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La famille compte
Cette nouvelle ressource de l’Institut Vanier explore l’évolution, la continuité et la complexité des familles au Canada au cours des trois dernières décennies. Publié à l’occasion du 30e anniversaire de l’Année internationale de la famille, le rapport La famille compte brosse un portrait statistique des familles au pays, en plus de mettre en relief les tendances au fil du temps et leur incidence sur les familles et la vie de famille.
Chapitre 38 – Les familles transgenres et non binaires sont de plus en plus reconnues
La pluralité des genres est de plus en plus visible et reconnue au sein de la société canadienne, ce qui se reflète dans les changements apportés aux lois canadiennes, notamment l’ajout, en 2017, de l’identité et de l’expression de genre comme motifs de distinction illicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne1. Statistique Canada a également adapté le Recensement de 2021 en y intégrant des modifications visant à mieux mesurer la diversité de genre2.
En 2021, près de 100 900 personnes au Canada s’identifiaient comme transgenresa ou non-binairesb, soit environ 1 personne de 15 ans ou plus sur 3003. Environ 31 % des personnes de genre différent étaient des femmes transgenres (31 600), 28 % des hommes transgenres (27 900) et 41 % des personnes non binaires (41 400). Près des deux tiers (62 %) étaient âgées de moins de 35 ans.
En 2021, le Canada comptait plus de 32 000 couples transgenres et non binairesc, à savoir une part nettement plus élevée de couples transgenres (21 800) que de couples non binaires (10 400)4. Parmi les couples transgenres, 74,8 % étaient mariés et 25,2 % vivaient en union libre, tandis que chez les couples non binaires, 38,8 % étaient mariés et 61,3 % vivaient en union libre.
Entre 2019 et 2021, les personnes transgenres et non binaires de 15 ans et plus étaient moins susceptibles que les personnes cisgenres de vivre avec un enfant de moins de 12 ans (7,5 % c. 21,5 %)5. En 2021, 37,0 % des couples transgenres vivaient avec des enfants, soit une proportion plus élevée que chez les couples non binaires (21,5 %), mais plus faible que chez les couples cisgenres de genre différent (50,5 %)4.
En 2021, près de 8 femmes et hommes transgenres sur 10 (78,5 % et 78,4 %, respectivement) résidaient dans de grands centres urbains de 100 000 personnes ou plus, comparativement à 74,3 % des femmes cisgenres et à 73,6 % des hommes cisgenres. C’étaient les personnes non binaires qui étaient les plus susceptibles de vivre dans de grands centres urbains (85,0 %)3.
En dépit d’une reconnaissance croissante, les personnes transgenres et non binaires se butent encore à des iniquités qui nuisent à leur bien-être6, 7. Plus de la moitié (54,7 %) des personnes transgenres et non binaires sondées entre 2019 et 2021 estimaient que leur santé mentale était passable ou mauvaise8. Ce taux dépasse de plus de cinq fois celui des personnes cisgenres (9,9 %). Elles étaient en outre plus susceptibles que les personnes cisgenres d’avoir envisagé le suicide, ou d’avoir souffert d’anxiété ou de troubles de l’humeur9, 10. En 2020, le taux de pauvreté des personnes non binaires (20,6 %) était plus de deux fois supérieur à celui des femmes cisgenres (7,9 %) et des hommes cisgenres (8,2 %)11. Le taux de pauvreté atteignait 12,0 % chez les femmes transgenres et 12,9 % chez les hommes transgenres.
Pourquoi s’en préoccuper?
Le bien-être des jeunes personnes transgenres et non binaires dépend en grande partie de l’aide qu’elles reçoivent de leur famille12. Elle est reconnue comme un facteur de protection pour leur santé mentale et physique, leurs relations sociales et leur satisfaction dans la vie13, 14. Les jeunes bénéficiant d’un appui parental15 ont une meilleure qualité de vie, étant notamment moins exposés à la dépression11. Les études ont montré que les frères et sœurs peuvent aussi constituer une importante source de soutien, celle-ci contribuant à réduire la dépression, les idées suicidaires et certains traumatismes extérieurs (p. ex. liés à une agression) chez les jeunes transgenres16.
Comme en témoignent les études, bien des jeunes de genre différent sont victimes de comportements familiaux hostiles, comme le rejet ou l’exclusion sociale, le mépris, les préjugés, ainsi que de violences verbales ou physiques17. Les personnes isolées ou rejetées par leur famille biologique soulignent l’importance de l’aide que leur apporte leur « famille choisie »6, 7.
Les personnes de genre différent demeurent confrontées à des inégalités tout au long de leur vie. Les études ont montré que les personnes âgées transgenres et de genre différent se heurtent régulièrement à des difficultés pour obtenir des soins de santé et accéder à des services sociaux. Elles font notamment face à des pratiques discriminatoires, à des mécanismes de contrôle exercés par des professionnel·les de la santé et à des délais pour l’obtention de soins18. Lorsqu’il est question de droits légaux, les membres d’une famille choisie qui prennent soin de personnes âgées de genre différent se butent généralement à plus d’obstacles que les familles biologiques19.
Il est fondamental de s’intéresser aux diverses réalités familiales des personnes transgenres et non binaires pour comprendre et être en mesure de soutenir leur bien-être.
Source : Statistique Canada. (13 juillet 2022). Tableau 98-10-0136-01 – Statut de diversité de genre de la famille comptant un couple, type d’union et présence d’enfants : Canada, provinces et territoires, régions métropolitaines de recensement et agglomérations de recensement4.
a Les personnes ayant déclaré que le sexe qui leur a été assigné à la naissance diffère de leur genre actuel.
b L’ensemble des genres qui ne sont ni exclusivement masculins ni exclusivement féminins.
c Les familles comptant un couple dont au moins l’une des personnes est transgenre ou non binaire, sans que ces termes soient nécessairement utilisés par les personnes concernées.
Références
- Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel, L.C. 2017, ch. 13. (2017). https://www.parl.ca/documentviewer/fr/42-1/projet-loi/c-16/sanction-royal ↩︎
- Statistique Canada. (16 août 2023). Améliorer les données sur les populations 2ELGBTQ+. StatsCAN Plus. https://www.statcan.gc.ca/o1/fr/plus/4313-ameliorer-les-donnees-sur-les-populations-2elgbtq ↩︎
- Statistique Canada. (10 avril 2024). Le Canada est le premier pays à produire des données sur les personnes transgenres et les personnes non binaires à l’aide du recensement. Le Quotidien. https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/220427/dq220427b-fra.htm ↩︎
- Statistique Canada. (13 juillet 2022). Tableau 98-10-0136-01 – Statut de diversité de genre de la famille comptant un couple, type d’union et présence d’enfants : Canada, provinces et territoires, régions métropolitaines de recensement et agglomérations de recensement. https://doi.org/10.25318/9810013601-fra ↩︎
- Statistique Canada. (25 janvier 2024). Tableau 13-10-0875- 01 – Caractéristiques socioéconomiques de la population transgenre ou non binaire, 2019 à 2021. https://doi.org/10.25318/1310087501-fra ↩︎
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La famille compte 2024 est une publication de l’Institut Vanier de la famille présentant des informations précises et actuelles sur les familles et la vie de famille au Canada. Rédigée dans un langage clair, elle est composée de chapitres sur un éventail de sujets et tendances qui ont une incidence sur la vie familiale au pays. Ses quatre sections (la structure, le travail, l’identité et le bien-être des familles) trouvent appui sur le Cadre sur la diversité et le bien-être des familles.
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Comment citer ce document :
Battams, N. (2025). Les familles transgenres et non binaires sont de plus en plus reconnues. Dans La famille compte 2024, L’Institut Vanier de la famille. https://institutvanier.ca/la-famille-compte-2024/les-familles-transgenres-et-non-binaires-sont-de-plus-en-plus-reconnues