada. La plupart des personnes faisant partie d’une famille ont déjà eu – ou auront – à fournir des soins à un ami ou à un proche touché par une maladie chronique, une incapacité ou un problème lié au vieillissement. Cependant, il n’existe pas d’uniformité quant à la réalité et au vécu des aidants canadiens, compte tenu des facteurs socioéconomiques, culturels et contextuels qui déterminent qui sera appelé à prodiguer des soins, quels types de soins seront requis, et quelles seront les répercussions de la coexistence des soins et du travail.

Depuis une génération, l’écart s’est resserré entre les hommes et les femmes du point de vue des aidants familiaux, mais il n’en demeure pas moins que la représentation féminine a toujours été prépondérante, ce qui s’avère encore aujourd’hui. Par ailleurs, des études ont montré que les femmes consacrent en moyenne plus de temps que les hommes aux responsabilités de soins, et qu’elles sont plus susceptibles de subir des répercussions négatives découlant de leur charge de soins.

Notre nouvelle fiche infographique sur Les femmes, les soins et le travail au Canada illustre les liens entre les soins et le travail du point de vue des femmes au Canada.

Quelques faits saillants :

  • Parmi les Canadiennes en général, 30 % des femmes affirment avoir prodigué des soins en 2012.
  • Les femmes de 45 ans ou plus estiment avoir consacré environ 5,8 années aux responsabilités de soins durant leur vie, par rapport à 3,4 années pour les hommes.
  • Les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à déclarer consacrer 20 heures ou plus par semaine à la prestation de soins (17 % et 11 %, respectivement).
  • Au Canada, environ 72 % des aidantes âgées de 45 à 65 ans occupent aussi un emploi.
  • Les femmes vivent diverses répercussions sur le plan professionnel en lien avec leur charge de soins : 30 % d’entre elles disent avoir perdu au moins une journée complète de travail, 6,4 % affirment avoir soit démissionné, soit perdu leur emploi, soit devancé leur retraite, et 4,7 % admettent avoir refusé une offre d’emploi ou une promotion.
  • Selon les estimations, les pertes salariales cumulatives des aidants se chiffraient globalement à 221 millions de dollars annuellement chez les femmes (de 2003 à 2008) à cause de l’absentéisme, de la réduction des heures de travail ou de la cessation d’emploi.
  • Parmi les femmes qui bénéficient de modalités de travail flexibles, près de la moitié (47 %) craignent d’utiliser ces options qui, selon elles, pourraient avoir des incidences néfastes sur leur cheminement professionnel.

 

Téléchargez la fiche infographique de l’Institut Vanier de la famille portant sur Les femmes, les soins et le travail au Canada.

Ligne du temps – Cinquante ans : les hommes, le travail et la famille au Canada

La paternité au Canada a beaucoup évolué au cours du dernier demi-siècle, alors que les hommes ont délaissé progressivement le rôle de « pourvoyeur » pour se consacrer davantage aux responsabilités entourant les soins, cherchant de plus en plus à assumer en parallèle leurs diverses responsabilités au travail, à la maison et au sein de leurs collectivités.

À l’occasion de la fête des Pères de 2016, nous avons créé une ligne du temps qui s’échelonne sur 50 ans pour illustrer ces tendances et mettre en relief les profils socioéconomiques, culturels et contextuels qui influencent la paternité et les relations familiales – et vice-versa. En voici quelques exemples :

  • Les pères sont de plus en plus nombreux à prendre congé pour s’occuper des nouveau-nés. Plus du quart des nouveaux pères au Canada (27 %) se sont prévalus d’un congé parental rémunéré en 2014 (ou avaient l’intention de le faire), alors qu’à peine 3 % d’entre eux en avaient fait autant en 2000.
  • Le nombre de « pères au foyer » est en hausse. En 2014, les pères représentaient environ 11 % des parents au foyer, comparativement à seulement 1 % en 1976.
  • Les pères de jeunes enfants s’absentent plus souvent du travail pour des motifs familiaux. En 2015, les pères d’enfants de moins de 5 ans ont déclaré s’être absentés du travail en moyenne 2,0 journées annuellement en raison de leurs responsabilités personnelles ou familiales, par rapport à 1,2 journée en 2009.
  • Les « pères seuls » en situation de faible revenu sont moins nombreux. En 2008, l’incidence de faible revenu se situait à 7 % lorsque la famille monoparentale était dirigée par un homme, par rapport à 18 % en 1976.
  • Les pères participent de plus en plus aux tâches domestiques. Les hommes qui affirment participer aux tâches ménagères y consacraient en moyenne 184 minutes par jour en 2010, comparativement à 171 minutes en 1998.
  • Les pères qui bénéficient de modalités de travail flexibles se disent plus satisfaits quant à l’équilibre travail-vie personnelle. Parmi les pères ayant des enfants de moins de 18 ans et travaillant à plein temps selon un horaire flexible, le taux de satisfaction à l’égard de l’équilibre entre le travail et la vie personnelle en 2012 atteignait 81 %, comparativement à 76 % de ceux qui n’avaient pas accès à cette flexibilité.
  • Une proportion croissante des enfants considèrent qu’il est facile de discuter avec leur papa. En 2013-2014, 66 % des filles de 11 ans et 75 % des garçons du même âge affirmaient qu’il était facile de discuter avec leur père de sujets préoccupants, par rapport à 56 % chez les filles et à 72 % chez les garçons deux décennies auparavant.

Cette publication bilingue présente un caractère intemporel puisqu’elle sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Amusez-vous à découvrir notre nouvelle ligne du temps, et bonne fête des Pères aux quelque 8,6 millions de papas du Canada!

Téléchargez la ligne du temps intitulée Cinquante ans : les hommes, le travail et la famille au Canada.

 

Les pères d’aujourd’hui renouvellent le modèle travail-famille

Nathan Battams

Le « paysage familial » canadien est en constante évolution, en fonction des forces socioéconomiques, culturelles et contextuelles qui définissent et redéfinissent les relations et les rôles familiaux. La paternité ne fait pas exception à la règle, si bien que les quelque 8,6 millions de papas du Canada, de plus en plus diversifiés, s’impliquent désormais davantage dans la vie familiale que ceux des générations précédentes1. Plusieurs d’entre eux n’hésitent pas à délaisser le modèle « traditionnel » du père pourvoyeur pour jouer une plus grande place dans la prise en charge des soins et des responsabilités domestiques. Ce faisant, les pères d’aujourd’hui contribuent à renouveler et à redessiner les liens entre la paternité et le travail.

Les hommes délaissent le rôle de « pourvoyeur » alors que les femmes sont de plus en plus présentes sur le marché du travail

Depuis 50 ans, la prévalence des « pères pourvoyeurs » a reculé considérablement, compte tenu de la multiplication du nombre de familles à deux revenus et, par conséquent, de la participation accrue des mères au marché du travail. Selon les données de Statistique Canada pour 1976, les ménages ayant deux revenus représentaient 36 % des familles comptant au moins un enfant de 16 ans ou moins au Canada, alors que cette situation touchait 69 % des familles en 2014. Un autre rapport de Statistique Canada montre que, durant la même période, la proportion des familles à un seul revenu, où le père était l’unique pourvoyeur, a chuté de 51 % à seulement 17 %.

Au sein des familles formées d’un couple, certains pères choisissent de rester en marge de la population active pour jouer un rôle parental principal ou prééminent (on parle souvent de « pères au foyer »), qu’il s’agisse d’une situation permanente ou temporaire pendant que les enfants sont en bas âge. Il y a quarante ans, environ 1 % des papas se disaient pères au foyer parmi les familles à un seul revenu, alors que ce taux s’établit aujourd’hui à 11 %.

D’ailleurs, le Canada ne fait pas bande à part à cet égard  : selon les données d’un rapport publié en 2015 par le Pew Research Center, la même tendance prévaut aux États-Unis, où 7 % des pères américains vivant avec des enfants déclaraient « ne pas travailler à l’extérieur » en 2012, comparativement à seulement 4 % en 1989. Parmi ceux-ci, la proportion de pères qui affirment rester au foyer pour s’occuper de la famille a plus que quadruplé dans l’intervalle, pour se fixer à 21 % (par rapport à 5 % en 1989).

L’engagement accru des pères favorise l’amélioration des relations familiales

En outre, les données de l’Enquête sociale générale sur l’utilisation du temps montrent que les pères modernes s’investissent davantage sur le plan familial  : les hommes passent plus de temps en famille, puisqu’ils y consacraient 379 minutes quotidiennement en 2010 comparativement à 360 minutes en 1986. En moyenne, les pères ayant des enfants d’âge préscolaire s’absentaient du travail 1,8 journée par année pour s’acquitter de responsabilités personnelles ou familiales en 1997, mais 6,3 journées une décennie plus tard. Les générations plus jeunes contribuent par ailleurs à réduire l’écart de prise en charge des tâches domestiques, les hommes affirmant y consacrer plus de temps qu’il y a trente ans.

En 2000, seulement 3 % des nouveaux pères au Canada s’étaient prévalus d’un congé parental rémunéré, alors que plus du quart d’entre eux (27 %) avaient l’intention d’en faire autant en 2014. Ce taux grimpe en flèche au Québec (où il atteint 78 %), puisque les prestations de paternité offertes aux nouveaux papas québécois s’ajoutent aux prestations parentales dans le cadre du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP). Le Québec est actuellement la seule province à offrir des prestations de paternité, mais la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail a récemment exprimé sa volonté de consentir un peu plus de temps aux papas, puisque les congés de paternité figurent parmi les changements proposés au programme fédéral de prestations parentales.

Du reste, l’engagement accru des pères s’avère éventuellement très bénéfique aux relations familiales et à la vie de famille. Dans le cadre d’une étude comparative portant sur les congés parentaux offerts au Québec par rapport aux programmes en vigueur dans le reste du Canada, l’auteure Ankita Patnaik a constaté qu’il existe un « impact important et persistant » au Québec dans les rapports hommes-femmes au cours des trois années suivant un congé parental pour le père. Selon les conclusions de son rapport, les pères continuent ensuite de s’impliquer davantage dans les tâches ménagères, alors que les mères sont plus susceptibles de participer au marché du travail. De plus, les pères québécois ayant bénéficié du RQAP passaient en moyenne une demi-heure de plus par jour à la maison comparativement aux pères hors Québec.

Étant donné l’évolution de la situation dans l’ensemble de l’Amérique du Nord, il est sans doute normal d’avoir l’impression d’un engagement plus important des pères par rapport aux générations précédentes. À ce propos, l’étude du Pew Centre citée précédemment montrait que près de la moitié des pères interrogés aux États-Unis (46 %) disaient consacrer personnellement plus de temps à leurs enfants que leur propre père ne le faisait pour eux-mêmes. Au Canada, un sondage de l’initiative Today’s Parent a permis de constater que les trois quarts (75 %) des hommes interrogés se disaient plus impliqués auprès de leurs enfants que leur propre père à leur endroit.

Les enfants sont aussi susceptibles de ressentir les effets d’une présence paternelle accrue. Selon un sondage international HBSC mené en 1993-1994 puis en 2013-2014 pour le compte de l’Organisation mondiale de la santé, une proportion grandissante des enfants de 11 ans affirment qu’il est « facile » de discuter avec leur propre père de sujets préoccupants, la proportion étant passée de 56 % à 66 % chez les filles, et de 72 % à 75 % chez les garçons.

L’importance de l’équilibre travail-vie personnelle pour les pères d’aujourd’hui

Même si les pères modernes jouent un rôle accru au sein du foyer familial, la plupart d’entre eux travaillent toujours, si bien que le sujet de l’équilibre travail-vie personnelle s’impose tout naturellement lorsqu’il est question de la paternité aujourd’hui. Les récentes données de Statistique Canada révèlent que la plupart des pères (près de huit sur dix, soit 78 %) se disent satisfaits quant à l’équilibre travail-vie personnelle. Or, la famille occupe une place centrale du côté « vie personnelle » de l’équation travail-vie personnelle  : chez les parents qui disaient n’être pas satisfaits à cet égard, le principal facteur en cause était lié au fait de n’avoir « pas assez de temps à consacrer à la vie familiale ».

Par l’entremise des pratiques et des politiques pour la conciliation travail-vie personnelle, les employeurs jouent un rôle de premier plan pour améliorer et soutenir l’équilibre travail-vie personnelle des pères. Dans la même étude de Statistique Canada, on constatait que la proportion des pères satisfaits de l’équilibre entre le travail et la vie personnelle était invariablement plus marquée chez les travailleurs bénéficiant d’un horaire flexible (satisfaction à 81 % comparativement à 76 % de ceux qui n’y avaient pas accès). On a constaté la même satisfaction chez les personnes profitant d’une flexibilité de l’horaire de travail sans qu’il y ait d’incidence négative sur la carrière (83 % par rapport à 74 % de ceux qui n’en bénéficient pas), tout comme chez ceux qui avaient la possibilité de prendre un congé non payé pour s’occuper des enfants (79 % par rapport à 71 % de ceux qui n’avaient pas cette possibilité), ou encore chez ceux qui pouvaient prendre un congé non payé pour prodiguer des soins à un conjoint, à un partenaire ou à un autre membre de la famille (81 % par rapport à 72 % de ceux qui ne pouvaient le faire).

« La proportion des pères satisfaits de l’équilibre entre le travail et la vie personnelle est plus marquée chez les travailleurs bénéficiant d’un horaire flexible et ayant la possibilité de prendre un congé non payé pour s’occuper de leurs enfants et de leurs familles. »

Heureux en famille, heureux au travail…

Bref, flexibilité et satisfaction vont de pair relativement à l’équilibre entre le travail et la vie personnelle. Ainsi, les organisations qui disposent de politiques favorisant la flexibilité pour les pères et leurs familles sont plus susceptibles d’attirer et de retenir les meilleurs employés qui sont aussi papas (ou qui souhaitent le devenir). À l’inverse, ceux qui font peu de place aux modalités de travail flexibles risquent de ne pas susciter un grand intérêt chez les pères  : selon un sondage Harris-Decima, la moitié des pères interrogés au Canada (49 %) affirment qu’ils envisageraient de changer d’emploi si un employeur éventuel leur offrait de meilleures conditions que leur employeur actuel pour la conciliation travail-famille.

Les pères d’aujourd’hui sont-ils plus soucieux du bien-être de leurs proches ou simplement différents?

Les pères ont toujours cherché à assurer le bien-être de leurs familles, mais ceux de la génération actuelle jouent un rôle de plus en plus engagé au sein de la famille et ce virage profite à la vie de famille et aux relations familiales. Alors que, pour les papas des générations précédentes, le bien-être de la famille passait d’abord par le travail rémunéré et la stabilité financière, les pères d’aujourd’hui s’impliquent plus directement auprès de leurs enfants en bas âge, consacrent plus de temps à la famille et favorisent les milieux de travail compatibles avec leur rôle évolutif sur le plan familial. En acceptant de jouer ces nouveaux rôles, ils redéfinissent ainsi la nature même de la paternité, que ce soit au sein de la famille, au travail ou dans les collectivités.

 


Nathan Battams est auteur et chercheur au sein de l’Institut Vanier de la famille.

 

Note

1 Caryn Pearson, « L’incidence des problèmes de santé mentale sur les membres de la famille », Coup d’œil sur la santé (7 octobre 2015), Statistique Canada, no 82-624-X. Lien : http://bit.ly/2V9tJac

Fiche de politiques publiques – Flexibilité : de privilège à droit

Sara MacNaull

Tant à leur domicile qu’au travail et au sein de leur collectivité, les membres de la famille qui occupent un emploi sont confrontés à une multiplicité de tâches et doivent s’assurer de gérer efficacement ces responsabilités diverses. S’ils font preuve d’une grande capacité d’adaptation en assumant les multiples rôles qui leur incombent, ils ont besoin que leur lieu de travail respecte leur vie personnelle et accueille favorablement leurs demandes de flexibilité et d’autonomie.

La souplesse du lieu de travail demeure un sujet de grand intérêt pour les individus, les familles, les employeurs et les décideurs. Il existe plusieurs angles pour aborder la création de milieux de travail flexibles, notamment la modification, l’adaptation et l’arrangement, qui auront un impact sur le moment et l’endroit où sera réalisé le travail, ainsi que sur la manière dont il sera effectué.

La flexibilité en milieu de travail : profitable pour tous

Les familles ne sont pas les seules à bénéficier de la flexibilité en milieu de travail lorsque les membres de la famille peinent à gérer efficacement leurs rôles multiples. Les employeurs adoptent la flexibilité en milieu de travail comme une stratégie clé pour attirer et retenir les talents les plus prometteurs dans un marché de l’emploi de plus en plus compétitif. Toute la société bénéficie alors d’une main-d’œuvre plus stable et d’une économie propulsée par des entreprises qui fonctionnent à plein rendement.

Dans la lettre de mandat que le premier ministre du Canada a adressée à la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail, la flexibilité en milieu de travail a récemment été mentionnée parmi les priorités. Plus précisément, on y demande à la ministre de :

Travailler avec le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social afin de respecter [l’]engagement [du gouvernement] à accorder des congés plus généreux et souples aux aidants naturels ainsi qu’à assouplir les congés parentaux.

… et

Modifier le Code canadien du travail afin de permettre aux travailleurs de demander formellement à leur employeur des conditions de travail souples, et tenir des consultations auprès des provinces et des territoires relativement à la mise en œuvre de changements du même ordre dans les secteurs soumis à une réglementation provinciale.

Les modifications que l’on propose d’apporter au Code du travail indiquent que l’on accorderait aux employés le droit légal de demander formellement à leur employeur de leur consentir des modalités de travail flexibles.

À l’heure actuelle, il n’existe au Canada aucun mécanisme légal formel permettant aux employés de demander de la flexibilité et les superviseurs ou gestionnaires ne sont pas tenus par la loi de considérer de telles requêtes : toute intervention est à la discrétion de l’employeur. Le droit de demander une quelconque flexibilité est considéré par certains comme un privilège d’employé et dépend de l’ouverture personnelle du superviseur ou du gestionnaire. La réponse aux requêtes repose donc sur la culture de l’entreprise. Une législation en matière de droit de demander de la flexibilité changerait cet état de fait en formalisant et en normalisant ce processus tout en exigeant des employeurs qu’ils justifient tout refus d’accueillir la requête, le cas échéant.

L’Institut Vanier a récemment étudié la flexibilité en milieu de travail dans le cadre d’une analyse comparative qui comprenait un sondage réalisé auprès d’employeurs et de professionnels des ressources humaines. Ce sondage a relevé que la flexibilité offerte par les employeurs n’était plus considérée comme une option, et constituait une stratégie incontournable pour attirer et retenir les meilleurs talents dans le contexte compétitif du marché du travail actuel. Plusieurs des participants au sondage ont par ailleurs affirmé que la flexibilité était déjà un droit établi au sein de leur entreprise et non plus un privilège d’employé.

La flexibilité, un droit déjà acquis ailleurs

Certains pays comme l’Australie et le Royaume-Uni, ainsi que certaines autorités des États-Unis, ont instauré le droit de demander de la flexibilité dans leur législation et leur réglementation respectives en matière d’emploi ou de travail. Toutefois, les exigences d’admissibilité varient et, selon la compétence concernée, il est possible que la flexibilité ne soit pas accessible à tous les employés.

En Australie, le droit de demander des modalités de travail flexible (MTF) a été établi dans le cadre de la Fair Work Act 2009 (la loi pour un travail juste) et accorde aux employés qui remplissent les exigences d’admissibilité, le droit légal de demander des formules de travail flexibles. Pour être admissibles, les employés doivent :

  • être parents ou avoir la responsabilité de prendre soin d’un enfant qui est d’âge scolaire ou moins;
  • avoir des responsabilités d’aidant naturel (telles que décrites par la Carer Recognition Act 2010 – la loi pour la reconnaissance de l’état d’aidant naturel);
  • présenter une invalidité;
  • être âgés de 55 ans et plus;
  • être victimes de violence familiale ou prendre soin d’une personne qui est victime de violence familiale;
  • avoir travaillé pour l’employeur pendant au moins une année (bien que les employés occasionnels à long terme puissent aussi être admissibles).

Au Royaume-Uni, le droit de demander de la flexibilité a été étendu à tous les employés en 2014. Auparavant, ce droit n’était offert qu’aux parents et aux aidants naturels, comme c’était le cas des critères d’admissibilité en vigueur auprès de certaines compétences en Australie.

Aux États-Unis, les exigences d’admissibilité varient selon la législation en vigueur au sein d’une autorité particulière. Par exemple, les employés de l’État du Vermont se sont vu accorder le droit de demander de la flexibilité en 2014, l’année même où les employés de la Ville de San Francisco ainsi que tous les employés du gouvernement fédéral des États-Unis ont obtenu ce même droit.

Le droit de demander : différent du droit à la flexibilité

En Australie comme au Royaume-Uni, l’employeur doit fournir, par écrit, ses raisons précises pour refuser une demande de flexibilité. Ce refus doit être attribuable à des motifs commerciaux raisonnables, comme des coûts supplémentaires pour l’employeur, des pertes importantes en matière de productivité, de qualité ou de rendement, une incapacité à répondre aux demandes de la clientèle ou l’impossibilité de répartir le travail parmi les autres membres du personnel.

Alors que les détails de la législation canadienne en instance en matière de droit de demander de la flexibilité au travail n’ont pas encore été rendus publics au moment de la diffusion de cet article, certaines pratiques permettant le travail flexible offriraient un meilleur soutien aux familles qui peinent à gérer leurs multiples responsabilités, obligations et engagements. Pour les familles, cela signifie qu’il est possible d’améliorer l’équilibre travail-vie personnelle en offrant aux employés du temps et de l’énergie pour prendre soin de leurs proches et d’eux-mêmes, tout en demeurant productifs et engagés.

 


Le réaménagement des horaires de travail (RHT) est une modalité temporaire, qui n’est pas la norme dans une entreprise (ex. : la journée de travail normale est de 9 h à 17 h), et est déterminé de façon unique et personnalisée selon les besoins à court terme de l’employé. Cette modalité a un impact sur le temps que l’employé passe au bureau. Le retour progressif suivant un congé de maternité ou parental pendant une durée prédéterminée et l’ajustement de l’heure d’arrivée et de départ pendant la période de rétablissement à la suite d’une maladie ou d’une blessure sont deux exemples de RHT.

Les modalités de travail flexible (MTF) accordent plus de souplesse et d’autonomie aux employés en ce qui a trait au moment et au lieu où le travail doit être fait, ainsi qu’à la manière à privilégier. Les MTF aident les employés à gérer leurs rôles multiples au bureau comme dans leur vie privée. Pour certains employés, il peut être intimidant de demander au superviseur de leur accorder un peu de flexibilité, car cela peut être perçu comme un privilège d’employé, alors que pour plusieurs familles, il s’agit plutôt d’une nécessité pour leur permettre de gérer les besoins quotidiens de la famille. Le travail à distance, la semaine de travail comprimée, le partage du travail et les horaires flexibles sont tous des exemples de MTF.

Les modalités de travail personnalisées (MTP) sont des conditions de travail individualisées et sur mesure qui déterminent précisément où, quand et comment sera effectué le travail. À la différence du RHT et des MTF, les MTP sont fluides, s’étendent sur de longues périodes de temps ou peuvent être modifiées en fonction de la situation. Les employés sont évalués sur la base de ce qu’ils réalisent et sur leur productivité grâce à une approche axée sur les résultats, plutôt qu’une approche axée sur l’heure d’arrivée et de départ qui tient compte du temps où l’employé a été physiquement présent sur le lieu de travail. La personnalisation de masse des carrières (Mass Career CustomizationMC) et l’augmentation ou la diminution de la charge de travail en fonction de la situation de l’employé sont des exemples de modalités de travail personnalisées.


 

Sara MacNaull travaille comme directrice des programmes au sein de l’Institut Vanier de la famille. Elle est en voie d’obtenir le titre d’intervenante agréée dans le domaine de la conciliation travail-vie personnelle.

 

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Ligne du temps – Cinquante ans : les femmes, le travail et la famille au Canada

Même si les mères au Canada ont toujours joué un rôle central dans la vie de famille, il ne fait aucun doute que le contexte socioéconomique, culturel et contextuel évolue sans cesse, tout comme l’influence qu’il exerce sur la maternité, et vice-versa.

Par rapport aux générations précédentes, les mères sont de plus en plus nombreuses à conjuguer des responsabilités familiales et professionnelles, et les interrelations dynamiques qui existent entre les femmes, le travail et la famille continuent de se renouveler. À l’occasion de la fête des Mères 2016, nous avons créé une ligne du temps échelonnée sur 50 ans pour illustrer ces interrelations dans une perspective élargie, en mettant en relief certaines tendances à long terme ayant émergé au fil du dernier demi-siècle, notamment :

  • une croissance du taux de participation des femmes au marché du travail, lequel est passé de 40 % en 1968 à 82 % en 2014, chez les femmes âgées de 25 à 54 ans;
  • une progression constante du nombre de mères en situation de « pourvoyeur », qui représentaient 21 % des familles formées d’un couple ayant un seul revenu en 2014, comparativement à 4 % en 1976;
  • un recul marqué de l’incidence de faible revenu chez les mères seules, ce taux étant passé de 54 % en 1976 à 21 % en 2008;
  • une baisse du taux de fécondité, qui s’établissait à 3,94 enfants par femme en plein baby-boom (1959), pour chuter à 1,61 enfant en 2011;
  • une hausse constante de l’âge moyen des femmes à la naissance d’un premier enfant, soit de 24,3 ans en 1974 à 28,5 ans en 2011;
  • une augmentation du temps que les mères consacrent à leurs familles, soit 421 minutes par jour (7 heures) en 2010, par rapport à 403 minutes par jour (6,7 heures) en 1986.

Cette publication bilingue présente un caractère intemporel puisqu’elle sera régulièrement mise à jour en fonction des nouvelles données. Inscrivez-vous à notre lettre électronique mensuelle pour connaître les mises à jour et les autres nouvelles concernant les publications, les projets et les initiatives de l’Institut Vanier.

Découvrez notre nouvelle ligne du temps et bonne fête des Mères aux quelque 9,8 millions de mamans du Canada!

Téléchargez la ligne du temps intitulée Cinquante ans : les femmes, le travail et la famille au Canada.

Les conflits travail-famille chez les parents seuls des Forces armées canadiennes

Alla Skomorovsky, Ph. D.

Les responsabilités inhérentes à la vie militaire représentent parfois une importante source de stress pour les familles des militaires, au gré des déploiements, des déménagements, des aléas de la vie à l’étranger et de l’éloignement familial, sans compter les risques de blessures ou de décès pour les militaires, ou encore les heures de travail longues et imprévisibles.

Même si les familles des militaires parviennent généralement à faire face aux difficultés, des études ont montré que certaines d’entre elles finissent par se sentir débordées devant ces exigences concurrentes et cumulatives. Il s’agit là d’une réalité particulièrement éprouvante pour les parents seuls au sein des Forces armées canadiennes (FAC), qui comptent bien souvent sur des ressources limitées pour assumer leurs responsabilités multiples. C’est l’une des raisons pour lesquelles plusieurs parents seuls engagés dans la vie militaire (hommes ou femmes) semblent tirer une moindre satisfaction de ce mode de vie que leurs homologues en couple, selon les données d’une étude antérieure.

Par définition, les conflits travail-famille surviennent lorsque les exigences professionnelles sont difficilement conciliables avec les exigences du domaine familial. Au Canada, même s’il semble de plus en plus évident que les conflits travail-famille représentent un problème éventuellement important pour les familles des militaires, il n’existe encore que très peu de recherches portant précisément sur le sujet. Dans une étude qualitative récente, la majorité des parents seuls des FAC affirmaient être en mesure de concilier travail et famille, tout en admettant qu’il leur était difficile d’y parvenir, surtout parce qu’ils sont souvent les seuls pourvoyeurs de soins et de ressources financières pour leur famille. Voici les commentaires de l’un des participants à cet égard :

“Jusqu’ici, je parviens assez bien à équilibrer ma vie professionnelle et ma vie personnelle. Par contre, je dois dire que ce n’est pas toujours facile parce que je n’ai personne d’autre sur qui compter, par exemple lorsque je dois rester plus tard au travail ou terminer ma journée à partir de mon téléphone. Mon BlackBerry est devenu essentiel, parce que je ne peux pas rester trop tard au travail, en tout cas pas aussi longtemps qu’avant. Mais en général, ça se passe plutôt bien.”

Peu d’études sur les conflits travail-famille chez les militaires canadiens

Dans certains cas, les parents seuls qui œuvrent dans les FAC vivent de multiples déploiements, et sont alors séparés de leurs enfants sans possibilité de s’occuper d’eux. Il va sans dire que pour ces familles, les arrangements pour la garde des enfants ne sont pas simples. Par exemple, pendant que papa ou maman est en mission, les enfants doivent parfois s’installer chez leurs grands-parents dans une autre ville. Par ailleurs, les parents seuls qui vivent de fréquentes réaffectations risquent d’éprouver des difficultés à créer ou à recréer des réseaux sociaux, qui sont pourtant une précieuse source de soutien.

Quelques études ont montré que les familles militaires monoparentales font face à des défis uniques au quotidien, et sont confrontées à d’importants conflits travail-famille. Toutefois, il n’existe encore que très peu de travaux qui ciblent le contexte canadien en particulier. Dans le but d’y remédier et pour mettre en relief les principales préoccupations des parents seuls des FAC, le personnel du Directeur général – Recherche et analyse (Personnel militaire) (DGRAPM) a mené un sondage électronique dans le cadre duquel on a soumis un questionnaire à un groupe de parents choisis au hasard parmi des parents seuls, divorcés, séparés ou veufs de la Force régulière des FAC, ayant à leur charge des enfants de 19 ans ou moins. Au total, les résultats reflétaient le point de vue de 552 parents seuls.

On a constaté que les difficultés financières figurent parmi les principales préoccupations des parents seuls, ce qui corrobore les données d’études précédentes selon lesquelles les pressions financières sont l’une des principales sources de stress pour les parents seuls, qu’il s’agisse de militaires ou de civils. L’autre difficulté évoquée par les parents seuls concernait la santé et le bien-être de leurs enfants. Aucune étude sur les parents seuls du domaine civil ou militaire n’avait encore mené à de telles conclusions, mais on peut penser que ces préoccupations ressortent ici en raison des multiples absences des parents, qu’il s’agisse de déploiements, d’entraînements ou encore du nombre imprévisible et variable d’heures de travail ou d’heures supplémentaires, qui sont des facettes caractéristiques du mode de vie des militaires. En somme, plus de 60 % des répondants affirment que les pressions financières et les préoccupations quant à la santé et au bien-être de leurs enfants sont importantes ou extrêmement importantes (voir la figure 1). Dans une forte proportion (plus de la moitié), ces parents s’inquiètent aussi de la période de l’adolescence, au cours de laquelle ils souhaiteraient être présents pour leurs enfants tout en assumant leur charge de travail et leurs responsabilités contraignantes.

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Responsabilités parentales et professionnelles : conciliation difficile, mais pas impossible

On a demandé aux parents seuls d’indiquer dans quelle mesure ils parviennent à concilier les exigences du service militaire avec leurs responsabilités parentales. La plupart pensent que la tâche n’est pas impossible (voir la figure 2). Toutefois, environ 55 % des répondants se sentent divisés entre leurs responsabilités professionnelles et familiales, et admettent qu’il n’est pas facile d’être à la fois de bons parents et de bons militaires. Environ 44 % de ces parents croient qu’il est difficile de concilier les responsabilités parentales et celles de la vie militaire. Ces constatations corroborent les données d’études antérieures selon lesquelles les parents seuls parmi les militaires sont vulnérables aux conflits travail-famille.

 

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Deux des questions posées aux participants concernaient les défis pour la vie de famille en lien avec la vie militaire. Au sujet des répercussions du travail sur la vie de famille, la vaste majorité des militaires en situation monoparentale reconnaissent une certaine influence de la sphère professionnelle à cet égard (voir la figure 3). Environ 70 % des répondants soulignent que les exigences professionnelles sont parfois en concurrence avec celles de la vie de famille, et 64 % d’entre eux admettent avoir déjà raté certaines activités familiales en raison de leurs responsabilités professionnelles.

Pour jeter un éclairage sur les mesures de soutien en milieu de travail offertes aux parents seuls, on a demandé à certains d’entre eux de citer des programmes et politiques des FAC susceptibles de les aider à concilier les exigences familiales et professionnelles. D’après les résultats, on constate que de nombreux parents seuls des FAC ne sont pas au courant des services offerts. À titre d’exemple, moins de 10 % des participants disent connaître l’existence des services offerts aux parents seuls par l’entremise des Centres de ressources pour les familles des militaires. Il s’agit d’une situation à laquelle faisait écho l’un des participants de l’étude qualitative évoquée précédemment :

Les services ne sont pas toujours bien annoncés. Il faut faire des démarches et poser des questions. Quand on déménage dans une grande ville, il vaut mieux chercher un logement à proximité d’un CRFM [Centre de ressources pour les familles des militaires].

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Sensibilisation et soutien à la conciliation travail-famille : des atouts pour les parents seuls des FAC

De nombreux parents seuls des FAC sont confrontés à des difficultés, mais pour certains d’entre eux, les conflits travail-famille représentent une préoccupation centrale. L’un des participants à l’étude qualitative s’exprimait ainsi :

“Ce qui m’inquiète le plus, c’est que mon poste au sein des Forces canadiennes peut me placer devant une situation imprévue où il me faudra choisir entre ma carrière et mes enfants.”

Les parents seuls au sein des FAC bénéficieraient sans doute d’une meilleure sensibilisation aux services offerts, et d’un meilleur accès aux diverses initiatives de soutien et autres programmes d’aide familiale (ex. : Plan de garde familiale), notamment en ce qui a trait aux services de consultation. De plus, la flexibilité et la capacité d’adaptation en milieu de travail pourraient gagner en efficacité si les gestionnaires et les dirigeants connaissaient mieux les défis inhérents aux conflits travail-famille auxquels sont confrontés les parents seuls des FAC. Enfin, en misant sur des programmes et services sur mesure qui visent à optimiser l’encadrement affectif et pratique des parents seuls (ex. : groupes de soutien), il serait possible d’accroître leur capacité de concilier les responsabilités professionnelles et familiales.

Ces travaux portent sur les conflits travail-famille et les principales difficultés qui touchent les parents seuls des FAC, mais il ne s’agit là que d’un premier pas vers une compréhension élargie des facteurs uniques qui influent sur leur bien-être. Dans le but de combler les lacunes dans les connaissances actuelles à cet égard, le DGRAPM a mis sur pied un programme de recherche exhaustif axé sur les familles des militaires, en étroite collaboration avec le domaine de la recherche (notamment par l’entremise de l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans). Ce regroupement de chercheurs a pour mandat d’accroître la qualité de vie des militaires et des vétérans canadiens, ainsi que de leur famille. Le principe de soutien aux familles a d’ailleurs été enchâssé dans l’Engagement des Forces canadiennes à l’endroit des familles, qui reconnaît les liens intrinsèques entre la situation des familles des militaires et la capacité opérationnelle des FAC.

Nous sommes conscients de la contribution importante des familles à l’efficacité opérationnelle des Forces canadiennes et nous reconnaissons la nature unique du mode de vie militaire. Nous honorons la résilience des familles et rendons hommage aux sacrifices qu’elles font pour soutenir le Canada.

Engagement des Forces canadiennes à l’endroit des familles

Dans le droit fil des principes énoncés dans l’Engagement à l’endroit des familles, il importe de continuer à développer l’expertise nécessaire pour mieux s’occuper de ces familles, et pour trouver des moyens de mieux répondre à leurs besoins uniques afin d’assurer le bien-être de chacun sur le plan individuel et familial.

 


Alla Skomorovsky est psychologue en recherche pour le compte du Directeur général – Recherche et analyse (Personnel militaire) (DGRAPM), où elle dirige une équipe de recherche sur les familles des militaires. Elle y mène des études quantitatives et qualitatives sur la résilience, le stress, l’adaptation, l’identité et le bien-être des familles des militaires.

Mme Skomorovsky a été la toute première lauréate du prix Colonel Russell-Mann en reconnaissance de la qualité de ses travaux de recherche sur les conflits travail-famille et le bien-être des parents des FAC. Cette distinction lui a été décernée dans le cadre du Forum 2015, une activité chapeautée par l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans.

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Suggestions de lecture

T. Allen, D. Herst, E. Bruck et M. Sutton (2000). « Consequences Associated with Work-to-Family Conflict: A Review and Agenda for Future Research » dans Journal of Occupational Health Psychology, vol. 5, no 2, p. 278-308.

G.L. Bowen, D.K. Orthner et L. Zimmerman (1993). « Family Adaptation of Single Parents in the United States Army: An Empirical Analysis of Work Stressors and Adaptive Resources » dans Family Relations, no 42, p. 293-304.

A.L. Day et T. Chamberlain (2006). « Committing to Your Work, Spouse, and Children: Implications for Work–Family Conflict » dans Journal of Vocational Behavior, vol. 68, no 1, p. 116-130.

Bullock (2015). The Impact of Military Life on Single-Parent Military Families: Well-Being and Resilience (Rapport technique du Directeur général – Recherche et analyse (Personnel militaire) – DRDC-RDDC-2015-R099), Ottawa (Ontario), Recherche et développement pour la défense Canada.

Les soins familiaux au Canada : une réalité et un droit

Nathan Battams

Au moins une fois dans sa vie, chacun sera probablement appelé à prodiguer des soins à un proche, ou à en bénéficier. En règle générale, les membres de la famille sont les premiers à fournir et à encadrer de tels soins et, dans certains cas, à payer pour ceux-ci. Qu’il s’agisse de reconduire un frère ou une sœur à un rendez-vous médical, de préparer les repas pour un grand-parent ou encore de passer à l’école prendre un enfant qui ne se sent pas bien, s’occuper de la famille semble si naturel et englobe un si vaste éventail d’activités qu’on finit souvent par oublier qu’il s’agit de soins familiaux… Ces quelques exemples font pourtant partie de cette « réalité des soins » à laquelle nous sommes habitués.

Les familles disposent d’une grande capacité d’adaptation, et les gens trouvent habituellement les moyens de mener de front leurs responsabilités, leurs engagements et leurs obligations multiples sur le plan professionnel et familial. Toutefois, puisque la plupart des aidants sont aussi sur le marché du travail à plein temps, il peut s’avérer difficile de concilier travail et prestation de soins. En vertu de la notion de « situation de famille » aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne, l’employeur peut être contraint de consentir certaines mesures d’adaptation à son employé qui, ayant épuisé tous les autres recours raisonnables, serait contraint de choisir entre ses obligations professionnelles et les soins à prodiguer à un membre de sa famille. De fait, les droits de la personne assurent aux travailleurs un cadre de droits et la flexibilité nécessaire afin de conjuguer leurs obligations professionnelles et leur charge de soins.

Mesures d’adaptation en vertu des droits de la personne : flexibilité de part et d’autre

La conciliation harmonieuse des soins et du travail dépend d’une certaine ouverture de l’employeur à l’égard du fait que les circonstances familiales nécessitent parfois une attention soutenue. Idéalement, ce dernier aura instauré des politiques inclusives favorisant la flexibilité en milieu de travail (réduisant ainsi le nombre de demandes individuelles) et le traitement des demandes personnalisées d’adaptation, lorsque la flexibilité ne suffit pas.

Ces demandes personnalisées d’adaptation sont fondées sur la situation familiale et s’appliquent lorsque l’employé est confronté à des obligations contraignantes en matière de soins, contrairement à celui qui ferait simplement le choix personnel d’aider un membre de sa famille. À titre d’exemple, un parent qui s’absente du travail pour reconduire son enfant à des activités parascolaires le fait par choix personnel, mais s’il doit reconduire son enfant à l’hôpital faute de trouver un aidant, on parle plutôt d’une obligation.

La conciliation harmonieuse des soins et du travail dépend d’une certaine ouverture de l’employeur à l’égard du fait que les circonstances familiales nécessitent parfois une attention soutenue.

Du reste, l’obligation n’est pas toujours un motif suffisant : l’employé doit aussi prouver qu’il a véritablement envisagé toutes les solutions possibles pour tenter de concilier ses responsabilités professionnelles et la prestation de soins. Devant une demande personnalisée d’adaptation, l’employeur est tenu d’évaluer si l’employé est victime d’un préjudice causé par des règles ou des pratiques en milieu de travail éventuellement inconciliables avec ses responsabilités de soins. Le cas échéant, il accordera à l’employé le temps d’évaluer les solutions possibles, discutera avec lui de la situation, procédera à une évaluation des circonstances individuelles, et envisagera le recours à des modalités de travail flexibles (MTF).

L’employeur peut toutefois refuser d’offrir des mesures d’adaptation, mais il doit prouver qu’une telle éventualité causerait à son organisation un « préjudice injustifié » résultant de la modification des politiques, des pratiques, des règlements ou de l’espace physique. Du point de vue légal, il n’existe pas de définition précise de la notion de préjudice injustifié, chaque cas étant un cas d’espèce influencé par les particularités du milieu de travail et des besoins opérationnels. De même, les dispositions en matière de droits de la personne prévoient l’évaluation individuelle des demandes d’adaptation, en tenant compte des attentes de la famille et des rôles au sein de celle-ci. S’il considère qu’il y a préjudice, l’employeur est tenu de fournir des preuves quant à la nature et à l’importance de celui-ci.

L’affaire Johnstone c. Canada a fait jurisprudence sur le principe de situation de famille. En effet, le jugement rendu dans ce dossier a contribué à clarifier les circonstances devant lesquelles un employeur devrait consentir certains arrangements à son employé compte tenu des obligations de ce dernier envers son enfant. Fiona Johnstone et son mari élevaient leurs deux bambins tout en travaillant à plein temps pour le compte de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), où ils devaient composer avec des quarts rotatifs et imprévisibles. Le mari de Mme Johnstone était aussi appelé à se déplacer pour le travail. Pour réussir à assumer ses responsabilités parentales, cette dernière a donc demandé un horaire de travail à plein temps à heures convenues, une requête qui lui a été refusée au motif que les horaires à heures fixes, selon les politiques de l’ASFC, n’étaient possibles qu’à temps partiel. Du point de vue de l’ASFC, les responsabilités inhérentes aux soins des enfants résultaient d’un choix personnel et l’employeur n’avait pas « l’obligation de prendre des mesures d’adaptation ».

Le Tribunal canadien des droits de la personne a finalement tranché en faveur de Mme Johnstone, reconnaissant qu’elle avait été victime de discrimination. La Cour fédérale a refusé la requête en révision judiciaire du Procureur général, confirmant ainsi la portée et le sens du principe de « situation de famille » aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne en ce qui a trait à l’obligation parentale de s’occuper des enfants. Refusant la demande de contrôle judiciaire qui lui était adressée dans l’affaire Johnstone c. Canada, l’honorable juge Mandamin déclarait :

« … il est difficile d’envisager la famille sans tenir compte des enfants qui existent au sein de cette famille et des liens qui existent entre les enfants et les parents. L’aspect le plus important de cette relation est l’obligation qu’ont le père et la mère de prendre soin de leurs enfants. Il me semble que, si le législateur fédéral avait eu l’intention d’exclure les obligations parentales, il aurait employé des mots qui expriment clairement son intention en ce sens. »

En 2014, la Cour d’appel fédérale a également maintenu ce jugement, cité à maintes reprises depuis dans plusieurs dossiers et devant diverses instances au Canada. Malgré tout, certaines divergences législatives persistent au pays à cet égard. Ainsi, le principe de « situation de famille » n’est pas encore considéré parmi les motifs de discrimination illicite au Nouveau-Brunswick; en Ontario, la notion se limite aux relations parents-enfants, mais s’applique toutefois aux aidants auprès d’un parent vieillissant.

Mesures d’adaptation pour les soins : des coûts moindres pour l’employeur et pour l’employé

Le respect et la reconnaissance des droits de la personne ne sont pas les seuls motifs qui incitent un employeur à consentir certains arrangements pour les soins : la possibilité de réduire les coûts éventuels entre aussi en ligne de compte, et ce facteur joue autant en faveur de l’employeur que de l’employé. Dans une étude publiée récemment, Janet Fast estimait que les coûts pour l’aidant sont de trois ordres : la prestation des soins, les limitations professionnelles et les dépenses directes.

La prestation des soins suppose des coûts pour l’employé, sous forme de temps passé auprès du bénéficiaire de soins, de temps consacré pour ce dernier (ex. : prise de rendez-vous), de temps pour se rendre auprès de lui, et de temps lié au suivi et à l’encadrement des soins. Les limitations professionnelles concernent la nécessité de réduire ses heures de travail ou de quitter son poste, la perte de productivité et les conséquences éventuelles, c’est-à-dire la baisse ou la perte de revenus et les effets sur le cheminement de carrière. Enfin, les dépenses directes touchent divers aspects comme le logement, les services communautaires, les fournitures et le transport que les aidants doivent parfois assumer.

L’incapacité de concilier les obligations concurrentes de la prestation de soins et du travail rémunéré entraîne des pertes annuelles en main-d’œuvre équivalant à près de 558 000 employés à plein temps au Canada.

Les coûts auxquels l’employé est confronté en lien avec la prestation de soins ont aussi des répercussions pour l’employeur, de façon directe et indirecte. En termes de coûts directs, l’employeur est notamment confronté à un taux de roulement élevé, à une augmentation du taux d’absentéisme et à divers coûts supplémentaires en avantages sociaux (ex. : réclamations pour soins de santé ou congés d’invalidité pour employés assumant un rôle d’aidant). Les coûts indirects se manifestent par une baisse de rentabilité par employé et une perte de productivité, sans oublier les effets corollaires pour les collègues, les superviseurs, les fournisseurs et la clientèle. À terme, c’est l’ensemble de l’économie qui accuse le coup. Selon l’étude de Mme Fast, l’incapacité de concilier les obligations concurrentes de la prestation de soins et du travail rémunéré entraîne des pertes annuelles en main-d’œuvre équivalant à près de 558 000 employés à plein temps au Canada.

Pourtant, les organisations qui soutiennent leurs employés dans leur rôle d’aidant familial bénéficient de nombreux avantages, notamment la possibilité de consolider leur réputation et leur image publique tout en harmonisant leurs engagements en termes de responsabilité sociale d’entreprise (RSE). De plus en plus d’études tendent à montrer que les milieux de travail flexibles favorisent la productivité, le rendement au travail, le recrutement et la rétention des employés.

Une variété d’approches pour faciliter les soins à la famille

Lorsqu’il est question de soins familiaux, chaque situation est unique, en fonction des aidants et des bénéficiaires eux-mêmes, de la nature des soins requis, du type d’emploi qu’occupe l’aidant et de la culture organisationnelle qui prévaut dans son milieu professionnel. Bref, il n’existe aucune « solution universelle ».

De plus en plus d’études s’intéressent aux avenues à privilégier pour favoriser l’instauration et l’intégration de modalités de travail flexibles. À cet égard, la Commission canadienne des droits de la personne a publié un Guide sur la conciliation des responsabilités professionnelles et des obligations familiales des proches aidants, qui met en relief diverses MTF favorables aux mesures d’adaptation, notamment le télétravail, le travail partagé, la souplesse des heures de début et de fin de quart, les horaires comprimés, l’allongement des congés parentaux ou de maternité, les échanges de quart, les congés de soignant, les congés discrétionnaires et autres congés auprès d’un membre de la famille dans le besoin, les congés en cas d’urgence ou d’imprévu auprès d’un enfant ou d’un aîné, le travail à temps partiel avec avantages sociaux proportionnels, ou encore la rotation ou la mise en commun des tâches et des responsabilités professionnelles.

Hausse anticipée de la fréquence des soins à la famille

Les soins sont une réalité commune au sein des familles (de même qu’entre elles), peu importe leur lieu de résidence ou leurs origines. Compte tenu de la réduction de la taille des familles, du vieillissement de la population canadienne et, par conséquent, de l’augmentation en nombre et en complexité des cas d’incapacité, il est de plus en plus pertinent de privilégier les mesures d’adaptation favorables aux soins familiaux. Cette nouvelle réalité met en relief le « manque à gagner » en matière de soins au Canada.

Selon Statistique Canada, près de la moitié (46 %) des Canadiens de toutes les régions du pays (soit 13 millions de personnes) ont procuré des soins à un moment ou un autre de leur vie auprès d’un ami ou d’un membre de la famille en raison de l’âge, d’une maladie chronique ou d’une incapacité. Au cours de l’année 2012 seulement, leur nombre s’élevait à 8 millions de personnes (soit 28 % de la population).

Partout au pays, le vieillissement de la population canadienne influence les besoins en matière de soins. On prévoit que les aînés représenteront presque le quart de la population d’ici 2030 (comparativement à 15,3 % en 2013), et que le nombre de centenaires sera alors passé de 6 900 à plus de 15 000. Par ailleurs, non seulement les aînés seront-ils plus nombreux, mais ils vivront plus longtemps : à l’âge de 65 ans, les femmes peuvent espérer vivre encore 22 années (soit jusqu’à 87 ans) et les hommes encore 19,2 années (soit jusqu’à 84,2 ans), alors que l’espérance de vie passé ce cap n’était que de 19 années et de 14,7 années respectivement, en 1981.

Du reste, le portrait des soins au Canada ne se limite pas aux aînés, puisque les enfants représentent aussi une portion importante des bénéficiaires. Cette génération a d’ailleurs grandi dans un contexte où le nombre de ménages à deux soutiens a connu une forte croissance : alors que 36 % des couples avec enfants vivaient dans un tel ménage en 1976, la proportion avait grimpé à 69 % en 2014. Les trois quarts de ces familles comptent deux conjoints travailleurs à plein temps. Bien entendu, il en résulte une augmentation des revenus de la famille, avec toutefois pour corollaire une diminution du nombre de personnes disponibles pour aider à concilier les responsabilités professionnelles et familiales.

À l’image des familles, les soins familiaux sont complexes et diversifiés

Les soins sont complexes et divers, et concernent plusieurs domaines d’activité. Dans son Enquête sociale générale sur les soins donnés et reçus, Statistique Canada dresse une longue liste – pourtant non exhaustive – des activités liées aux soins, notamment en ce qui a trait au transport, à la préparation des repas, aux soins médicaux, aux soins personnels, à l’entretien ménager et à la gestion des finances. Peu à peu, des réalités nouvelles et émergentes se présentent, par exemple lorsqu’une personne transgenre nécessite des soins de transition de la part d’un conjoint, ou encore lorsqu’un parent est sommé de se présenter en cour concernant la garde et les soins d’un enfant. De tels exemples témoignent encore de la diversité des familles et des besoins en matière de soins.

Il est d’autant plus difficile d’apprécier nettement la situation si l’on considère au surplus le caractère changeant et instable des relations de soins entre les individus. En effet, le type, la nature et la durée des soins varient selon les circonstances uniques du bénéficiaire (voir le tableau). Il s’agira tantôt de soins épisodiques ou à court terme (par exemple dans le cas d’un membre de la famille dont la mobilité est temporairement réduite après s’être fracturé une jambe), tantôt de soins intensifs ou à long terme (comme pour un membre de la famille confronté à une maladie mortelle et soigné dans un centre de soins palliatifs).

Certaines exigences liées aux soins sont prévisibles, si bien que l’aidant dispose d’un peu plus de latitude pour gérer son temps et ses ressources. Par contre, d’autres circonstances sont plus compliquées. Peu importe le type, la nature et la durée des soins, les aidants familiaux doivent trouver le moyen d’y conjuguer leurs obligations et engagements professionnels, et les employeurs ont un rôle à jouer pour soutenir et favoriser cet équilibre.

Concilier soins et travail : des bénéfices pour l’employeur et pour la famille

Un jour ou l’autre, la majorité des Canadiens se trouveront face à des responsabilités en matière de soins. Étant donné le caractère imprévisible des besoins et puisque ceux-ci ne surviennent pas uniquement hors des heures de travail, les employés et leurs employeurs devront trouver des avenues novatrices pour réussir à concilier les soins et le travail sans miner la productivité et le moral, faute de quoi ils seront confrontés à des coûts de part et d’autre. Dans une telle optique, il sera certainement bénéfique aux employés, aux employeurs et au marché du travail dans son ensemble de privilégier une approche ouverte et créative misant sur la flexibilité dans le but d’harmoniser les soins et le travail au Canada.

« Il s’agit d’un enjeu qui touche des millions de Canadiens et de Canadiennes à divers moments de leur existence, et qui occupera une place grandissante compte tenu des changements démographiques. La CCDP incite les employeurs, les employés et les syndicats à privilégier une approche concertée pour permettre aux aidants familiaux de continuer à participer pleinement et concrètement au marché du travail. »  [traduction]

David Langtry, président par intérim, Commission canadienne des droits de la personne (2014)

 


Nathan Battams est auteur et chercheur au sein de l’Institut Vanier de la famille.

Pour allier soins et flexibilité

Sara MacNaull

 

Que ce soit au domicile, au travail ou au sein de leur collectivité, les membres de la famille sont confrontés à de multiples responsabilités, obligations et engagements – souvent complexes. Or, les familles jouissent d’une grande créativité et d’une excellente capacité d’adaptation. Néanmoins, comme certaines études l’ont montré, les membres de la famille qui occupent un emploi souhaitent que leur employeur respecte leur vie personnelle et ont besoin de flexibilité pour assumer pleinement les multiples rôles qui leur incombent.

Au sein des familles canadiennes, les travailleurs sont de plus en plus nombreux à vouloir bénéficier de modalités de travail flexibles (MTF) pour être en mesure d’assurer les soins que nécessitent amis ou membres de la famille immédiate ou élargie. Les MTF permettent d’améliorer grandement la qualité de vie et la productivité des personnes qui, tout en occupant un emploi, assument parallèlement une charge d’aidant, que ce soit auprès d’un enfant, d’un aîné ou d’un parent malade, d’un frère, d’une sœur ou d’un conjoint atteint d’une incapacité, ou encore auprès d’un ami proche touché par une maladie chronique.

Le type de soins à prodiguer, leur nature et leur durée sont variables (voir le tableau) et sont fonction des circonstances particulières qui touchent le bénéficiaire. Même si certaines exigences de soins sont prévisibles et permettent plus de flexibilité dans la gestion du temps et des ressources, d’autres situations sont plus compliquées. Par exemple, lorsqu’un grand-parent ou un parent vieillissant a besoin de soins quotidiens ponctuels, l’aidant peut planifier certaines tâches en dehors de ses heures de travail (ex. : épicerie, travaux d’entretien, etc.). Par contre, lorsqu’il est question de soins palliatifs ou de fin de vie – qui sont par définition stressants et imprévisibles – les aidants familiaux sont alors confrontés à l’idée de perdre prochainement un être cher tout en ayant à composer avec les particularités du réseau de soins de santé.

Le vieillissement et les soins au Canada

Ce sont 13 millions de personnes qui ont dit avoir un jour agi comme aidant auprès d’un ami ou membre de la famille.

Parmi les aidants familiaux, 39 % ont pris soin d’un père ou d’une mère, 8 % d’un conjoint ou partenaire, et 5 % d’un enfant. Les autres (soit 48 %) disent s’être occupé d’amis ou d’autres membres de la famille.

D’après les prévisions, les aînés compteront pour environ le quart de la population canadienne d’ici 2036.

Source : Statistique Canada

De même, lorsque la maladie ou une blessure survient soudainement et sans avertissement (crise cardiaque, AVC, étirement d’un ligament, etc.), la famille et les proches doivent se mobiliser sur-le-champ pour assurer les soins et le soutien. Dans une telle situation, l’aidant qui est sur le marché du travail se trouve dans l’obligation d’examiner avec son employeur ou son superviseur les diverses MTF disponibles, et ce, pour une période déterminée ou non. Le degré d’ouverture du gestionnaire ou de l’employeur devant une telle requête aura éventuellement des incidences importantes sur la famille et la vie de famille.

Récemment, certaines décisions rendues par le Tribunal canadien des droits de la personne ont permis de mettre en relief les besoins complexes qui caractérisent les soins familiaux et, par conséquent, toute la valeur qu’il faut accorder aux MTF. Ce tribunal a entendu plusieurs causes où les aidants n’avaient pas pu bénéficier de la flexibilité souhaitée, et où le refus de collaborer de la part des employeurs a été jugé discriminatoire sur la base de l’état familial. La Commission ontarienne des droits de la personne définit l’état familial comme le « fait de se trouver dans une relation parent-enfant », ce qui fait aussi référence à une variété d’autres relations familiales sans lien de sang ou d’adoption, mais fondées sur des rapports en matière de soins, de responsabilité et d’engagement.

En tenant compte du vieillissement de la population canadienne et de l’évolution des besoins en matière de soins, qu’ils soient structurés ou non, il faudra mettre sur pied diverses modalités de travail flexibles ou personnalisées ainsi que certaines mesures en milieu de travail faisant écho à l’état familial. On entend par soins structurés les divers services rémunérés fournis par un établissement ou un individu à l’intention d’un bénéficiaire de soins, alors que les soins non structurés désignent plutôt les soins non rémunérés assurés par la famille, les amis et les bénévoles. Dans bien des cas, les plans de traitement et de rétablissement prévoient des soins structurés et non structurés. Or, les aidants à qui il revient d’assurer ces soins non structurés doivent pouvoir compter sur une certaine flexibilité pour coordonner leurs responsabilités personnelles et familiales avec les services du réseau de soins de santé, d’autant plus que les soins à prodiguer sont changeants et que les besoins fluctuent au fil du temps.

Les travailleurs ont tendance à considérer que cette flexibilité voulue n’est accessible qu’aux gestionnaires, sinon aux cols blancs et aux professionnels. Dans un rapport publié récemment par le Families and Work Institute sous le titre Workflex and Manufacturing Guide: More Than a Dream, on a toutefois constaté que même les entreprises du secteur manufacturier (où les milieux de travail sont généralement perçus comme inflexibles) sont de plus en plus soucieuses des besoins de leurs employés relativement aux soins. Pour répondre à ces besoins, on adopte ici et là des MTF créatives et novatrices afin d’accroître la productivité et la satisfaction des employés.

Ainsi, un certain employeur du secteur manufacturier a offert de payer la moitié du salaire de la cinquième journée de travail hebdomadaire lorsque l’employé atteint ses objectifs de productivité, ce dernier ayant alors la possibilité de garnir sa banque de congés rémunérés en accumulant des demi-journées. Dans une autre entreprise, l’employeur a choisi de miser sur la formation polyvalente, en proposant à ses employés des formations à plusieurs postes du processus de production, élargissant ainsi la flexibilité et la polyvalence des travailleurs tout assurant le fonctionnement de l’ensemble de la chaîne pour mieux répondre aux besoins de l’entreprise.

Chez les travailleurs en situation précaire, les travailleurs saisonniers de même que les travailleurs autonomes, la flexibilité est en quelque sorte inhérente à la nature même de ce type d’emploi. Toutefois, lorsqu’une charge de soins se rajoute, ces derniers encaissent le coup plus durement, ce qui se traduit notamment par une baisse de revenus en raison des absences ou de la réduction de la charge de travail.

Au demeurant, la famille représente l’institution sociale sachant le mieux s’adapter, et cette aptitude est certainement liée à la nécessité de s’ajuster au contexte en perpétuelle évolution. Toute organisation, quelle qu’elle soit, est formée d’individus uniques enracinés chacun dans leur propre famille, où les réalités sont uniques. Cela étant, la flexibilité représente un atout essentiel pour favoriser la résilience des familles et consolider la main-d’œuvre, l’économie et la société dans son ensemble.

 


Sara MacNaull est responsable du réseautage, des projets et des activités spéciales au sein de l’Institut Vanier de la famille. Elle est en voie d’obtenir le titre de professionnelle agréée en conciliation travail-vie personnelle.

Rapport externe : «Workflex and Manufacturing Guide : More Than a Dream»

[en anglais seulement, « Guide du flexi-travail dans le secteur manufacturier : du rêve à la réalité »]

En règle générale, dans le but d’atteindre les objectifs organisationnels, les employeurs souhaitent une certaine souplesse de la part de leurs employés. En contrepartie, les employés ont aussi besoin d’un peu de souplesse pour pouvoir assumer leurs responsabilités familiales. Or, l’élaboration, la mise en œuvre et le maintien de modalités de travail flexibles (on parle aussi de flexi-travail) ne sont pas toujours simples, et il n’existe aucune solution toute faite pour répondre parfaitement aux besoins particuliers des différents employés, employeurs et clients.

Afin de favoriser des milieux de travail sains et l’instauration de programmes de flexi-travail efficaces, l’organisme When Work Works (un partenariat entre la Society for Human Resources Management et le Families and Work Institute) a récemment publié un guide intitulé Workflex and Manufacturing Guide: More Than a Dream, pour aider les employeurs du secteur manufacturier à amorcer le dialogue à cet égard, et permettre aux employeurs ainsi qu’aux employés de mieux comprendre les avantages de la flexibilité en milieu de travail.

Les auteurs de ce guide reconnaissent que les emplois dans le secteur manufacturier comportent des particularités incontournables. De fait, la nature même du travail en chaîne de montage, l’utilisation d’équipements spécialisés, l’importance des syndicats, les variations du volume de production et la répartition du travail en plusieurs quarts représentent des facteurs qui déterminent les besoins et la réalité propres aux activités de fabrication. Pourtant, le contexte manufacturier n’est pas incompatible avec les modalités de travail flexibles. En effet, la formation polyvalente peut permettre aux employés de travailler avec divers équipements. On peut aussi modifier certains équipements réglables pour faciliter ce type de formation. Par conséquent, divers échanges entre les employés et leurs représentants syndicaux sur ces questions permettront éventuellement de préciser les besoins de la main-d’œuvre en matière de flexibilité. Grâce à des programmes pilotes, les employeurs ainsi que les employés seront ainsi en mesure d’évaluer diverses approches novatrices en matière de flexi-travail.

L’étude cite notamment des exemples où des fabricants ont instauré diverses stratégies de flexi-travail pour mieux répondre à la conjoncture. Ainsi, lorsque la société American Sensor Technologies a dû faire face à l’annulation de plusieurs commandes lors de la récession de 2008, on est parvenu à retenir le personnel qualifié tout en réduisant le coût de la main-d’œuvre, et ce, en accordant des congés à tour de rôle (plutôt que de procéder unilatéralement à des licenciements) et en offrant une formation polyvalente aux employés de production pour leur permettre d’occuper différents postes. Dans la même veine, la société PlastiCert a choisi de recourir à une telle formation élargie pour maintenir ses niveaux de production, et la polyvalence du personnel lui a permis de pourvoir facilement au remplacement d’employés non disponibles.

Du point de vue de l’employé tout comme de l’employeur, la souplesse est un élément clé pour assurer le succès de tout programme de travail flexible dans le secteur manufacturier. Les deux parties ont besoin d’un degré de latitude suffisant pour faire face aux heures et aux horaires de travail changeants. Et du point de vue des employés, ceux-ci doivent pouvoir « mettre à profit les options de flexi-travail sans préjudice à leur salaire, leurs avantages sociaux, leur sécurité d’emploi ou leurs possibilités d’avancement ». [traduction]

Bref, l’ouvrage Workflex and Manufacturing Guide: More Than a Dream représente une ressource précieuse pour les employeurs et les employés du secteur manufacturier, et constitue un outil pertinent pour amorcer le dialogue en vue de négociations importantes sur le flexi-travail au bénéfice de toutes les parties. Après tout, si les modalités de travail flexibles aident les employés à assumer leurs responsabilités familiales, elles contribuent aussi à « accroître la satisfaction des employés et, en fin de compte, la productivité et les résultats nets ». [traduction]

Cette étude est disponible au téléchargement sur le site Web de l’organisme When Work Works (en angl. seulement).

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